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À La Une - Liban

Sous la pluie et malgré le froid, les contestataires dans la rue contre le gouvernement Diab

Le conseil supérieur chérié sunnite estime que la déclaration ministérielle, approuvée en début de semaine par le cabinet, allait constituer "un grand défi" pour le gouvernement de Hassane Diab.

Une foule de manifestants libanais rassemblés sous la pluie à Beyrouth, rue Weygand, le 8 février 2020. Photo Blandine Lavignon

Malgré la pluie et le froid, quelques centaines de manifestants ont à nouveau marché dans les rues de Beyrouth samedi afin de scander leur rejet du gouvernement de Hassane Diab, qui doit obtenir mercredi la confiance du Parlement, alors que le Liban connait depuis plus de trois mois un mouvement de soulèvement contre la classe dirigeante, accusée de corruption et d'incompétence.

Comme lors des trois précédents week-end, les cortèges de contestataires se sont rassemblés en début de soirée dans la rue Weygand, à proximité du siège du Parlement, pour crier leur colère contre les dirigeants. 

Vers 14h, deux cortèges, sous le slogan "Pas de confiance", ont débuté une marche pacifique, l'une à partir du quartier Sanayeh, devant le siège du ministère de l'Intérieur, l'autre depuis le croisement dit de Chevrolet, à Furn el-Chebbek. Sous une pluie battante et par de basses températures, les protestataires ont scandé les slogans devenus habituels, notamment "Révolution !", ou encore "Tous sans exception", en référence à la classe politique accusée de corruption.

En chemin, les manifestants partis de Sanayeh, qui brandissaient des drapeaux libanais, énuméraient les différentes crises actuelles, notamment le rationnement du courant et les coupures d'eau, en chantant : "Réveille-toi mon peuple !"

Dans les rues entourant le siège du Parlement, des grues étaient par ailleurs en train d'installer des blocs de béton afin de fermer certains axes, venant isoler toujours plus la place de l'Etoile afin d'empêcher les contestataires d'y parvenir en prévision de la séance du vote de confiance au gouvernement, prévue mardi et mercredi.

Les deux groupes de contestataires se sont retrouvés dans la rue Weygand peu après 17h, sans incidents. Munis de parapluies, et certains de fumigènes rouges, ils se sont rassemblés devant le mur en béton érigé à l'entrée de la place de l'Etoile. 


(Lire aussi : Le gouvernement pourrait prétendre tout au plus à une confiance étriquée)


"L'Etat est pillé"

“Mardi il y aura une grande manifestation afin de faire chuter le gouvernement et ne pas lui accorder la confiance. Comme vous le voyez, ils érigent encore des murs dans le périmètre du Parlement", dénonce Farès, un manifestant interrogé par notre journaliste sur place Blandine Lavignon. "L’Etat est pillé et ils prétendent vouloir restituer les fonds pillés", ironise ce quinquagénaire.

"Ils nous ont apporté un virus corona politique et financier encore plus dangereux que le coronavirus venu de Chine", ironise un autre manifestant à Beyrouth, interrogé par la chaîne LBCI.

Un groupe de protestataires s'est ensuite dirigé dans les souks de Beyrouth où se trouvent de nombreux magasins de luxe. Ils ont scandé des slogans hostiles aux responsables politiques, notamment l'ex-Premier ministre et député Saad Hariri.

Mardi et mercredi, les députés libanais débattront de la teneur de la déclaration ministérielle approuvée jeudi par le cabinet afin d'obtenir la confiance du Parlement. Les manifestants prévoient de se rassembler près du Parlement dès 7h du matin mardi, afin de tenter de barrer la route aux députés. Des affrontements sont à craindre, et les forces de l'ordre devraient se déployer en masse et barricader les entrées du centre-ville. Plusieurs formations politiques ont annoncé au cours des derniers jours qu'ils ne voteront pas en faveur du gouvernement, notamment le Courant du Futur (de l'ancien chef de l'Exécutif Saad Hariri), les Forces libanaises (du leader chrétien Samir Geagea) et le Parti socialiste progressiste (du chef druze Walid Joumblatt). 


(Lire aussi : Lumière, lumière !l'éditorial de Issa GORAIEB)



"Un grand défi"

Sur le plan politique, le conseil supérieur chérié sunnite a estimé samedi que la déclaration ministérielle, approuvée en début de semaine par le cabinet, allait constituer "un grand défi" pour le gouvernement de Hassane Diab, soulignant que celui-ci est pressé par le temps pour sortir le pays de la crise financière et économique. La déclaration ministérielle qui va être proposée au Parlement lors de la séance de mardi et mercredi "constituera un grand défi pour le gouvernement", a souligné le conseil à l'issue d'une réunion présidée par le mufti de la République, Abdellatif Deriane. "Le temps sera le plus grand défi afin que le cabinet prouve qu'il est capable de faire renaître le Liban et de le sortir de la crise économique et financière".

Contrairement à la coutume, le nouveau Premier ministre n'a toujours pas été reçu par le mufti de la République, un signe interprété comme une désapprobation de Dar el-Fatwa à l'égard de Hassane Diab.

Pour sa part, le chef du courant des Marada, le leader maronite Sleiman Frangié, a annoncé samedi que sa formation accordera sa confiance au gouvernement Diab, tout en émettant des réserves au sujet du plan concernant le secteur de l'électricité qu'entend appliquer le nouveau cabinet. "Nous accordons la confiance au gouvernement sur base de sa représentativité politique et non pour le plan de l'électricité proposé", a écrit M. Frangié sur Twitter.


(Lire aussi : Où sont les Libanais ? Le billet de Médéa Azouri)


Le gouvernement de Hassane Diab a prévu, dans sa déclaration, de mettre en œuvre le plan de réforme du secteur de l'électricité de l'ex-ministre de l’Énergie, Nada Boustani, approuvé par le précédent gouvernement de Saad Hariri en avril dernier. La réforme de ce secteur est l’un des chantiers majeurs du gouvernement. Électricité du Liban, très gourmande en avances du Trésor, ne dispose pas de capacités suffisantes pour satisfaire la demande, ce qui oblige les Libanais à avoir recours à des générateurs privés pendant les heures de coupure du courant. Le plan de réforme préparé par Nada Boustani et que son successeur Raymond Ghajar prévoit de poursuivre comprend trois phases : une première visant à progressivement réduire les déficits, une deuxième prévoyant la construction de centrales temporaires puis définitives, et enfin une troisième consistant à augmenter les tarifs.

Le Liban traverse sa plus grave crise économique et financière depuis 30 ans, couplée à une révolte populaire sans précédent déclenchée le 17 octobre, qui avait provoqué la chute du gouvernement de Saad Hariri. Le pays connaît une importante crise de liquidités depuis plusieurs mois. En raison de cette crise, le taux de change de la livre libanaise face au dollar a grimpé en flèche auprès des changeurs. Face à cette crise, les banques du pays ont imposé une série de restrictions à leurs clients et le gouverneur de la Banque centrale, Riad Salamé, cherche à réglementer ces restrictions. Cette détérioration économique s'est également traduite ces derniers mois par des licenciements en masse.


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Malgré la pluie et le froid, quelques centaines de manifestants ont à nouveau marché dans les rues de Beyrouth samedi afin de scander leur rejet du gouvernement de Hassane Diab, qui doit obtenir mercredi la confiance du Parlement, alors que le Liban connait depuis plus de trois mois un mouvement de soulèvement contre la classe dirigeante, accusée de corruption et d'incompétence.Comme lors...

commentaires (2)

Il faudra donner une chance au nouveau gouvernement qui aura la confiance du parlement malgré toutes les manifestations .

Antoine Sabbagha

21 h 40, le 08 février 2020

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Commentaires (2)

  • Il faudra donner une chance au nouveau gouvernement qui aura la confiance du parlement malgré toutes les manifestations .

    Antoine Sabbagha

    21 h 40, le 08 février 2020

  • ET LE BORDEL DES DEUX COTES CONTINUE !

    LA LIBRE EXPRESSION

    19 h 39, le 08 février 2020

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