Les organismes économiques, une organisation patronale dirigée par le président de la Fédération libanaise des Chambres de commerce Mohammad Choucair, ont exhorté les politiques à ne plus retarder davantage la formation du nouveau gouvernement, toujours bloqué 4 mois après les élections législatives.
Dans un communiqué publié à l’issue d’une réunion à Beyrouth, les patrons sont sortis de leur réserve pour ouvertement critiquer les responsables des différents partis, qu’ils accusent de mettre le pays en danger en privilégiant leurs « calculs personnels » au détriment de l’intérêt général. « Les partis politiques sont responsables de la détérioration de la situation économique et sociale qui a atteint un niveau alarmant », ont-ils encore martelé, accusant leurs interlocuteurs de « nuire à la réputation du pays et “d’épuiser” les Libanais en les obligeant à vivre dans l’incertitude ».
Les organismes économiques ont enfin annoncé qu’ils prévoyaient de lancer des « consultations » avec les syndicats et les organisations professionnelles afin de suivre l’évolution de la situation et de décider des mesures à prendre face à cette situation.
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La donne n’a pas changé
La mobilisation des patrons fait écho à celle des associations de commerçants, qui ont alerté à plusieurs reprises depuis juin contre la détérioration de la situation économique, alors que les rumeurs concernant les difficultés financières de plusieurs enseignes commerciales se sont succédé cette année. Une position sur laquelle s’est également alignée la Confédération générale des travailleurs du Liban (CGTL), qui a appelé dans un communiqué hier à la « fin immédiate de la politique de procrastination ». Les évêques maronites se sont joints à ces mises en garde plus tard dans la journée en sommant les représentants des partis de « faciliter la formation du gouvernement ». Le président du Parlement, Nabih Berry, a lui considéré que la situation économique était « critique », selon le site de la chaîne de télévision al-Jadid.
Si le pays est en difficulté sur le plan économique, après un premier semestre morose et plusieurs années de croissance molle, c’est surtout l’absence d’avancées après la réunion de lundi entre le président Michel Aoun et le Premier ministre désigné Saad Hariri, qui semble être à l’origine des différents appels lancés hier. « La donne n’a pas brusquement changé ces derniers jours sur le plan économique. Par contre, le secteur privé a certainement été déçu par les faux espoirs soulevés par la réunion de lundi, ce qui l’a décidé à mettre la pression sur les politiques », constate pour L’Orient-Le Jour le directeur du département recherche de la BlomInvest Bank, Marwan Mikhael. Selon lui, le contexte est plus délicat cette année parce que deux secteurs-clés, le commerce de détail et l’immobilier, sont en difficulté, le premier à cause de la baisse des dépenses de consommation, le second suite à la suspension des mécanismes de subvention des prêts au logement. « La situation n’est pas désespérée et certains secteurs, comme le tourisme, ne s’en sont pas trop mal sortis jusqu’ici malgré la conjoncture régionale, surtout après la crise de novembre 2017. Mais le pays a un besoin urgent de réformer son économie et le secteur privé ne veut plus que les politiques retardent encore ce chantier », conclut-il.
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L’économie libanaise a été pénalisée ces dernières années par les répercussions du conflit syrien et les tensions politiques internes, entre autres facteurs. Dans son dernier rapport trimestriel publié début août, Bank Audi avait estimé que l’économie réelle avait connu un premier semestre terne tout en relevant que la situation était saine au niveau monétaire et financier. Les agences de notation Moody’s et S&P se sont inquiétées de la dynamique d’endettement du Liban tout en maintenant leurs évaluations respectives de la dette souveraine du pays (à B3 et B-, avec perspective » stable »). Les performances du pays devraient enfin rester médiocres cette année, les prévisions les plus optimistes tablant sur une croissance de 2 % en 2018, tandis que la dette publique du pays a dépassé cette année la barre des 80 milliards de dollars.
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09 h 32, le 06 septembre 2018