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Moyen Orient et Monde - Nucléaire

Centrifugeuses iraniennes : Téhéran joue la carte de la pression

Téhéran annonce la mise en route d’un plan visant à augmenter sa capacité à enrichir l’uranium.

Ali Akbar Salehi, président de l’Organisation iranienne de l’énergie atomique (OIAE), assiste à un séminaire à l’Institut japonais des affaires internationales à Tokyo, au Japon, le 5 novembre 2015. Yuya Shino/Reuters

Quasiment un mois après le retrait américain de l’accord sur le nucléaire iranien (JCPOA), Téhéran a choisi de passer à la vitesse supérieure. La République islamique a fait savoir, dans une lettre adressée lundi à l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), qu’elle avait entamé les préparatifs d’un plan d’enrichissement d’uranium par une multiplication de ses centrifugeuses sur le site de Natanz, dans le centre du pays. « Une lettre a été déposée à l’AIEA hier (lundi) sur le commencement de certaines activités », a indiqué Ali Akbar Salehi, président de l’Organisation iranienne de l’énergie atomique (OIEA), cité par l’agence de presse iranienne FARS. L’AIEA a confirmé la réception de ce courrier. « Si les conditions le permettent, peut-être que demain soir (mercredi soir), à Natanz (centre), nous pourrons déclarer l’ouverture du centre de production de nouvelles centrifugeuses », a-t-il poursuivi, précisant : « Ce que nous faisons ne viole pas l’accord » conclu en 2015 à Vienne, dont les États-Unis se sont, eux, retirés le 8 mai. « Ces démarches ne veulent pas dire que les négociations (avec l’Europe) ont échoué », a souligné M. Salehi, faisant référence aux discussions entre l’Iran et l’UE, l’Allemagne, la France et la Grande-Bretagne pour tenter de sauver le texte malgré le retrait américain.

L’annonce de M. Salehi suit celle du guide suprême de la révolution iranienne, l’ayatollah Ali Khamenei. Ce dernier, dans un discours public prononcé lundi, a affirmé que « l’OIEA (avait) le devoir de se préparer rapidement » à augmenter sa capacité de production d’uranium enrichi. « L’objectif du guide suprême iranien est d’installer, à terme, une capacité d’enrichissement qui représenterait plusieurs milliers de centrifugeuses de dernière génération », affirme à L’Orient-Le Jour François Nicoullaud, ambassadeur de France en Iran de 2001 à 2005. « Ce n’est pas une menace immédiate, mais c’est plutôt une façon pour les Iraniens de dire qu’ils ne se laissent pas marcher sur les pieds, et que, si l’accord n’est pas respecté, ils n’hésiteront pas à en sortir », poursuit-il. 

Depuis le retrait des États-Unis du JCPOA, le 8 mai dernier, et la reprise des sanctions économiques contre la République islamique et les entreprises étrangères qui investiraient en Iran, la situation est plus que délicate. Les Européens se sont mis d’accord pour une tentative de contournement des sanctions américaines pour sauvegarder l’accord à tout prix. Mais l’Iran semble s’impatienter et juge les efforts des Européens « insuffisants » jusqu’à présent. Téhéran constate en effet que les grandes entreprises présentes sur son sol, telles que PSA ou encore le groupe pétrolier Total, préparent déjà leurs valises. Le sentiment d’une pression iranienne sur les Européens pour que ces derniers offrent à la République islamique des garanties économiques rapides afin qu’elle reste dans l’accord nucléaire semble donc plus que probable. « L’annonce des autorités iraniennes est interprétée comme une pression à l’encontre de l’Union européenne pour qu’elle accélère la mise en œuvre de ses promesses », a expliqué à l’AFP une source européenne.


(Lire aussi : L’AIEA invite Téhéran à se montrer plus « proactif »)


L’Europe et Israël, inquiets
Bruxelles a, pour sa part, mis en garde Téhéran hier contre cette décision et l’a appelé à respecter ses engagements vis-à-vis du JCPOA. Mais les mesures entreprises par l’Iran sont menées dans le cadre de l’accord. « L’Iran veut prendre des mesures préparatoires pour une augmentation de ses capacités d’enrichissement. Ces mesures sont d’augmenter les stocks d’uranium naturel prêt à être enrichi. Et cela n’est pas contraire à l’accord (…), il n’y a rien qui fixe une limite d’uranium naturel que l’Iran peut détenir. Donc ça démontre une grande prudence de la part des Iraniens », décrypte François Nicoullaud. « Ils n’en sont pas à sortir de l’accord et ont précisé que ce qu’ils allaient faire en respecterait les termes. C’est une sorte d’avertissement pour dire que si aucune solution n’est trouvée, ils auront tout ce qu’il faut pour enrichir au-delà des limites de l’accord. Et, à ce moment-là, l’Iran en sortira », poursuit-il. Pour être utilisé militairement, l’uranium doit être enrichi au-delà de 20 % pour atteindre 90 %. Ce qui n’est pas le cas pour le moment.

Mais si l’Iran a tenu à se montrer rassurant et garantit que ses actions se limiteraient au domaine civil, certains pays de la région ne voient pas la situation d’un bon œil. Israël, qui se voit comme la principale cible d’une potentielle attaque iranienne dans la région, n’a pas attendu longtemps pour manifester son inquiétude. À la suite des propos de l’ayatollah Khamenei, dimanche dernier, qualifiant l’État hébreu de « tumeur cancéreuse » de la région qui doit être « enlevée et éradiquée », mais aussi après la décision iranienne d’hier, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, actuellement en Europe, a réagi. Il a considéré que l’augmentation du nombre de centrifugeuses en Iran avait pour principal but de détruire Israël. « L’ayatollah Khamenei a déclaré il y a deux jours son intention de détruire l’État d’Israël. Il a expliqué lundi comment il comptait s’y prendre : en enrichissant l’uranium sans restriction pour constituer un arsenal nucléaire », a expliqué M. Netanyahu hier dans une vidéo postée sur les réseaux sociaux. « Nous ne sommes pas surpris. Nous empêcherons l’Iran de se doter d’armes nucléaires », a-t-il ajouté. 



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Quasiment un mois après le retrait américain de l’accord sur le nucléaire iranien (JCPOA), Téhéran a choisi de passer à la vitesse supérieure. La République islamique a fait savoir, dans une lettre adressée lundi à l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA), qu’elle avait entamé les préparatifs d’un plan d’enrichissement d’uranium par une multiplication de ses...

commentaires (2)

L Iran NPR ne joue pas , l'Iran NPR ne joue jamais . Ce pays est incorruptible , sûr de ses actions et possède les moyens de ses politiques de résistance. ON ne peut pas jouer avec une nation plurimillenaire avec des comportements d'esbrouffe à 2 balle le quintal . Ce sera destruction pour destruction .

FRIK-A-FRAK

11 h 30, le 06 juin 2018

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Commentaires (2)

  • L Iran NPR ne joue pas , l'Iran NPR ne joue jamais . Ce pays est incorruptible , sûr de ses actions et possède les moyens de ses politiques de résistance. ON ne peut pas jouer avec une nation plurimillenaire avec des comportements d'esbrouffe à 2 balle le quintal . Ce sera destruction pour destruction .

    FRIK-A-FRAK

    11 h 30, le 06 juin 2018

  • TEHERAN NE JOUE PAS LA CARTE DE LA PRESSION MAIS JOUE PLUTOT LA CARTE DE TRUMP EN VALIDANT CATEGORIQUEMENT SES APPREHENSIONS ET SES ACTIONS CONTRE LE REPUBLIQUE THEOCRATIQUE AUX YEUX DU MONDE !

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 03, le 06 juin 2018

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