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Liban - Reportage

À Zouk, les manifestants redoublent d’enthousiasme après l’intervention de la troupe

Une tentative des militaires d’ouvrir l’autoroute de Zouk de force n’a pas réussi, avant que les protestataires ne fraternisent avec les soldats.


À Jal el-Dib, la troupe fraternise avec les manifestants. Photo Hassan Assal

Le septième jour des manifestations à Zouk Mosbeh n’était pas de tout repos. La journée d’hier a commencé par une tentative des manifestants de fermer l’autoroute au niveau de Nahr el-Kalb, à quelques centaines de mètres de l’actuel barrage dressé à Zouk : une rapide intervention de l’armée a conduit à la réouverture de ce point par la force. De retour au lieu initial du sit-in à Zouk, les manifestants avaient rendez-vous avec une nouvelle confrontation avec l’armée. Déployés en grand nombre, les militaires ont réussi, dans un premier temps, à déloger les manifestants encore peu nombreux le matin, formant une barrière entre deux groupes de personnes. Cet épisode s’est déroulé sous une pluie battante : des meneurs ont houspillé les autres manifestants qui tentaient de s’abriter sous un préau. « Venez leur faire face avec nous, ce n’est pas la pluie qui va nous arrêter ! » criaient-ils.Les manifestants ont écouté cet appel. Des centaines se sont joints à eux et leur nombre a décuplé en très peu de temps. Sous la pression des protestataires, les militaires ont peu à peu reculé et la population a repris le contrôle de ce tronçon d’autoroute. « Il est inacceptable que l’armée soit ainsi mise en porte-à-faux avec les habitants sur demande de ces politiciens en qui nous n’avons plus aucune confiance », lance Céline, 22 ans, étudiante. Elle s’insurge contre un député du Kesrouan qui a traité les manifestants de « miliciens ».

La confrontation avec l’armée et la bousculade qui a suivi ont fait quelques blessés légers, dont une jeune fille en pleurs tenant son genou meurtri, et Maroun, un père de quatre enfants, qui montre son T-shirt déchiré en déclarant : « La révolution ne se fait pas qu’avec des chansons, il faut des sacrifices. » Malgré cela, les protestataires, qui insultent volontiers les politiciens, épargnent avec soin les militaires qu’ils considèrent comme faisant partie de leur mouvement. « Que Dieu vous garde, nous savons que vous êtes de cœur avec nous. » C’est par ces mots que Lama, 26 ans, s’adresse aux soldats, qui lui rendent son sourire. Avec son mari, elle s’est dirigée au lieu de ralliement à Zouk dès qu’elle a vu la confrontation à la télévision. « Nous sommes généralement le groupe de nuit », dit-elle en riant. Elle ajoute : « Ces politiciens veulent retourner l’armée contre nous tellement notre mouvement leur fait peur, ils sont pathétiques. »

La compassion envers les soldats ne s’est pas démentie toute la journée, malgré les heurts du matin. Un jeune manifestant nous assure avoir vu un officier verser des larmes du fait d’avoir dû faire face à la population. Des chansons dédiées à l’armée ont été scandées toute la journée. Détournant un slogan désormais célèbre, de jeunes manifestants criaient : « Hela Hela Ho ! C’est notre armée que nous aimons ! » Et, enfin, vers 16h, c’est sous les applaudissements et les acclamations que les militaires ont desserré l’étau autour des manifestants. En soirée, les forces spéciales de l’armée ont quitté le secteur sous les applaudissements.


(Lire aussi : Une nouvelle réalité, l'impression de Fifi ABOU DIB)


Neemat Frem hué

La journée d’hier à Zouk a également été marquée par la visite du député Neemat Frem, membre du groupe parlementaire du Liban fort (Courant patriotique libre). « Je suis l’un des vôtres ! » a lancé cet homme d’affaires et notable de Kesrouan. « Vous devez démissionner ! » lui ont rétorqué des manifestants dans une ambiance tendue, au milieu d’un déploiement massif des militaires. « Je démissionnerai s’il le faut, mais je ne vais pas annoncer ma démission ici », a lancé Neemat Frem, abondamment hué par les protestataires, avant de quitter le lieu de rassemblement.

À Jal el-Dib, le chef des Kataëb et député du Metn, Samy Gemayel, un opposant déclaré au gouvernement, est descendu aux côtés des manifestants. En fin de matinée, alors que l’armée avait, un temps, rouvert la route, les manifestants ont fini par la reprendre, leurs rangs ayant brusquement gonflé de manière considérable. Sur les lieux, un soldat, refusant de faire usage de la force contre les manifestants, a versé quelques larmes, submergé par l’émotion. Le sit-in s’est poursuivi après cela, comme durant les jours précédents, avec le même enthousiasme, jusqu’en soirée. Partout, le drapeau libanais flottait et le flux de manifestants était continu.



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