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À La Une - Enquête

Khashoggi: Erdogan promet la "vérité", Riyad assure ignorer où est le corps

Mohammad ben Salmane n'était "pas informé" de l'opération, non-autorisée par le pouvoir, a affirmé Adel al-Jubeir. 


Dans un entretien à la chaîne américaine Fox News, le ministre saoudien des Affaires étrangères Adel al-Jubeir, a affirmé que Riyad ne savait pas où se trouvait le corps du journaliste saoudien Jamal Khashoggi. AFP / Angela Weiss

La Turquie va révéler "toute la vérité" sur le meurtre du journaliste saoudien Jamal Khashoggi à Istanbul, a promis dimanche son président, Riyad assurant de son côté ignorer le "détail" des circonstances de sa mort, comme l'endroit où se trouve son corps.

Au lendemain des aveux de l'Arabie Saoudite qui ont suscité une vague de scepticisme, Donald Trump allant jusqu'à dénoncer des "mensonges", le président turc Recep Tayyip Erdogan est monté au créneau. "Nous cherchons la justice ici, et toute la vérité sera révélée (...), la vérité nue", a-t-il lancé lors d'un rassemblement à Istanbul. M. Erdogan a précisé qu'il ferait une déclaration sur cette affaire mardi au parlement devant les députés de son parti AKP, au pouvoir.

Les explications de Riyad sur la mort du journaliste critique du prince héritier Mohammad ben Salmane et exilé aux Etats-Unis sont loin d'avoir convaincu les grandes capitales occidentales.

Dans un communiqué commun, Londres, Paris et Berlin ont estimé dimanche qu'il y avait "un besoin urgent de clarification" sur les circonstances de la mort "inacceptable" du journaliste, âgé de 59 ans au moment des faits, au consulat saoudien à Istanbul. Une nouvelle réaction évoquant cette fois "des mensonges" est venue du président américain Donald Trump qui, après avoir qualifié de "crédible" la version des Saoudiens, a dit que "leurs histoires partent dans tous les sens". "Il y a eu manifestement tromperie et mensonges", a-t-il déclaré dans un entretien au Washington Post, journal auquel collaborait Jamal Khashoggi.

Après sa disparition le 2 octobre, les autorités saoudiennes ont finalement admis samedi ce que tout le monde redoutait: le journaliste a bien été tué dans le consulat. C'est le procureur général Saoud al-Mojeb qui a confirmé sa mort. "Les discussions entre lui et les personnes qui l'ont reçu au consulat ont débouché sur une bagarre et sur une rixe à coups de poing, ce qui a conduit à sa mort", a-t-il dit, cité par l'agence SPA.

Signe de contradictions persistantes, le directeur d'un centre de réflexion proche du pouvoir saoudien, Ali Shihabi, a affirmé que Khashoggi était mort étouffé des suites d'un "étranglement". Dans un premier temps, les autorités saoudiennes avaient affirmé que le journaliste était ressorti vivant du consulat.

Des responsables turcs ont, eux, donné une autre version affirmant que Jamal Khashoggi avait été torturé et assassiné par une équipe de 15 agents saoudiens venus spécialement de Riyad. Selon des journaux turcs, son corps a été démembré. "Pourquoi ces quinze hommes sont-ils arrivés ici? Pourquoi dix-huit personnes ont-elles été arrêtées?", a demandé dimanche le président turc.


(Lire aussi : Khashoggi : les révélations saoudiennes visent à protéger MBS)





"Erreur monumentale"

Dans le contexte de cette affaire, Riyad a annoncé le limogeage du numéro deux du Renseignement saoudien, le général Ahmed al-Assiri, et de trois autres hauts responsables de ces services, ainsi que d'un conseiller "médias" à la cour royale, Saoud al-Qahtani. Dix-huit suspects saoudiens ont été interpellés. Mais des analystes occidentaux ont vu dans ces limogeages et arrestations une tentative de désigner des boucs émissaires et d'épargner le prince héritier, considéré comme l'homme fort du royaume.

Mohammad ben Salmane n'était "pas informé" de l'opération, non-autorisée par le pouvoir, a affirmé dimanche le ministre saoudien des Affaires étrangères Adel al-Jubeir, dans un entretien à la chaîne américaine Fox News. "Les individus qui ont fait cela l'ont fait en dehors du champ de leurs responsabilités. Une erreur monumentale a été faite, qui a été aggravée par la tentative de la cacher", a-t-il ajouté. "Nous avons découvert qu'il a été tué au consulat (saoudien à Istanbul). Nous ne savons pas comment, dans le détail. Nous ne savons pas où se trouve le corps", a-t-il encore déclaré.

Cette affaire a provoqué une onde de choc mondiale et considérablement terni l'image de Riyad. Allié des Saoudiens, le président américain est visiblement embarrassé par cette crise, avec des critiques y compris dans son propre camp républicain, mais il refuse de remettre en cause des méga-contrats, notamment militaires, avec Riyad. Insistant sur l'importance des liens "stratégique" entre Washington et Riyad, le chef de la diplomatie saoudienne a estimé que cette "relation surmontera" l'affaire Khashoggi et ses répercussions diplomatiques. Les principaux alliés de Riyad dans la région --Emirats arabes unis, Bahreïn, Egypte, Jordanie, Oman, Koweït et Autorité palestinienne--, ainsi que la Ligue arabe et l'Organisation de la coopération islamique (OCI), ont salué les annonces du royaume saoudien.


(Lire aussi : Khashoggi: qui sont les deux hauts responsables saoudiens limogés?)


Boycott

Entretemps, les enquêteurs turcs ont poursuivi leurs investigations, fouillant une vaste forêt proche d'Istanbul. Disant s'appuyer sur des enregistrements sonores, la presse turque a évoqué une décapitation de Khashoggi. Vingt-cinq nouveaux témoins ont été convoqués dimanche par les procureurs engagés dans l'enquête en Turquie, a indiqué la télévision turque NTV.

Outre une crise de crédibilité, ce scandale international a poussé au boycott, par des responsables occidentaux et des dirigeants de firmes internationales, d'une grande conférence économique, chère au prince héritier, prévue à Riyad à partir de mardi. Il a aussi alimenté des spéculations selon lesquelles le prince héritier risquait d'être délogé du pouvoir par des membres de la famille royale irrités par ses "abus".

Mais, parmi les décrets de samedi, son père, le roi Salmane, a annoncé la formation d'une commission ministérielle dirigée par le prince héritier pour réorganiser les services de renseignement, montrant ainsi son intention de le maintenir aux plus hautes fonctions à ce stade.


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commentaires (5)

Désormais, la priorité est de trouver le corps du journaliste Jamal Khashoggi, (entier ou en morceaux) car c'est son corps qui va parler, et donner toutes les Informations attendues et preuves de ce que lui est arrivé dans l'enceinte même du corps diplomatique saoudien. (La raison pour laquelle l'Arabie refuse de divulguer l'endroit où se trouve le corps (ou les morceaux) de khashoggi). Tout le reste... Le donneur d'ordre, le crime prémédité, l'exécution de la victime en groupe organisé au nom d'un état.... sont acquis... Et nul n'en doute plus. L'affaire est infiniment plus grave et destructrice pour le royaume saoudien que ce qu'ils ont l'air de croire dans les hautes sphères de l'Arabie... Vraiment c'est triste... Pour le journaliste dabord, ensuite pour le royaume .... Seul gagnant (pour le moment, car une fois cette affaire élucidée, il est possible que les grandes chancelleries s'intéressent de près au rôle de la Turquie en sous main), est la Turquie!

Sarkis Serge Tateossian

22 h 03, le 21 octobre 2018

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Commentaires (5)

  • Désormais, la priorité est de trouver le corps du journaliste Jamal Khashoggi, (entier ou en morceaux) car c'est son corps qui va parler, et donner toutes les Informations attendues et preuves de ce que lui est arrivé dans l'enceinte même du corps diplomatique saoudien. (La raison pour laquelle l'Arabie refuse de divulguer l'endroit où se trouve le corps (ou les morceaux) de khashoggi). Tout le reste... Le donneur d'ordre, le crime prémédité, l'exécution de la victime en groupe organisé au nom d'un état.... sont acquis... Et nul n'en doute plus. L'affaire est infiniment plus grave et destructrice pour le royaume saoudien que ce qu'ils ont l'air de croire dans les hautes sphères de l'Arabie... Vraiment c'est triste... Pour le journaliste dabord, ensuite pour le royaume .... Seul gagnant (pour le moment, car une fois cette affaire élucidée, il est possible que les grandes chancelleries s'intéressent de près au rôle de la Turquie en sous main), est la Turquie!

    Sarkis Serge Tateossian

    22 h 03, le 21 octobre 2018

  • C’est un gag , mais pas plus que l’assassinat de Rafic Hairir ou Chapour Bakhtiar...Les turcs ont fait mieux, ils ont enlevé Ocalan sain et sauf !

    LeRougeEtLeNoir

    20 h 49, le 21 octobre 2018

  • Si les bensaouds avouent sa mort dans le consulat en Turquie , donc où est le corps ? La différence entre le clown trump-pète et les autres c'est qu'il parle cash , il reconnaît l'abomination de cet acte innomable , mais en même temps il reconnaît que d'un point de vue bizness il est obligé de se taire . C'est rien de nouveau de ce côté ci , ça a toujours été le cas en occident , mais on ne l'avouait pas publiquement . Je le félicite pour ça , au moins . On est donc bien avertit , si un bensaoud vous gifle , ou vous découpe en morceau , trum-pète restera bouche cousue .

    FRIK-A-FRAK

    11 h 06, le 21 octobre 2018

  • LA VERITE EST UNE. UN ESCADRON DE MORT PAR ORDRE SUPERIEUR A ETE DEPECHE POUR EXECUTER LA SALE ET BARBARE BESOGNE...

    LA LIBRE EXPRESSION

    10 h 47, le 21 octobre 2018

  • Il semble reellement qu il y ait 2 poids 2 mesures en politique etrangere selon que le pays est ou non allie des USA....L assasinat de ce pauvre journaliste par l arabie saoudite provoque un tolle general et l ingerence de plusieurs pays qui demandent des explications et menacent de sanctions TANDIS QUE en SYRIE non loin de la,un dictateur sanguinaire massacre son peuple en toute impunite depuis plus de 7 ans...vraiment INADMISSIBLE....

    HABIBI FRANCAIS

    10 h 01, le 21 octobre 2018

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