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À La Une - Une femme, un métier

Nay, 28 ans, assistante de projet dans une ONG internationale : « Je vis continuellement dans l’incertitude de me retrouver au chômage »

La facture de téléphone de May dépasse souvent les 150 dollars par mois car elle est la plupart du temps sur le terrain et doit communiquer avec les partenaires de l’ONG.

Qu’il soit 22 heures ou 7 heures, que ce soit le week-end ou un jour férié, Nay est continuellement accrochée à son téléphone portable et doit être en mesure de répondre à n’importe quel moment. Et pour cause, elle fait partie depuis un an et demi de l’équipe de « réponse urgente à la situation syrienne » dans une ONG internationale qui opère à partir de Beyrouth. « Pour travailler dans le domaine du développement il faut être très déterminé, accepter de sacrifier beaucoup de sa vie privé, le tout pour un salaire largement inférieur à des personnes ayant le même niveau d’études mais qui ont préféré se diriger vers le secteur privé », affirme Nay.


Car, en effet, la jeune femme a un parcours universitaire semblable à beaucoup de jeunes Libanais qui travaillent aujourd’hui dans les plus grandes entreprises mondiales à Dubaï ou à New york, pour des salaires parfois vertigineux. Après une double licence en France en économie et sociologie, la jeune femme revient au Liban et travaille pendant deux ans dans une banque et une ONG. « Ces deux expériences très différentes m’ont permis de me rendre compte que c’était vraiment le développement qui m’intéressait, raconte-elle, mais sans un master je savais que je ne pouvais pas évoluer et que je resterai longtemps sous-payée. » Nay part alors en Angleterre où elle suit des études de développement dans une grande université. Le retour au Liban ne se passe pas comme elle l’espérait. Elle a du mal à se faire embaucher, car, malgré son diplôme, les salaires qu’on lui propose restent très bas. Elle doit attendre quatre mois pour décrocher un poste de consultante d’une durée de deux mois, puis un autre d’une durée de quatre mois. « Ce sont des emplois très précaires, avec des délais impossibles à tenir, où on n’est payé qu’à la fin du contrat, en fonction des résultats fournis. »


La catastrophe liée à l’afflux massif de réfugiés syriens au Liban va lui ouvrir des portes. Elle décroche donc un poste de coordinatrice de projets dans une ONG internationale basée au Liban pour un salaire de 1 500 dollars, auquel sont ajoutés 100 dollars pour le transport et 100 dollars pour les communications téléphoniques. « Pour le même poste dans une ONG locale je toucherais entre 800 et 1 200 dollars et vu comme ça, le salaire paraît convenable, mais en réalité, les conditions salariales sont loin d’être idylliques », assure Nay. Premièrement parce que son contrat est de six mois, renouvelable selon les financements, très aléatoires, que reçoit l’ONG. « Je vis continuellement dans l’incertitude de me retrouver au chômage si mon projet n’a pas reçu les financements espérés. »

 

Autre aspect négatif qui affecte particulièrement Nay, celui de la couverture sociale. Son ONG n’inscrit pas ses employés à la Caisse nationale de Sécurité sociale (CNSS) et leur fait signer des contrats de « volontaires ». « J’ai eu de graves soucis de santé il y a quelques mois, avec beaucoup d’examens médicaux à passer, en plus d’une lourde intervention chirurgicale. » Nay a eu du mal à trouver une assurance qui veuille bien la prendre en charge avec son dossier médical. « J’ai dû souscrire à une assurance privée pour 1 300 dollars par an, qui ne me rembourse pas les consultations médicales ni la totalité des examens que je dois faire souvent. ». Sans l’aide de ses parents, Nay n’aurait jamais pu assurer tous ces frais médicaux. « Au quotidien, je vis très aisément, je ne me prive de rien et j’arrive même à mettre environ 300 dollars de côté tous les mois », explique la jeune femme qui habite chez ses parents. Elle est cependant consciente qu’elle ne pourrait pas avoir ce mode de vie si elle devait payer un loyer, assurer ses frais médicaux et fonder une famille. Ses projets d’avenir ? Comme tant d’autres de son âge, « partir à l’étranger, en quête de plus de sécurité et de stabilité ».

 

 

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