En l'espace d'un mois, deux vidéos montrant l'une un chef de milice irakien, Kaïs el-Khazaali, et l'autre le commandant d'une faction chiite syrienne qui combat en Syrie aux côtés du Hezbollah, Abou Abbas, déambulant en treillis le long de la frontière sud du Liban, ont été diffusées, provoquant une vive polémique dans le pays.
La première vidéo dans laquelle le leader et fondateur de la puissante milice irakienne, Asaïb Ahl el-Haq (la ligue des vertueux), apparaît au niveau de la porte de Fatima, en compagnie de combattants du Hezbollah, tous en habits militaires, a été diffusée au lendemain de la réunion du Groupe international de soutien au Liban, qui s'était tenue le 8 décembre à Paris et au cours de laquelle Beyrouth avait été appelé à adopter une politique de distanciation à l'égard des crises de la région et mettre en application les deux résolutions 1559 et 1701 du Conseil de sécurité de l'ONU. Elle avait poussé le chef du gouvernement, Saad Hariri, à réagir sur le pouce et ordonner l'ouverture d'une enquête dont on attend toujours les résultats, par ailleurs.
La vidéo de la visite d'Abou Abbas, chef de la brigade de l'imam Bagher, a été rendue publique la semaine dernière, mais n'a pas suscité de réactions officielles – alors que les présidents de la République et du Conseil s'étaient tous deux portés garants de la mise en pratique de la politique de distanciation – au grand dam des partis qui contestent la politique du Hezbollah et son engagement militaire dans les conflits de la région.
(Pour mémoire : Après l'intrusion de l'Irakien Khazaali, la tournée du Syrien Hajj Hamza suscite de vives réactions)
De sources politiques représentées au gouvernement, on considère que les deux visites, quel que soit leur timing, constituent un défi pour le gouvernement et sont l'expression indirecte d'un refus du Hezbollah de la politique de distanciation, à laquelle la formation de Hassan Nasrallah avait pourtant adhéré. Celle-ci conteste cependant ce point de vue et explique que les messages liés aux deux visites s'adressent strictement à Israël dans la mesure où la distanciation ne s'applique pas au conflit avec « l'ennemi israélien ». « Vous avez votre politique de distanciation, nous avons la nôtre », a ainsi commenté un homme politique proche du Hezbollah.
De sources diplomatiques occidentales, on interprète la diffusion des deux vidéos, indépendamment des dates auxquelles elles ont pu avoir lieu, comme une démonstration de force et une violation flagrante de la résolution 1701. Et si l'on s'étonne de ce que le Hezbollah ait voulu sciemment fouler au pied une décision du gouvernement dont il fait partie, on fait remarquer que la formation chiite n'aurait pas agi de la sorte de sa propre initiative. L'instigateur de ce qui est aujourd'hui considéré comme un coup porté à la crédibilité de l'État, qui montre ainsi qu'il n'est pas capable de faire respecter ses résolutions et qu'il est difficile de traiter avec lui, ne peut être que l'Iran, toujours selon les mêmes sources. Téhéran reste soucieux de montrer que c'est lui qui contrôle la scène libanaise, un message qu'il a voulu adresser aussi bien au Groupe de soutien au Liban qu'au Conseil de sécurité de l'ONU qui avait insisté dans sa dernière déclaration sur le Liban, le 18 décembre dernier, sur l'application de la déclaration de Baabda – que le Hezbollah ne reconnaît plus – ainsi que des résolutions 1701 et 1559.
Plus encore, à travers ces deux vidéos de jihadistes irakiens et syriens à la frontière sud, l'Iran a aussi voulu montrer que le Liban continue de faire partie de l'axe de la résistance et qu'il reste déterminé à unifier les fronts de la résistance, toujours selon les mêmes sources. Reste à savoir si le gouvernement va pouvoir continuer de pratiquer la politique de l'autruche et feindre d'ignorer la gravité de ces violations graves de résolutions internationales. De sources ministérielles, on s'interroge sur le point de savoir si le chef du gouvernement, Saad Hariri, qui n'avait renoncé à sa démission que lorsque le gouvernement a approuvé à l'unanimité la politique de distanciation, va soulever la question lors du prochain Conseil des ministres, demain.
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18 h 40, le 03 janvier 2018