Placée devant une situation difficile où elle doit en même temps protéger les manifestations pacifiques et exécuter les ordres qu’elle reçoit de la hiérarchie politique, l’armée libanaise tente, depuis une semaine, de jouer l’équilibre.
« Le commandant de l’armée (Joseph Aoun) est aujourd’hui sous pression énorme de la part des politiques », affirme une source proche de la troupe qui a requis l’anonymat. « Pour l’heure, son seul souci est d’assurer la protection des citoyens et l’ordre public. »Appelés à garantir la sécurité et l’ordre dans la rue tout en préservant la liberté d’expression et de manifestation, un droit que garantit la Constitution, les militaires déployés en force ces derniers jours face au vaste mouvement de protestation font face à des choix délicats.Le spectacle de fraternisation qui s’est offert hier aux Libanais à Zouk Mosbeh, à Nahr el-Kalb ou à Jal el-Dib, où l’armée avait vraisemblablement reçu des consignes pour rouvrir les routes, en dit long sur le tiraillement des soldats, partagés entre leur sympathie à l’égard des citoyens avec lesquels ils se sentent solidaires et leur devoir d’exécuter les ordres de leur hiérarchie. La scène où l’on voit plusieurs soldats verser des larmes et fraterniser avec les gens reflète également l’humeur et l’état d’esprit qui animent les militaires appelés à contenir un mouvement qui incarne tout autant leurs aspirations.
« Le cœur des militaires bat fort pour les manifestants. Ils soutiennent clairement les revendications justifiées de la rue », confie un ancien officier proche du ministère de la Défense. Au terme d’un bras de fer parfois corsé qui a eu lieu entre protestataires et militaires dans ces localités, un modus vivendi a été finalement trouvé pour dégager partiellement la voie alors que le flot de citoyens ne cessait de grossir, sans toutefois que les soldats ne répriment la dynamique populaire.
C’est un peu la même stratégie à laquelle la troupe avait recouru, lundi dernier, lorsque des dizaines de motards brandissant des drapeaux du mouvement Amal et du Hezbollah ont tenté d’accéder à la place des Martyrs. Les soldats les ont fermement repoussés, en tabassant quelques-uns pour les empêcher de prendre la direction du centre-ville, sans toutefois les arrêter.
« La troupe a opté pour une position proche de celle qu’avait prise en 2005 Michel Sleiman (alors commandant en chef de l’armée) lorsqu’il avait décidé de se tenir à distance et de protéger aussi bien la manifestation de la révolution du Cèdre du 14 mars que celle du 8 mars (prosyrienne) », commente l’officier à la retraite Khalil Hélou. C’est une position similaire qu’avait affichée lors de la crise de 1958 Fouad Chéhab, chef de l’armée à l’époque, ajoute M. Hélou.
Une situation que l’on peut résumer par la réflexion formulée par Ziad Sayegh, un expert en politiques publiques, selon lequel « les tentatives d’instrumentalisation de l’armée par les politiques ont toujours échoué à travers l’histoire récente du Liban ».
(Lire aussi : Face aux manifestants, des militaires solidaires craquent)
« Enterrer la révolution »
Depuis lundi, des informations circulent sur des directives qui auraient été données par certaines parties au pouvoir pour rouvrir les voies. Dans certains milieux, on évoquait même une volonté ferme du chef de l’État, Michel Aoun, de mettre un terme au mouvement de foule, une information qui n’a toutefois pas été vérifiée. « Il faut enterrer cette révolution », aurait affirmé le président.
« Même si le président Aoun souhaite voir les mouvements de foule cesser, il ne veut surtout pas la répression par la violence des protestataires. L’effusion de sang lui serait fatale », commente pour L’OLJ un ancien militaire.
Une source proche de Yarzé contactée par L’OLJ a démenti hier que l’armée ait reçu des ordres de la part du directoire politique. « La décision de rouvrir les routes a été prise par le commandant en chef pour permettre aux hôpitaux de pouvoir fonctionner et aux boulangeries et stations d’essence notamment de s’approvisionner », a-t-elle affirmé.
Selon la source, le chef de l’armée a reçu au cours des derniers jours des centaines d’appels l’exhortant à intervenir pour faciliter la vie quotidienne de plus près de trois millions de Libanais qui ne sont pas dans la rue. Le général Aoun aurait été sollicité entre autres par les membres du corps médical qui se sont plaints de ne pas pouvoir accéder à leur lieu de travail.
« L’armée se tient à vos côtés et soutient vos demandes justes. La troupe reste engagée à protéger la liberté d’expression et de manifestation pacifique, mais rejette le blocage des routes, les pressions sur les citoyens et votre instrumentalisation au profit d’actions de vandalisme », a affirmé hier l’armée sur Twitter.
« Nous rouvrons les routes pour vous et afin de faciliter la circulation des denrées essentielles aux citoyens, notamment médicales, alimentaires et les hydrocarbures », a ajouté l’armée, précisant que les soldats sont déployés sur tout le territoire, pour accompagner et protéger les mouvements pacifiques « dans ce contexte délicat ». Elle œuvre d’arrache-pied à « éviter des frictions et des affrontements avec les citoyens », conclut le texte.
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Ceux qui nous disent comment manifester, comment etre habillé, quoi chanter et quoi crier dans les manifestations sont précisément les memes personnes dont les manifestants et surtout la jeunesse, ne veulent plus. Des gens obsoletes, sectaires, dépassé par le modernisme mondiale, misogyne (bien sur sans le savoir) et tout bonnement stupide pour decider de modeler la manifestation a l’image qu'ils se font d’une manifestations. Le liban nouveau n’a plus de place pour vous.
11 h 51, le 24 octobre 2019