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Liban - Gouvernement

Déclaration ministérielle : les relations avec la Syrie épicent des débats globalement convenus

Les FL s’opposent aux tentatives aounistes d’élargir les prérogatives du ministre d’État pour les Affaires des réfugiés.

Saad Hariri présidant la réunion du comité de rédaction de la déclaration ministérielle. Photo Dalati et Nohra

Les discussions autour des sujets qui devraient être intégrés à la déclaration ministérielle ont été achevées hier, comme promis, par les membres de la commission de rédaction. Le texte final, dont une dernière lecture sera faite aujourd’hui par la commission, est finalement passé comme une lettre à la poste, à moins de changements de dernière minute.

C’est la question de la réhabilitation de la Syrie au sein de la Ligue arabe, que le chef du CPL, Gebran Bassil, avait défendue avec acharnement lors du dernier sommet arabe en janvier dernier, qui a finalement soulevé des passions et épicé les échanges au cours de la seconde réunion tenue par la commission hier.

Évoqué en dehors de l’ordre du jour par la ministre d’État FL au Développement administratif, May Chidiac, l’appel lancé par M. Bassil en vue de réintégrer Damas dans le giron arabe a été vivement critiqué par les représentants des Forces libanaises (May Chidiac et Camille Abousleiman) et par le ministre relevant du bloc joumblattiste, Akram Chehayeb. Ces derniers ont fait valoir que M. Bassil s’est permis d’exprimer une position personnelle qui anticipe l’esprit et la ligne politique que doit refléter la déclaration ministérielle. Ils ont également dénoncé le fait que le ministre des Affaires étrangères a outrepassé les prérogatives du Premier ministre, Saad Hariri, seul habilité à s’exprimer au nom du gouvernement sur la question de la relation avec la Syrie notamment.


(Lire aussi : Le CPL et le Hezbollah tentent d’afficher toujours un front commun)


La « résistance » et la « distanciation »
Les deux questions ultrasensibles de la distanciation du Liban par rapport aux conflits de la région et celle de la « résistance », avec son corollaire, l’arsenal du Hezbollah, ont été expédiées en un clin d’œil grâce à un compromis convenu à l’avance qui consistait à reprendre telle quelle la formulation adoptée par l’ancien gouvernement. La dernière déclaration ministérielle, adoptée par le gouvernement sortant en décembre 2016, avait abordé la question de la résistance par le biais d’une formule vague qui reprenait les termes du discours d’investiture du président Michel Aoun et la déclaration ministérielle du gouvernement précédent, présidé par Tammam Salam. « Nous n’épargnerons aucun effort ni aucune résistance afin de libérer ce qui reste de territoires libanais occupés et de protéger notre patrie d’un ennemi (Israël) qui continue de convoiter notre terre, notre eau et nos richesses naturelles », avait déclaré le chef de l’État lors de son discours d’investiture.

La volonté déclarée d’éviter les antagonismes et les tiraillements autour des dossiers litigieux susceptibles de retarder le démarrage de l’exécutif s’est également manifestée à travers un autre accommodement trouvé autour du dossier du retour des réfugiés syriens. Les membres de la commission ont finalement opté pour une reprise telle quelle de la version figurant dans l’ancienne déclaration ministérielle qui prévoit un retour « sécurisé et digne », « le respect par le Liban de toutes les conventions internationales » afférant à ce sujet et « le refus de l’intégration des réfugiés dans les sociétés d’accueil ».

À travers cette formulation, les ministres ont pu éviter l’enlisement dans la sempiternelle question de savoir si le retour devait être volontaire ou pas, un principe qui avait suscité par le passé des discussions houleuses, le retour forcé, ou incité, étant rejeté par la communauté internationale. Le texte en appelle en outre à la communauté internationale l’invitant à respecter ses engagements et partager, avec les pays d’accueil, le fardeau des réfugiés.

Une nouveauté toutefois : le texte mentionne l’initiative russe de rapatriement, saluée par le gouvernement, sans donner le mode d’emploi de l’exécution de cette initiative, restée lettre morte depuis son lancement en juillet dernier, ni comment l’exécutif compte la remettre sur les rails.

Si le paragraphe sur le retour des réfugiés n’a pas généré en lui-même des discussions houleuses, le sujet des prérogatives du ministre d’État pour les Réfugiés, par contre, n’est pas passé sans accrocs.

C’est en amont de la réunion que le ministre d’État pour les Affaires de la présidence, Salim Jreissati, avait annoncé la couleur en exprimant la volonté de son groupe politique d’accorder une « plus grande marge de manœuvre » au ministre concerné, Saleh Gharib, un druze prosyrien relevant de la quote-part du chef de l’État.

Cette proposition n’a pas manqué de susciter le courroux des ministres FL qui ont objecté avec véhémence cette idée. Selon une source ministérielle, le renforcement des prérogatives souhaité pour M. Gharib consistait notamment à lui accorder des ressources supplémentaires et à le désigner comme interlocuteur principal auprès du régime syrien pour traiter ce dossier.

« M. Gharib est venu avec un texte parallèle qui était foncièrement différent du texte d’origine, dans une tentative de le faire adopter », confie à L’OLJ la même source, qui qualifie les propositions avancées par le ministre d’ « inquiétantes ».

Mme Chidiac et M. Abousleiman ont complètement refusé d’avaliser la proposition, arguant du risque qu’un renforcement des prérogatives de ce ministère serait en conflit avec celles détenues par d’autres ministères et instances également concernés par la question des réfugiés.


(Lire aussi : L’opposition stigmatise « un gouvernement largement déséquilibré en faveur du Hezbollah »)


Des vœux pieux
Ce nouveau bras de fer sur le sujet des réfugiés n’est qu’un échantillon des tiraillements et de la surenchère que continuera de susciter cette question sensible dont le règlement ne dépend pas uniquement des desiderata des parties politiques libanaises, « dont la marge de manœuvre est réduite », comme le note le politologue Karim Bitar, mais plutôt du jeu politique international.

« Toutes les gesticulations et tous les grands discours en faveur d’un rapatriement prochain (des réfugiés) sont destinés à la seule consommation locale pour rassurer une base électorale anxieuse et ne reflètent pas un réalisme politique », commente M. Bitar qui rappelle qu’aussi bien l’ONU que la communauté internationale restent intransigeants sur le principe d’un retour dans les conditions actuelles et en amont d’un consensus politique.

Le souhait de remettre l’initiative russe sur la sellette restera par conséquent tout aussi vain tant que Moscou n’aura pas réussi à attirer les fonds nécessaires pour un rapatriement massif, ce qui est loin d’être acquis. « Le retour des réfugiés nécessitera des sommes énormes qui ne sont pas encore disponibles et que seule un règlement politique de la crise syrienne pourra débloquer », commente un proche du courant du Futur.

La concrétisation de ce retour restera également illusoire tant que le régime de Bachar el-Assad, le premier concerné, n’a toujours pas pu capitaliser sur cette carte de pression qu’il tente d’exploiter en échange d’un regain de légitimité. La reprise des relations entre Beyrouth et Damas, présentée comme un prélude ou une condition à l’accélération du retour des réfugiés, ne serait en outre que de la poudre aux yeux. « Comment expliquer sinon que la Jordanie, qui entretient de bons rapports avec son voisin syrien, n’ait pas réussi, à ce jour, à rapatrier un seul des réfugiés accueillis sur son sol ? » ironise la source précitée.


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commentaires (4)

L,EMPIETEMENT SUR LES PREROGATIVES DES AUTRES EST, COMME JE L,AVAIS DEJA DIT, UN SIGNE DE FAIBLESSE DE CEUX QUI LE PRATIQUENT ET NON UN SIGNE DE FORCE...

LA LIBRE EXPRESSION

14 h 39, le 06 février 2019

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Commentaires (4)

  • L,EMPIETEMENT SUR LES PREROGATIVES DES AUTRES EST, COMME JE L,AVAIS DEJA DIT, UN SIGNE DE FAIBLESSE DE CEUX QUI LE PRATIQUENT ET NON UN SIGNE DE FORCE...

    LA LIBRE EXPRESSION

    14 h 39, le 06 février 2019

  • il le fallait bien, qqs epices de qqs provenance qu'elles soient. car sinon meme la declaration ministerielle risquait etre de peu d'interets, vu que tous les membres du cabinet etaient deja partant sur toute la ligne. Democratie Consensuelle quoi , du pur jus libanais, a se demander comment sa Saintete a pu ne pas detailler cette trouvaille du vivre ensemble en donnant le Liban en exemple VIVANT.

    Gaby SIOUFI

    14 h 32, le 06 février 2019

  • Le cours de choses ne se passera pas au Liban comme il peut se passer ailleurs . La Jordanie est un pays aligné au camp des comploteurs occidentaux, tout comme toute la bensaoudie Qatar inclus, ces pays ne peuvent pas agir en toute liberté sans leur feu vert . Le Liban NOUVEAU s'est sorti de cette grippe, ses décisions se feront comme le décideront les majoritaires, tandis que l'opposition s'opposera. Il va nous falloir se sortir l'esprit du fait que comme par le passé, le Liban est encore pris en otage entre les mailles de ceux qui ont fait notre malheur jusqu'à ce jour . Tout a une fin , même les mauvaises choses .

    FRIK-A-FRAK

    09 h 36, le 06 février 2019

  • "Nous n’épargnerons aucun effort ni aucune résistance afin de libérer ce qui reste de territoires libanais occupés". Telle était la déclaration ministérielle du gouvernement sortant Or je n'ai jamais entendu dire qu'il ait fait la moindre démarche pour réclamer de la Syrie un traité frontalier qui légaliserait les prétentions libanaises (aussi légitimes qu'elles soient par ailleurs) sur les Fermes de Chebaa. Je doute que le nouveau gouvernement fasse plus, or c'est le seul moyen d'avoir un jour une chance de récupérer ces terres. Au fait, comment nomme-t-on celui qui, pour des raisons autres que celles invoquées, affecte des intentions qu'il ne compte pas mettre en oeuvre?

    Yves Prevost

    07 h 34, le 06 février 2019

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