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Liban - Sécurité

De Beyrouth à Saïda en passant par Nabatiyé et Baalbeck, les manifestants attaqués

À Saïda, où les tentes des protestataires ont été attaquées pour la première fois, les militants veulent préserver coûte que coûte l’unité nationale.

Scènes d’émeutes dans le centre-ville de Beyrouth, dans la nuit de lundi à mardi. Photo Hassan Assal

Le Liban s’est réveillé groggy, hier matin, au lendemain d’une nuit marquée par des incidents violents dans plusieurs régions du pays, et qui ont fait craindre une discorde sunnito-chiite ainsi que des dérapages difficilement contrôlables, d’autant qu’ils intervenaient après une série de violences dont le centre-ville de Beyrouth et Jal el-Dib avaient été le théâtre au cours du week-end. Des accrochages entre les forces de l’ordre et des fauteurs de troubles parmi les partisans d’Amal et du Hezbollah ont commencé au centre-ville de Beyrouth peu avant minuit, où des actes de vandalisme ont été commis. L’attaque lancée par les partisans des deux formations chiites, qui s’en sont pris à l’armée et aux Forces de sécurité intérieure déployées sur place, a été catalysée par une vidéo circulant sur les réseaux sociaux dans laquelle un Tripolitain, Samer Sidaoui, habitant désormais en Grèce, s’en prenait à la communauté chiite et à ses leaders politiques et religieux. En dépit du fait que la famille Sidaoui a désavoué l’homme, dans un communiqué publié dans la nuit, et que des chefs religieux sunnites ont agi de même, les accrochages entre les forces de l’ordre et les vandales se sont poursuivis jusqu’à une heure tardive de la nuit.Un contestataire a affirmé à L’Orient-Le Jour que vers 23 heures, des individus, certains armés de bâtons, venus du quartier de Khandak al-Ghamik en hurlant « chiites, chiites », ont mené l’attaque. L’armée et la police anti émeute ont été la cible de jets de pierres, de bombes pyrotechniques et de cocktails Molotov de la part de plusieurs dizaines d’individus aux visages masqués. Un groupe a réussi à retourner une voiture, qu’il a incendiée. En tout, trois véhicules ont été incendiés dans la soirée. Les forces de l’ordre ont riposté par des tirs de gaz lacrymogène et mené des charges à pied pour éloigner les assaillants que le Hezbollah et le mouvement Amal ont appelés à quitter les rues. Ce n’est que vers 3h que les affrontements ont cessé.


Contagion à d’autres régions

Les échauffourées se sont étendues cependant à d’autres régions du pays, notamment à Saïda et Nabatiyé au Liban-Sud et à Baalbeck et Fakiha dans la Békaa.

À Saïda donc, comme à Beyrouth, des dizaines de jeunes, pour la moitié le visage masqué, ont tenté de s’introduire sur la place Élia où sont installées des tentes des manifestants. L’armée les a repoussés après que certains eurent pu s’introduire sur la place, endommageant quelques tentes et bousculant deux personnes qui y passaient la nuit.

L’incursion menée par ces hommes qui venaient selon certaines sources de Haret Saïda, la banlieue chiite de la grande ville du Liban-Sud, est intervenue également vers minuit. Si de telles attaques sont désormais très fréquentes à Beyrouth, c’est la première fois depuis le début du soulèvement, le 17 octobre, que des incidents de ce genre se produisaient à Saïda.

Toute la nuit durant, les responsables du mouvement de contestation à Saïda, ainsi que des responsables de l’Organisation populaire nassérienne d’Oussama Saad, ont mené des contacts avec Amal et le Hezbollah pour que les assaillants soient évacués du secteur et que le calme y revienne. Toutes les personnalités de la ville – Oussama Saad, Bahia Hariri, le mufti Salim Soussan, notamment – ont condamné ces attaques. La branche du mouvement Amal à Haret Saïda a affirmé dans un communiqué publié hier que « le mouvement et les jeunes de Haret Saïda n’ont aucun lien avec les incidents à Saïda et ses environs ». « Cela ne nous concerne ni de près ni de loin », a ajouté le texte.En réaction, des jeunes contestataires ont bloqué plusieurs routes, dans la ville, à l’aide de pneus enflammés, et appelé à la grève générale. Hier matin, les écoles de la ville étaient fermées, tandis que les militants de la « Place de la révolution du 17 octobre » étaient partagés entre la colère et la stupeur. Ils assuraient néanmoins que ces incidents ne les rendaient que plus déterminés à poursuivre leur mouvement et à préserver l’unité nationale.


(Lire aussi : ... Et des larmes, maintenant, l'éditorial de Issa GORAIEB)


« Provoquer la sédition »

De fait, sur la place Élia, des dizaines de jeunes étaient revenus dès hier après-midi, se préparant à une manifestation pour l’unité nationale dans la ville. Toutes les personnes interrogées affirmaient en chœur que ces attaques ont été orchestrées par des éléments infiltrés et qu’elles n’influeront pas sur les relations de bon voisinage entre les habitants de la ville et ses environs.

« Aucun incident ne s’est jamais produit à Saïda depuis le début de la révolution, affirmait ainsi Khaled, étudiant et militant de la première heure. Saïda est la capitale de la résistance et nous ne permettrons à personne de porter atteinte à la révolution ou la résistance. Nous resterons sur les places. Certains tentent de provoquer la sédition, mais nous ne le permettrons pas. » « Nous sommes un seul peuple, nous nous opposerons à ces tentatives de provoquer la sédition », ajoutait Samer, un autre jeune homme qui affirmait « condamner toute atteinte aux symboles religieux » et appelait à « éviter de se laisser entraîner dans ces provocations ».

Mirvat Mezher, une militante et mère de famille, a condamné la vidéo qui a mis le feu aux poudres. « Mais ce n’est pas une raison pour une réaction aussi violente, a-t-elle ajouté. Nous sommes des militants pacifiques contre la corruption et nous luttons pour édifier un nouveau Liban. C’est le pouvoir qui a recours à de tels procédés car il se sent menacé par la force de la révolution », ajoutait-elle, assurant que « ce qui s’est produit renforce la détermination des manifestants à s’opposer au confessionnalisme ».

En soirée, environ 300 personnes ont participé à la marche pour l’unité nationale, reliant la place Élia au sérail gouvernemental de la ville. Ils ont sillonné les rues intérieures de la ville, exhortant les habitants à les rejoindre.

Baalbeck

À Baalbeck, quelque 80 hommes ont également tenté dans la nuit de s’attaquer à la tente où campaient une poignée de contestataires sur la place Khalil Moutran, mais en ont été empêchés par l’armée qui protège les manifestants, a indiqué une militante à notre correspondante Sarah Abdallah. En revanche, dans le village voisin de Fakha, des inconnus ont aspergé d’essence dans la nuit la tente installée par des contestataires depuis le début du soulèvement, puis y ont mis le feu. La tente était vide, mais contenait des caisses d’aides alimentaires collectées par les militants de la région pour les distribuer aux familles dans le besoin, a indiqué à L’Orient-Le Jour Abdallah Shall, un médecin de Baalbeck qui participe activement aux protestations.

Les puissants clans de la région – notamment les Zeaïter et les Jaafar – ont appelé à un rassemblement dans l’après-midi pour « la défense de Fatima al-Zahraa », la fille du prophète Mahomet, en réaction à la vidéo de Sidaoui.

Des jeunes ont également détruit à l’aube les tentes de la contestation devant le sérail gouvernemental à Nabatiyé, mais les protestataires se sont regroupés dans la journée sur les lieux pour proclamer leur détermination à poursuivre leur mouvement, selon l’Agence nationale d’information (ANI, officielle).


Les excuses de Sidaoui

Dans la journée, Samer Sidaoui a présenté ses excuses « aux chiites, aux sunnites et à toutes les communautés que j’ai pu choquer », dans une nouvelle vidéo qu’il a publiée. « Je n’avais pas les idées claires lorsque j’ai parlé. J’avais bu. Je me suis disputé avec A.C. qui était énervé parce que j’avais insulté Nabih Berry et Hassan Nasrallah. En fait, je m’en prenais aux voyous qui étaient dans la banlieue sud de Beyrouth. En aucun cas je ne m’en suis pris à la communauté chiite. A.C. a commencé à m’insulter et à insulter ma religion et ma communauté. Je me suis alors emporté et lorsque je m’énerve je ne peux m’arrêter. Je prends des médicaments », a-t-il expliqué. « Cette vidéo lui était destinée et n’était pas censée être partagée », a-t-il encore dit.



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commentaires (7)

La seule solution est la sortie dans les rues de Millions de personnes CHAQUE JOUR.

IMB a SPO

14 h 10, le 18 décembre 2019

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Commentaires (7)

  • La seule solution est la sortie dans les rues de Millions de personnes CHAQUE JOUR.

    IMB a SPO

    14 h 10, le 18 décembre 2019

  • Citoyen ordinaire de l'ex-Suisse de l'Orient qu'était le Liban je commence par dire une lapalissade que la reconnaissance est un devoir qu'il faut rendre. L'imam Moussa Sadr, fondateur du mouvement des déshérités Amal (Espoir) a été assassiné le 31 août 1978 par les "Services" de Mouammar Kadhafi en Libye avec ses compagnons cheikh Mohamed Yacoub et le journaliste Abbas Badr-ed-Dine. Depuis cette date, ni Amal ni le Hezbollah n'ont cherché à connaître qui étaient les assassins de l'imam Sadr, l'ami de tous les Libanais. Quoique cela ne me concerne pas, je souhaiterais qu'Amal forme un bataillon de ses spadassins en chemises noires aller en Libye pour, au moins, ramener au Liban, les dépouilles de l'imam Moussa Sadr et ses deux compagnons et ce, au lieu d'en découdre avec les manifestants à Baalbeck, à Tripoli, à Nabathié, à Tyr, à Jiyé, au Ring et au Centre de Beyrouth selon les ordres de l'armée supplétive des Pasdaran au Liba,.

    Un Libanais

    13 h 40, le 18 décembre 2019

  • A chaque fois que Berry appelle au calme, c'est un message de persévérer dans les violences qu'il veut leur envoyer. Il n'y a qu'à suivre les phrases lâchées par ce dernier pour comprendre que lorsqu'il donne l'alerte à une guerre civile, ou une sédition, les violences reprennent de plus belle. il incite ses sbires à passer a l'action. C'est par message codé qu'il motive les troupes. Il faut observer la coïncidence des faits pour comprendre son comportement et les signaux qu'il donne. C'est valable pour Nasrallah. Il faut savoir décoder les messages et anticiper les actes de violence lorsque ces zaims appellent au calme. Bien sûr si les autorités en ont la volonté.

    Sissi zayyat

    13 h 28, le 18 décembre 2019

  • Les chiites se sont mis au ban de la société Libanaise de par le fait même qu'ils n'arrivent pas a se sortir de l'emprise de ces deux partis. Aujourd'hui le peuple Libanais, dans sa majorité silencieuse, a réagit... Il faut, qu'eux aussi, saisissent la chance et l’opportunité de s'affranchir de ces partis et leur imposer leur volonté pour de jours meilleures et un future Libanais. Il faut démontrer a nos concitoyens que l'Iran et le régime du Fakih sont un très mauvais exemple pour bâtir un état alors qu'une démocratie juste et bien gérée, elle, est ce qu'il y a de plus adéquat et utile pour ses fils. Il est temps de laisser de coté les susceptibilités bêtes et stupides et de dévoiler a tous avec preuves et documents a l'appui de la connivence du Hezbollah avec les ennemis du Liban a commencer par Israël en passant par l'Iran et la Syrie..., Dévoilé les mensonges sur lesquels le Hezbollah, Amal et le CPL ont construit leur empire et leur emprise sur des pans de l’économie du Liban au dépends du peuple. Il faut leur montrer comment a travers les trafics de toutes sortes ils se cachent derrière les Hariri, Bassil, Wahhab, Joumblatt etc... pour conduire le Liban vers une soumission totale au fakih. Les politiciens véreux eux partirons avec leurs milliards alors que le peuple lui sera humilié, appauvri et soumis a la vindicte d'un vieillard nazi et sans scrupules. Une fois de plus, je souhaites a ces jeunes de ne pas finir a Qoussair....

    Pierre Hadjigeorgiou

    10 h 12, le 18 décembre 2019

  • Insulter Berry et Nasrallah est, en soi, parfaitement légitime, mais pas recommandé en ces circonstances. Ceci dit, Samer Sidaoui est bien responsable, au moins en partie, de ces violences, mais aussi le A.C. qui a publié la vidéo. Au fait, on aimerait savoir combien d'arrestations ont été opérées parmi les casseurs d'Amal et du Hezbollah.

    Yves Prevost

    07 h 13, le 18 décembre 2019

  • Puisque les partis Chiites insistent qu’ils n’ont rien avoir avec ce qui se passe dans les rues, pourquoi ils n’expriment pas leur dédain et le rejet des actions de leurs partisans? Cette insistance est un couteau à double tranchant car ceci voudrait aussi dire qu’ils ne contrôlent plus leurs rues. Le citoyen Libanais fait donc face à une réalité amère qui est d'être à la merci de corpuscules armés que personne ne contrôle, ou n’arrive pas à contrôler, ou ne veut pas contrôler. Puisqu'ils sont tous contre ces dérapages, Amal et le Hezbollah devraient donner à l’armée des coudées franches, à savoir: Une fois que les voyous se dirigent vers le centre-ville, une unité de l’armée en attente bloque les routes de retour vers Khandak Al Ghamik. Elle encercle tous les partisans et les jette dans deux douzaines de camions militaires. Les discussions franches qui suivront lèveront toutes les suspicions injustifiées à l’encontre des partis Chiites. D'ici lors, tout ce qu'on peut dire est que Mr le Président, Bassil, Syed Nasrallah, et Berri ont le même motif et sont bien contents de voire ce qui se passe

    Zovighian Michel

    06 h 57, le 18 décembre 2019

  • LES MEUTES DE ZE3RAN SE SONT ACHARNES BARBAREMENT SUR LES PERSONNES ET SUR LES TENTES ET VOITURES. LEUR AVEUGLEMENT EST FANATIQUEMENT HAINEUX ET STUPIDE.

    LA LIBRE EXPRESSION

    00 h 51, le 18 décembre 2019

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