Bachar el-Assad a remercié Vladimir Poutine pour son engagement militaire lors d'une visite surprise mardi à Moscou, sa première sortie officielle du pays depuis le début de la guerre civile, tout en soulignant qu'après la guerre devra venir le temps du dialogue politique. Cette visite du président syrien, dont la venue n'a été annoncée par le Kremlin qu'une fois qu'il avait quitté la Russie pour rentrer à Damas, intervient alors que la campagne de raids aériens de l'aviation russe entre dans sa quatrième semaine.
La rencontre entre Vladimir Poutine et Bachar el-Assad sonne comme un rappel: le Kremlin est plus déterminé que jamais à soutenir son allié. Selon le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, la question d'un éventuel départ du pouvoir de Bachar el-Assad n'a d'ailleurs pas été évoquée. Souriant et visiblement détendu, le président syrien a chaleureusement remercié Vladimir Poutine pour son "aide" et pour sa décision d'intervenir militairement le 30 septembre malgré les critiques des Occidentaux. "Le terrorisme qui s'est répandu dans la région aurait gagné encore plus de terrain s'il n'y avait pas eu vos actions (militaires) et votre décision" d'intervenir en Syrie, a déclaré Bachar el-Assad, selon les images diffusées par les télévisions russes et syriennes.
Outre un entretien dans un salon du Kremlin, les deux hommes ont diné, entourés des plus hauts responsables sécuritaires russes: le ministre de la Défense Sergueï Choïgou, le chef de la diplomatie Sergueï Lavrov mais aussi le chef du Conseil de Sécurité russe Nikolaï Patrouchev et Mikhaïl Fradkov, le directeur des services de renseignement extérieurs (SVR). "A votre demande, nous avons apporté une aide précieuse au peuple syrien dans sa lutte contre le terrorisme", a déclaré M. Poutine. Les deux hommes ont également souligné en chœur qu'un "processus politique" devait succéder aux opérations militaires.
A Vladimir Poutine qui assurait que la Russie est prête "à faire tout (son) possible non seulement dans la lutte contre le terrorisme, mais aussi dans le processus politique", Bachar el-Assad a répondu que "tout acte militaire doit être suivi par des mesures politiques". Le dirigeant russe a rappelé qu'un règlement politique du conflit n'est possible qu'"avec la participation de toutes les forces politiques, ethniques et religieuses" du pays, ajoutant que le dernier mot devait "revenir au peuple syrien".
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Accord russo-américain sur les vols
Vladimir Poutine, qui avait évoqué le risque de voir les "terroristes" venir en Russie pour justifier les frappes aériennes, a répété son inquiétude de voir "au moins 4.000 combattants issus des ex-républiques soviétiques se battre contre les troupes gouvernementales syriennes".
Une délégation parlementaire russe se rendra jeudi en Syrie pour rencontrer Bachar el-Assad et plusieurs hauts responsables syriens.
Sur le terrain, des dizaines de milliers de Syriens ont été poussés à l'exode face aux offensives des forces du régime, appuyées par l'aviation russe dont plus de 500 raids ont tué en trois semaines 370 personnes, dont 243 combattants parmi lesquels 52 de l'organisation État islamique (EI). L'armée syrienne a lancé des offensives dans les provinces centrales de Homs et de Hama et dans celle d'Alep (nord), sans parvenir jusqu'à présent à prendre le dessus sur les rebelles. Selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH), 100.000 personnes fuyaient mardi l'offensive de l'armée dans les provinces de Hama, Alep et Lattaquié (ouest).
L'armée syrienne a lancé une offensive le 17 octobre au sud de la ville d'Alep, soutenue au sol par les combattants iraniens et du Hezbollah et dans les airs par les raids russes. Et ceux-ci ne vont pas s'arrêter, d'autant que Moscou a signé mardi soir un protocole d'accord avec Washington pour éviter tout incident entre leurs aviations de combat opérant séparément dans le ciel syrien. L'armée syrienne avance lentement. Selon l'OSDH, le régime a pris cinq villages dans le secteur d'Alep depuis le début de l'offensive, le quotidien al-Watan, proche du pouvoir, évoquant 16 villages et sept collines.
Depuis mars 2011, le conflit déclenché par la répression de manifestations réclamant des réformes a causé la mort de plus de 250.000 personnes. L'arrivée de la Russie dans le conflit l'a rendu plus complexe car si Moscou affirme frapper les jihadistes de l'EI et les "autres terroristes", l'opposition et les pays qui la soutiennent accusent Moscou de cibler surtout les rebelles, pour aider Bachar el-Assad.
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10 h 19, le 23 octobre 2015