Le Hezbollah a affirmé samedi qu'il restait attaché à la candidature du Premier ministre sortant, Saad Hariri, pour former le prochain gouvernement, après la chute du cabinet de ce dernier le 29 octobre sous la pression inédite de la rue qui manifeste depuis 45 jours contre la classe politique accusée de corruption et d'incompétence.
"Nous sommes attachés à Saad Hariri pour la formation du gouvernement, au vu de sa représentativité dans la rue sunnite et du rôle qu'il joue en assumant la responsabilité de la crise actuelle", a affirmé samedi le ministre d'Etat sortant pour les Affaires du Parlement, Mahmoud Comati, dans un entretien à la radio Sawt al-Mada. "Sachant qu'à chaque fois que le processus de formation du gouvernement est lancé avant d'être aussitôt bloqué, nous ne pourrons pas fixer la date de la formation du cabinet", a également affirmé le responsable chiite. "Y a-t-il une volonté sérieuse de former le gouvernement avec à sa tête quelqu'un d'autre que Saad Hariri?", s'est demandé M. Comati.
Il a affirmé qu'il y avait "des menaces internationales contre un gouvernement monochrome. C'est pour cela que nous ne voulons pas mener le pays vers les dangers, et nous ne nions pas le fait que la présence de Saad Hariri, ou d'une personne choisie par M. Hariri, aidera le Liban, car elle sera acceptée par la communauté internationale".
Pour sa part, le chef du groupe parlementaire du Hezbollah, Mohammad Raad, a salué le fait qu'au cours du mouvement de contestation, "le peuple a exprimé son mécontentement des gouvernements précédents". "Nous sommes maintenant dans une phase d'élaboration d'un nouveau gouvernement qui devra mettre en œuvre de nouvelles méthodes pour traiter avec les lois, les gens et les intérêts de la nation", a-t-il ajouté, lors d'une rencontre politique dans la région de Nabatiyé. "Nous tenons à former un cabinet dans lequel toutes les composantes seront représentées", a souligné M. Raad.
(Lire aussi : Plus le blocage persiste, plus la position du Hezbollah se raidit)
"Décision sage"
Une des premières réalisations de la révolte populaire lancée le 17 octobre a été la démission du gouvernement de Saad Hariri, le 29 octobre. Mais depuis, le chef de l’État, le président Michel Aoun, n'a toujours pas lancé les consultations contraignantes avec les groupes parlementaires, estimant qu'une formule pour la formation du cabinet doit d'abord être trouvée.
On s’attendait à ce que le retrait de Saad Hariri et l’option du candidat Samir Khatib (proche de M. Hariri) accélèrent la tenue des consultations. Mais c’est encore une fois partie remise, faute d’entente. Selon notre correspondante à Baabda Hoda Chedid, citant des sources informées, les consultations ont été reportées à la semaine prochaine afin de donner plus de temps aux concertations, durant le week-end. Selon ces sources, tous les protagonistes ont demandé au président un délai supplémentaire et ce dernier a accepté.
Le Hezbollah refuse à ce jour de se plier aux conditions posées par le Premier ministre sortant, à savoir un gouvernement de sauvetage formé uniquement de spécialistes et doté de pouvoirs exceptionnels. Après avoir quelque peu atténué sa position et consenti, il y a deux semaines, à une formule qui lui accorderait une représentation par le biais de figures non partisanes au sein d’un gouvernement techno-politique, le parti chiite semble avoir durci le ton, en exigeant désormais rien moins que des ministres partisans.
"La politique étrangère (du Liban) ne peut être menée par un (ministre) technocrate, et certains ministères nécessitent la présence d'une logique politique à leur tête", a affirmé M. Comati. "Pourquoi Saad Hariri n'accepte-t-il pas un gouvernement techno-politique?", s'est interrogé le responsable du parti chiite. "La décision de reporter la date des consultations est sage et logique, car elle permet d'éviter les problèmes", a en outre estimé Mahmoud Comati, en soutien au président Aoun, proche allié du Hezbollah.
Commentant les tensions sécuritaires qui ont frappé le pays entre dimanche et mardi, lorsque des partisans du Hezbollah et du mouvement Amal du président du Parlement Nabih Berry ont notamment attaqué des manifestants anti-pouvoir, Mahmoud Comati s'est voulu rassurant : "Il n'y aura pas de (manifestations) de rues en face d'autres (manifestations) de rues. Chaque rue est la nôtre, et nous soutenons toutes les demandes sociales".
(Lire aussi : Face à la violence du Hezbollah, l’intifada libanaise doit garder son cap)
L'aide conditionnelle de la Ligue arabe
Dans ce contexte, le secrétaire général adjoint de la Ligue arabe, Houssam Zaki, qui a effectué en début de semaine une tournée auprès des responsables libanais, a une nouvelle fois exprimé le soutien de la Ligue au Liban, également dans un entretien à la radio Sawt al-Mada. "Le Liban ne sera pas seul, et il sera aidé en fonction de sa capacité à coopérer". Affirmant que les fonds arabes sont prêts à aider Beyrouth, M. Zaki a toutefois conditionné cela à "un gouvernement sérieux". "La formation d'un gouvernement est centrale à tous ces efforts", a-t-il insisté.
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"citant des sources informées, les consultations ont été reportées à la semaine prochaine afin de donner plus de temps aux concertations, durant le week-end. Selon ces sources, tous les protagonistes ont demandé au président un délai supplémentaire et ce dernier a accepté" Ils vont nous la faire encore longtemps celle-là ?
23 h 07, le 01 décembre 2019