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Liban - Interview express - législatives 2018

Misbah Ahdab : Je ne suis pas islamiste !

Ancien député de Tripoli, Misbah Ahdab est candidat aux législatives dans la circonscription de Tripoli-Minié-Denniyé.

Misbah Ahdab, ancien député et candidat aux élections législatives. Photo tirée de sa page Facebook

Quel est votre positionnement au sujet des grands dossiers politiques qui sont au centre du débat national dans le pays (armes du Hezbollah ; ligne de conduite du Hezbollah ; position au sujet du régime syrien ; attitude à l’égard des conflits régionaux ; décentralisation ; crise des réfugiés syriens…) ?
Je suis contre toutes les armes qui ne sont pas légales. Le but est de se retrouver dans un État souverain, capable d’imposer son autorité sur tout le territoire libanais. Par ailleurs, avec la mauvaise gestion des politiciens qui défendaient notre point de vue, celui du 14 Mars, on s’est retrouvé avec un Hezbollah qui, de facto, contrôle toute la structure étatique libanaise, à travers les pouvoirs législatif et exécutif. La démocratie au Liban est devenue une démocratie que l’on mesure par le nombre de fusils au lieu du nombre de votes. Ceux qui nous ont mis à l’écart après que nous avons fait notre révolution, et qui ont pris les commandes, ont fait des compromis comme s’ils avaient acheté la révolution.
Le régime syrien a tout d’abord à sa tête un dictateur. Je comprends donc qu’il y ait eu une révolution qui, de surcroît, était légitime et pacifique au début. Malheureusement, plutôt que de soutenir ces gens qui étaient la cible des tirs du dictateur, la communauté internationale a fermé les yeux sur tout un montage de structures extrémistes sunnites salafistes qui n’ont rien à voir avec la structure locale de la révolution. Plus personne ne s’intéressait ainsi à cette révolution, et il y a donc eu 600 000 tués et 6 millions de déplacés. Toute personne normale ne saurait accepter ce genre de pratiques.
Je suis pour la politique de distanciation, à condition qu’elle soit appliquée de façon équilibrée. Lorsqu’on applique cette politique vis-à-vis des conflits régionaux, nous ne pouvons pas viser un seul axe. Si quelqu’un sympathise avec la révolution syrienne, on l’associe automatiquement aux groupes extrémistes et il se trouve finalement en prison pour cause de terrorisme. D’un autre côté, on ferme les yeux sur des opérations continues menées par le Hezbollah à l’intérieur de la Syrie et couvertes par l’État libanais grâce à une décision politique.
En ce qui concerne la crise des réfugiés syriens, elle doit être sérieusement prise en considération parce que le Liban compte une population de 4 millions et il est fondé sur un certain équilibre. On ne peut pas modifier cet équilibre, d’autant qu’il y a beaucoup de non-dits dans nos relations entre les différents groupes libanais eux-mêmes. Il faut avoir une vision commune, au lieu des réactions quelque peu racistes que je trouve mal placées et qui ne présentent aucune solution au problème.

Avec quel camp ou bloc parlementaire comptez-vous coopérer au Parlement ? Envisagez-vous une coopération avec un bloc ou un camp au cas par cas, en fonction des développements ou des dossiers examinés ?
J’ai déjà siégé au Parlement et je me suis retrouvé très proche de personnalités comme Nassib Lahoud, Camille Ziadé, Nadim Salem, avec lesquels je partageais une vision commune. D’un autre côté, on peut collaborer avec d’autres groupes avec lesquels on a moins de visions communes, mais des intérêts communs sur certains dossiers. Il faut toujours essayer de trouver des possibilités et de rassembler le plus grand nombre de partenaires autour des intérêts nationaux. Si je suis élu, nous devons trouver des modus vivendi et des modus operandi qui n’existent plus maintenant parce que la représentation d’une communauté est malheureusement limitée à un seul leader politique qui en dispose à sa guise.

En dehors du champ politique, quel est le domaine que vous envisagez de privilégier dans votre action parlementaire ?
J’envisage de privilégier le côté culturel, notamment en ce qui concerne la question de l’identité. Il faut travailler notre identité, parce que le Liban n’est pas encore une nation mais un État qui a été édifié il y a cent ans. Cet État est formé de différents groupes qu’Amin Maalouf a nommés les identités meurtrières. Ce sont des groupes qui ont eu des expériences très positives à certaines époques. Il y a donc deux facettes de l’histoire, une négative et une autre positive. Au lieu de polariser les Libanais autour de groupes religieux, il faut essayer de mettre sur pied une structure nationale acceptée par tous, au lieu de trouver des moyens de valoriser les uns au détriment des autres.

La question du lecteur : en tant qu’ancien du Renouveau démocratique de Nassib Lahoud, comment vous justifiez votre rapprochement ces dernières années avec la rue sunnite de Tripoli ?
J’ai soutenu les chrétiens du Liban quand ils étaient persécutés par les services spéciaux syriens, et tout le monde se rappelle ma présence au Carlton, et c’est comme cela d’ailleurs que je me suis rapproché de Nassib Lahoud et des autres. Quand la persécution touche ma ville et les sunnites, n’ai-je plus le droit de les défendre de peur qu’on me prenne pour un islamiste ? Je ne suis pas islamiste. Je défends le citoyen libanais lorsqu’il est persécuté, qu’il soit chrétien, musulman ou de n’importe quel autre groupe. Je crois toujours dans les mêmes valeurs nationales. Et au sujet de l’amnistie générale pour les détenus islamistes, nous avons le droit de poser la question suivante : pourquoi emprisonner les jeunes gens qui ont été manipulés tout en laissant libres ceux qui sont coupables de cette manipulation. Lorsqu’on défend ces victimes, on est accusé d’être islamiste, alors que les structures manipulatrices sont protégées par des gens qui sont devenus maintenant des soi-disant modérés.



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Quel est votre positionnement au sujet des grands dossiers politiques qui sont au centre du débat national dans le pays (armes du Hezbollah ; ligne de conduite du Hezbollah ; position au sujet du régime syrien ; attitude à l’égard des conflits régionaux ; décentralisation ; crise des réfugiés syriens…) ? Je suis contre toutes les armes qui ne sont pas légales. Le but est de se...

commentaires (2)

Misbah Ahdab est une personnalité libanaise de premier plan. Ancien consul honoraire de France à Tripoli, francophone et francophile que j'admire beaucoup pour ses qualités patriotiques, rares chez des milliers d'autres. Le Liban a grand besoin d'hommes politiques comme Misbah Ahdab, honnête, propre, compétent, bonnes relations internationales, loyauté absolue envers la Patrie.

Un Libanais

18 h 56, le 17 avril 2018

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Commentaires (2)

  • Misbah Ahdab est une personnalité libanaise de premier plan. Ancien consul honoraire de France à Tripoli, francophone et francophile que j'admire beaucoup pour ses qualités patriotiques, rares chez des milliers d'autres. Le Liban a grand besoin d'hommes politiques comme Misbah Ahdab, honnête, propre, compétent, bonnes relations internationales, loyauté absolue envers la Patrie.

    Un Libanais

    18 h 56, le 17 avril 2018

  • C'est bien normal avec une aussi belle gueule et une belle voix de tenor.

    FRIK-A-FRAK

    13 h 58, le 17 avril 2018

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