
Le mufti Hassan Khaled. Photo d'archives L'OLJ
Le Liban a commémoré jeudi le 35e anniversaire de l'assassinat du mufti de la République libanaise Hassan Khaled. Le haut dignitaire sunnite, farouche opposant au régime syrien des Assad, a été tué lors d’un attentat à la voiture piégée le 16 mai 1989 à Beyrouth, dans un crime imputé par de nombreux protagonistes libanais aux renseignements syriens.
Ce jour-là, le mufti revenait d’une réunion avec le général Michel Aoun (chef du gouvernement de militaires à l'époque) durant laquelle il avait dénoncé les bombardements syriens des secteurs est et ouest de la capitale, en pleine « guerre de libération » déclenchée deux mois plus tôt par le général Aoun contre la présence militaire de Damas au pays du Cèdre. Réputé pour ses critiques à l'égard des ingérences syriennes au Liban, Hassan Khaled a, comme de nombreux autres dirigeants libanais à l'époque, payé de sa vie ses prises de position politiques.
À la recherche de l'unité nationale
Né à Beyrouth en 1921, Hassan Khaled a étudié à l'Institut Azhar de Beyrouth puis à l'université d'al-Azhar du Caire, où il a obtenu son diplôme en théologie en 1946. Après avoir enseigné dans la capitale libanaise, il est devenu juge et a occupé plusieurs postes judiciaires, notamment au tribunal chérié du Mont-Liban en 1960. Il a également exercé des fonctions importantes, telles que président du Conseil supérieur islamique chérié (plus haute instance sunnite au Liban) et vice-président de la Ligue mondiale musulmane à La Mecque.
En 1966, il est unanimement élu mufti de la République libanaise, un poste qu'il occupera jusqu'à son assassinat. Dans l'intervalle, Hassan Khaled a fondé les Assises islamiques, un groupe d'anciens Premiers ministres et de députés sunnites.
Attaque ciblée
Le 16 mai 1989, vers 13 heures, une violente explosion d'une voiture piégée secoue le quartier de Aïché Bakkar à Beyrouth, près du siège de Dar el-Fatwa, causant la mort de dix personnes et blessant 76 autres. Parmi les victimes, le mufti Hassan Khaled, son gendre, son garde du corps et son chauffeur.
Cet attentat s'inscrit dans une série d'assassinats visant des personnalités hostiles envers Damas. Deux cheikhs sunnites avaient déjà péri dans des circonstances suspectes : le cheikh Ahmad Assaf en 1982 et le cheikh Sobhi Saleh en 1986, ce dernier étant réputé pour ses appels à la réforme et à la modération.
En 1989, le général Aoun, à la tête d'un gouvernement militaire chargé d'organiser l'élection présidentielle pour désigner un successeur à Amine Gemayel dont le mandat s'est achevé un an plus tôt, mène donc une « guerre de libération » contre l'occupation syrienne. Les forces du président syrien de l'époque Hafez el-Assad répondent par des bombardements aveugles, dénoncés publiquement par le mufti Khaled. Malgré des tentatives de cessez-le-feu par la Ligue arabe dans les semaines précédent l'attentat, l'opposition de la Syrie à la présence d'observateurs arabes entrave les négociations. L'assassinat du mufti, impliqué dans ces efforts, retarde les pourparlers.
« Martyr de l'union libanaise »
Les funérailles du mufti, le 17 mai à Tarik Jdidé, rassemblent plus de 100 000 personnes de toutes les communautés, symbolisant l’ampleur de la perte d’un homme respecté. Salim Hoss, Premier ministre du gouvernement reconnu par Damas, et les Assises islamiques appellent à une grève générale de trois jours et un deuil national d'une semaine. Des dizaines de milliers de personnes, dont des leaders politiques, militaires et religieux, se rendent à Dar el-Fatwa pour présenter leurs condoléances. Sur le cercueil de Hassan Khaled, figurait l'inscription « martyr de l'union libanaise ».
Le patriarche maronite de l'époque Nasrallah Sfeir ouvre le siège de Bkerké aux personnalités chrétiennes ne pouvant se rendre à Beyrouth-Ouest pour rendre hommage au mufti. « Nous perdons en lui un ami très cher auquel nous liaient une amitié solide et un respect mutuel. Sa disparition soudaine est une grande perte nationale notamment en cette étape critique de l'histoire du Liban », affirmait alors le cardinal Sfeir.
Malgré les accusations lancées contre la Syrie, aucune inculpation officielle n'est faite dans cette affaire.
Homme de foi, et homme politique, qu’on nous rappelle s’il a prêché le sacrifice des enfants à Dieu. Pour l’assassinat de Hassan Khaled, c’est quand même étonnant que Beyrouth, sa ville, qui n’a rien d’une mégapole, engloutit tant de secrets longtemps entretenus. "Assassinat pour l’exemple" ? "Assassinat pédagogique" ? Que sais-je, mais il suffit non pas de contextualiser, ni de faire des corrélations, mais de se rappeler des "forces" qui procédaient au changement démographique da sa ville, et qu’il voyait d’une mauvaise œil. Il s’opposait à ce changement, me disait une amie qui me dit tout...
12 h 37, le 18 mai 2024