L'un après l'autre, maisons traditionnelles et immeubles anciens disparaissent du paysage beyrouthin, victimes collatérales de la frénésie immobilière qui sévit dans la capitale libanaise. Pour garder une trace de ce patrimoine disparu ou en danger, l'Association pour la Protection du Patrimoine Libanais (APPL) vient de lancer une carte participative sur Internet visant à recenser les sites menacés, qu'ils soient naturels ou bâtis. L'objectif : sensibiliser les citoyens à la sauvegarde du patrimoine libanais, tout en constituant une base de données, des archives sur le sujet.
« La situation du patrimoine libanais est on ne peut plus lamentable, juge Pascale Ingea, présidente de l'association fondée en 2010. Il a en grande partie été détruit. Nous travaillons pour préserver ce qui reste. Mais le plus difficile, c'est de changer les mentalités, car tout le monde participe à la destruction du patrimoine, par ignorance souvent. C'est pour cette raison que nous cherchons à impliquer le citoyen dans la préservation des bâtiments traditionnels et des sites naturels. »
Chacun est donc invité à participer au projet en soumettant un rapport. Une photo d'un site, son emplacement, une description, un lien qui renvoie vers l'information... En quelques minutes, le tour est joué. À la manière de Wikipedia, la carte est enrichie et modifiée en permanence par les internautes en quelques clics, directement sur le site Internet, ou à travers une application pour Smartphone, Ushahidi.
Jusqu'à présent, 30 rapports ont été soumis, concernant des sites naturels – des bâtiments historiques, anciens et plus modernes, des sites archéologiques et religieux – et leur état de conservation : détruit, menacé, restauré, préservé...
« On nous signale des sites à risque, puis tout est vérifié par nos équipes », explique Pascale Ingea. Alertée, l'association peut ensuite agir. En 2013, l'APPL a par exemple présenté des recours auprès du Conseil d'État pour contester la décision de démantèlement de l'hippodrome romain de Beyrouth situé sur la parcelle 834 à Wadi Bou Jmil. Elle est aussi intervenue auprès de la municipalité de Beyrouth pour faire cesser des travaux de démolition de l'escalier Massaad ou d'un bâtiment traditionnel à Rmeil. Elle a porté plainte contre le ministère de la Culture suite à sa décision qui a entraîné la destruction de la maison Medawar (Amin Maalouf) à Badaro...
« Nous avons transmis beaucoup de dossiers aux tribunaux, précise la présidente de l'APPL. Des avocats volontaires nous aident. Au moins, nous tentons quelque chose, nous mettons des bâtons dans les roues de tous ceux qui essayent de détruire le patrimoine. »
L'association souhaite faire participer les municipalités et les encourager à poster sur la carte interactive les maisons traditionnelles, églises et mosquées situées sur leur territoire. Pascale Ingea espère provoquer un effet boule de neige, pour que le plus grand nombre soit mobilisé.
« Plus nous serons nombreux, plus notre force en matière de lobbying sera importante, et plus nous pourrons faire pression sur les parlementaires et les hommes politiques en général afin qu'ils votent des lois pour préserver le patrimoine libanais. Bien sûr, cela va prendre du temps, mais si nous ne travaillons pas, si nous baissons les bras, alors ce n'est plus la peine de rester au Liban. »
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