Le chef du Parlement iranien, Ali Larijani, en visite officielle à Beyrouth, a affirmé lundi que Téhéran "est prêt à aider pour améliorer la situation économique du Liban", qui vit sa pire crise économique et financière depuis la guerre civile (1975-1990). Il s'agit de la première visite au Liban d'un haut responsable iranien depuis la formation, en janvier, du nouveau gouvernement qui a vu le jour au terme de tractations partisanes menées entre autres par le Hezbollah, qui est soutenu par Téhéran.
"Nous souhaitons au nouveau gouvernement toute la réussite pour consolider la stabilité et la sécurité dans le pays" a déclaré M. Larijani, dont les propos ont été rapportés par l'Agence nationale d'information (Ani, officielle) à l'issue de sa rencontre avec le président Michel Aoun. "Nous sommes prêts à apporter notre aide pour améliorer la situation économique", a-t-il également déclaré, cité par l'Ani et le compte Twitter de la présidence libanaise.
Ce n'est pas la première fois que Téhéran exprime sa disposition à aider le Liban, une proposition accueillie de manière mitigée par une classe politique divisée. Une partie de cette classe politique craint les éventuelles conséquences d'une telle aide, surtout en raison des antagonismes entre Téhéran et Washington ou certains pays du golfe comme l'Arabie saoudite, qui ont longtemps été des investisseurs économiques importants pour le Liban. "L'argent liquide de l'Iran peut résoudre la crise d'un parti, mais pas la crise d'un pays", a averti vendredi l'ancien Premier ministre Saad Hariri, en allusion au soutien de Téhéran apporté au Hezbollah.
Pour faire face aux difficultés économiques, le Liban a demandé une assistance technique du Fonds monétaire international (FMI). Le pays croule sous une dette avoisinant les 92 milliards de dollars, soit plus de 150% du PIB. En mars, l'Etat doit rembourser 1,2 milliard de dollars d'eurobonds -des obligations émises en dollars- arrivant à échéance. La livre libanaise a connu une forte dépréciation ces derniers mois face au dollar, même si officiellement le taux de change reste inchangé.
La proposition d'aide iranienne intervient alors que la République islamique a plongé dans une violente récession, dont elle peine à sortir, après le retrait en 2018 des Etats-Unis de l'accord international sur le nucléaire iranien et le rétablissement des sanctions américaines.
"Nous n'engageons personne"
Lors d'une conférence de presse tenue à l'ambassade d'Iran à Beyrouth, au terme de ses réunions, le chef du Parlement iranien a affirmé que son pays était prêt à coopérer avec le cabinet Diab "dans tous les domaines". "Le Liban traverse une étape délicate, et nous espérons que le nouveau gouvernement sera en mesure de résoudre les problèmes et surmonter les difficultés auxquelles le pays est actuellement confronté. Nous sommes prêts à coopérer avec le gouvernement dans tous les domaines", a ajouté M. Larijani. Il a indiqué à titre d'exemple que l'Iran pouvait aider le Liban au niveau de l'électricité et des médicaments. "La décision dans ce cadre appartient toujours au peuple libanais", a-t-il noté.
Il a également affirmé que toutes les propositions faites par l'Iran au Liban sont toujours à l'ordre du jour. "Nous ne cachons pas notre soutien à la résistance, et nous avons discuté aujourd'hui de tous les domaines dans lesquels nous pouvons soutenir le Liban lors des réunions avec les responsables", a-t-il noté. En réponse à la question de savoir si un soutien iranien au Liban pourrait fermer la porte au soutien de l'Occident, M. Larijani a répondu : "En tant que pays ami du Liban, nous exprimons notre entière disponibilité à le soutenir dans tous les domaines, mais nous n'engageons personne".
Par ailleurs, M. Larijani a affirmé que l'assassinat du puissant général iranien Kassem Soleimani, début janvier dans un raid américain à Bagdad, est un "crime terroriste" et "une opération lâche" qui montre "la faiblesse des Etats-Unis, qui n'ont pas pu atteindre leurs objectifs par d'autres moyens". "Les Etats-Unis devraient savoir que nous sommes devenus plus déterminés à atteindre nos objectifs, et les rassemblements en Iran ont confirmé leur soutien au régime islamique", a assuré M. Larijani. "Les Américains soutiennent les sionistes afin de contrôler les affaires de la région, a-t-il encore accusé. Sans la présence du Hezbollah au Liban, Israël aurait commis davantage de crimes contre le peuple libanais".
Lettre de Rohani à Aoun
Lors de sa tournée auprès des responsables, le chef du Parlement iranien a remis à Michel Aoun une lettre du président iranien, Hassan Rohani, portant sur les relations bilatérales. Lors de leur réunion, les deux hommes ont discuté des derniers développements dans la région, notamment en Syrie. A ce sujet, le chef de l'Etat libanais a souligné l'importance de coordonner le rapatriement des réfugiés syriens, étant donné que la majorité des territoires syriens sont désormais stables et sûrs. La veille, M. Larijani avait été reçu à Damas par le président syrien, Bachar el-Assad. Les deux hommes ont également évoqué la situation en Iran, où des élections législatives doivent avoir lieu vendredi.
M. Larijani a également été reçu par son homologue libanais, Nabih Berry. Ce dernier a affirmé, lors de la réunion, que "l'union fait la force et c'est ce qui est requis des Libanais pendant cette phase" que traverse le pays, qui connaît sa plus grave crise économique depuis la guerre civile (1975-1990) et un mouvement de contestation contre la classe dirigeante, qui dure depuis quatre mois. Le responsable iranien a par la suite discuté des développements dans la région et des relations bilatérales avec le Premier ministre Hassane Diab.
Larijani reçu par Berry. AFP / LEBANESE PARLIAMENT
Réunion avec Nasrallah
Ali Larijani a été également reçu par le secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, qui vit dans la clandestinité depuis la guerre de 2006 avec Israël. Les deux hommes ont discuté "des derniers développements dans la région et des moyens d'affronter les défis politiques, sécuritaires et économiques", selon un communiqué du bureau de presse du Hezbollah. Il a en outre rencontré des représentants de différentes factions palestiniennes au Liban.
Cette délégation iranienne est la première délégation étrangère officielle à être reçue par le Premier ministre Diab, dont le gouvernement a été formé le 21 janvier et a obtenu la confiance du Parlement le 11 février. Cette visite intervient au lendemain d'un discours de Hassan Nasrallah, qui a appelé à "donner sa chance" au nouveau gouvernement pour lui permettre d'empêcher "l'effondrement" du pays, et après une polémique suivant l'installation, à la frontière sud du pays, d'une statue en hommage au général Kassem Soleimani.
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commentaires (35)
une petite precision si vous permettez ? l'Iran est un NAIN ECONOMIQUE soumis a toute sorte d'embargo, sand acces au marches de capitaux et avec des secteurs productifs en chutte libre. Saviez-vous que la viande est rationnée a Teheran ? que le prix du Kilo de tomate fut multiplié par 17 et que l'Iran a fait face a une penurie d'oignons ? En parlant d'oignons...
Lebinlon
15 h 31, le 18 février 2020