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Liban - Décryptage

Législatives : Pour le Hezbollah, un bilan positif, malgré quelques couacs

Avant l’ouverture officielle des tractations pour la formation du nouveau gouvernement, c’est encore l’heure des bilans pour les parties politiques qui ont mené la bataille électorale. Depuis l’annonce des résultats, les médias étrangers, et en particulier occidentaux, ont immédiatement estimé que le Hezbollah est sorti vainqueur des législatives du 6 mai. Certains ont même été jusqu’à dire qu’il contrôle désormais la majorité parlementaire et, par conséquent, la plupart des institutions étatiques. Sur le plan des chiffres, le Hezbollah a certainement remporté une victoire en raflant, avec son allié le mouvement Amal, la totalité des sièges chiites du Parlement (27), alors que dans le précédent Parlement, qui avait été élu sur la base d’un mode de scrutin majoritaire, il n’en avait que 24. En soi, c’est une gageure de parvenir à augmenter ses sièges au sein de sa propre communauté, dans un mode de scrutin proportionnel. Mais c’est là toute l’intelligence du Hezbollah qui a réussi, depuis le début, à neutraliser le vote proportionnel en nouant une alliance globale, et en même temps détaillée et précise, avec le mouvement Amal. À eux deux, ils se sont partagé les candidatures et les sièges pour couper la voie aux autres personnalités et courants chiites.


Ce pari a donc été réussi, même si le candidat choisi par le duo chiite à Kesrouan-Jbeil, Hussein Zeaïter, a échoué, à cause d’ailleurs du CPL, en principe l’allié du Hezbollah, qui a refusé de le prendre sur sa liste. Certes, Amal s’est empressé de récupérer la donne en poussant le candidat élu sur la liste de Farid el-Khazen, Moustapha Hussein, à se rallier à ses rangs, ramenant à 27 la part des deux formations chiites dans le nouveau Parlement, mais avec toutefois l’avantage donné à Amal. Ce petit couac mis à part, on peut considérer que le Hezbollah a atteint ses objectifs électoraux : empêcher toute personnalité chiite en dehors des deux grandes formations d’arriver au Parlement et se doter d’un bouclier d’alliés de toutes les confessions qui lui permettrait d’avoir une présence importante dans l’hémicycle. La volonté d’avoir des députés alliés sunnites, chrétiens et même druzes était d’ailleurs la raison principale pour laquelle le Hezbollah a accepté, voire milité, en faveur du mode de scrutin proportionnel, sans lequel il n’aurait pas pu faire arriver au Parlement des personnalités comme Oussama Saad (Saïda), Abdel Rahim Mrad (Békaa-Ouest) et Fayçal Karamé (Tripoli). Selon des sources proches du Hezb, il peut désormais compter sur un total de 48 députés (dont les 27 chiites) dispersés dans plusieurs blocs qui seraient en quelque sorte dans la ligne du 8 Mars. Si on leur ajoute les 29 députés du bloc du Liban fort, on peut objectivement dire que le Hezbollah a une position confortable au Parlement.


(Lire aussi : La candidature d’Anis Nassar pour faire barrage à Ferzli)


Mais une lecture plus approfondie des résultats nuance cette affirmation. D’abord, le taux de participation faible des électeurs est un indice qui n’est pas à mettre à l’avantage du Hezbollah, surtout dans la circonscription de Baalbeck-Hermel, qui a pourtant fait l’objet dès le début d’une attention particulière de la part du parti. Son secrétaire général, Hassan Nasrallah, a mené personnellement campagne en faveur de la liste de L’espoir et la fidélité, pour pousser les électeurs à participer massivement au scrutin. Dans les milieux proches du Hezb, on s’attendait à ne laisser échapper, dans cette circonscription, qu’un seul siège, et même aucun si l’affluence des électeurs avait été massive. Or, à un certain moment de la journée du 6 mai, il y a eu une véritable crainte pour un troisième siège (qui serait chiite). Ce qui était considéré par Hassan Nasrallah comme une ligne rouge. Il a donc fallu, aux dernières heures, faire appel « aux voix dites de réserve », pour éviter que la liste rivale (formée d’une alliance entre le courant du Futur et les Forces libanaises) obtienne un siège chiite en plus du maronite et de l’un des deux sièges sunnites. 

La deuxième (mauvaise) surprise pour le Hezbollah a eu lieu à Tripoli, où la liste qu’il appuie n’a pas pu obtenir le siège alaouite de la ville. C’est donc le candidat alaouite de la liste présidée par l’ancien Premier ministre Nagib Mikati (Ali Darwiche) qui a obtenu le siège. S’il est vrai que le candidat de la liste appuyée par le Hezbollah (Ahmed Omrane) a obtenu plus de voix préférentielles que celui qui a été finalement élu, l’écart était quand même réduit, avec près de 500 voix. Ce qui montre que les alaouites de Tripoli sont désormais divisés et ne constituent plus un bloc homogène favorable au Hezbollah.


(Lire aussi : Entre Aoun et Berry, un coup de fil, un déjeuner... et une relation renouvelée, le décryptage de Scarlett Haddad)


Le troisième élément qui a égratigné le Hezbollah, ce sont les divergences électorales avec le CPL, mais aussi les divergences entre ses propres alliés, comme les Marada, le CPL et le PSNS. Aujourd’hui, tout le monde a beau affirmer que la page électorale, avec ses conflits et ses coups retors, est tournée, beaucoup de points restent à éclaircir entre les alliés et pour le Hezbollah au sein de sa propre base.
Sur le plan des chiffres, ce parti peut donc s’estimer satisfait, mais il a quand même utilisé toutes les cartes disponibles pour parvenir à ce résultat, au point que Hassan Nasrallah a clairement mis les électeurs chiites devant un choix impossible : voter pour ou contre la résistance, pour ou contre le sang des martyrs... Est-ce le signe d’une inquiétude latente au sujet de nouvelles tendances au sein de la communauté chiite ou une simple mesure préventive pour verrouiller la base, en prévision d’éventuelles opérations de séduction dont elle pourrait faire l’objet, dans le cadre de la guerre économique, politique et sociale menée contre le Hezbollah ? En principe, le Hezb a gagné le droit d’être représenté au gouvernement, puisqu’il possède un bloc parlementaire démocratiquement élu. Mais cette bataille-là ne fait que commencer...




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commentaires (8)

Merci pour cette analyse objective qui, entre les lignes, reflète l'inquiétude du Hezbollah devant un avenir incertain pour lui et ses sbires. Il est claire que cette fois, plus rien n'arrêtera la machine qui s'est mise en marche pour en finir avec tous les partis terroristes de la region, y compris le Hezbollah. Il n'y a qu'une seule voie de salut pour le pays, la remise de ses armes sans conditions à l'état, donc à l'armée. Je dis bien pour le pays car le Hezbollah a trop de sang sur les mains pour s'en sortir sans perdre des plumes. Ce sera le sacrifice a faire. Quand aux autres, il leur faudra aussi mettre un peu d'eau dans leur vin pour éviter plus de bains de sang inutiles. Il nous faut pardonner, sans oublier, juste pour commencer à voir le bout du tunnel et ne plus répéter les même erreurs du passé.

Pierre Hadjigeorgiou

15 h 10, le 21 mai 2018

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Commentaires (8)

  • Merci pour cette analyse objective qui, entre les lignes, reflète l'inquiétude du Hezbollah devant un avenir incertain pour lui et ses sbires. Il est claire que cette fois, plus rien n'arrêtera la machine qui s'est mise en marche pour en finir avec tous les partis terroristes de la region, y compris le Hezbollah. Il n'y a qu'une seule voie de salut pour le pays, la remise de ses armes sans conditions à l'état, donc à l'armée. Je dis bien pour le pays car le Hezbollah a trop de sang sur les mains pour s'en sortir sans perdre des plumes. Ce sera le sacrifice a faire. Quand aux autres, il leur faudra aussi mettre un peu d'eau dans leur vin pour éviter plus de bains de sang inutiles. Il nous faut pardonner, sans oublier, juste pour commencer à voir le bout du tunnel et ne plus répéter les même erreurs du passé.

    Pierre Hadjigeorgiou

    15 h 10, le 21 mai 2018

  • Il semble que ceux et celles atteints par le syndrome de Stockholm envers nos amis du hezb, illustre recipient des mannes iraniennes et des instructions directos divines, veulent aussi que leur maladie soit transmissible pour nous infecter de cet attachement inconditionnel au parti du kalashnikov. Les libanais semblent, heureusement, immunisés...

    Wlek Sanferlou

    14 h 31, le 21 mai 2018

  • Malgré sa puissance et son intelligence rien ne vient facilement au hezb resistant libanais. Il doit en permanence affronter, faire face à toutes les embûches que lui tendent ses ennemis locaux et internationaux sans vouloir parler des régionaux. Vous avez raison Scarlett de dire que pour la résistance Libanaise c'est un gros effort de constamment rester sur la brèche à colmater. Les plus belles victoires se font le mieux dans l'adversité. On se comprend chère Scarlett.

    FRIK-A-FRAK

    14 h 25, le 21 mai 2018

  • Ad Majorem Hezbollah Gloriam Scarlett Haddad

    Rossignol

    10 h 43, le 21 mai 2018

  • bilan positif pour le Hezbollah = bilan négatif pour le Liban Arrêtez de faire la propagande de ce parti stipendié.

    Tabet Ibrahim

    10 h 39, le 21 mai 2018

  • C,EST L,INTELLIGENCE DU HEZBOLLAH NOUS DIT LA TRES CHERE MADAME SCARLETT HADDAD DANS UN MEGA BARATIN QUI OUBLIE A DESSEIN L,EFFET DES ARMES ET SURTOUT CELUI DES INTIMIDATIONS EXERCEES SUR NOMBRE DE CANDIDATS CHIITES POUR SE RETIRER ! C,EST MADAME HADDAD BAFOUER L,INTELLIGENCE DE TOUS LES LIBANAIS ! ET JE PASSE SUR D,AUTRES BARATINS...

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 39, le 21 mai 2018

  • L'Iran commande chez nous triste oui triste....

    Soeur Yvette

    09 h 08, le 21 mai 2018

  • ...Hezbollah par ci, Hezbollah par là...tous les jours ? Franchement, n'y a-t-il pas d'autres sujets tout aussi importants pour nous, LIBNAIS, sachant que ce parti n'agit que sur ordres de l'Iran ??? Irène Saïd

    Irene Said

    08 h 23, le 21 mai 2018

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