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Société - RAPPORT

Meurtre de Pascal Sleiman : quand le discours de haine s’emballe en ligne

Une étude de la Fondation Samir Kassir analyse en détail les réactions d’internautes pro-Forces libanaises et pro-Hezbollah, ainsi que la progression du discours antiréfugiés syriens.

Un portrait de Pascal Sleiman brandi lors des funérailles du cadre des Forces libanaises, le 12 avril 2024, à Jbeil. Photo Matthieu Karam

Comme d'autres incidents sécuritaires ultramédiatisés au Liban, l’enlèvement et le meurtre du cadre des Forces libanaises (FL) Pascal Sleiman a provoqué des tensions dans la rue, mais aussi une tempête sur les réseaux sociaux.

Dans un rapport de 43 pages daté du mois de mai et publié mardi, le centre SKeyes de la Fondation Samir Kassir analyse le discours haineux, la désinformation et l'incitation à la violence véhiculés par des comptes pro-Hezbollah et pro-FL, en majorité anonymes, sur le réseau X. L'étude aborde également la rhétorique antiréfugiés syriens sachant que les suspects ont été identifiés par les autorités comme étant membres d'un gang syrien.

« Sécurité nationale »

Pascal Sleiman était chef du bureau des Forces libanaises (FL) du caza de Jbeil. Il a été enlevé le 7 avril dans la localité de Kharbé par des individus armés lors du vol présumé de sa voiture. Son corps a été retrouvé en Syrie le lendemain et des suspects syriens ont été arrêtés au Liban. Le Premier juge d’instruction du Mont-Liban, Nicolas Mansour, a émis le 14 mai des mandats d'arrêt contre deux suspects détenus et interrogés. Cinq mandats d'arrêt par contumace ont été émis à l'encontre d'autres suspects ayant fui en Syrie.

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Dans un premier temps, les FL ont pointé du doigt le Hezbollah. Le parti de Hassan Nasrallah s'était, lui, défendu de toute implication dans ce meurtre. Sur internet, des comptes partisans des deux camps politiques rivaux ont échangé des accusations, de fausses informations et véhiculé un discours de haine d'une virulence qui, selon SKeyes, « menace la sécurité nationale ».

À titre d'exemple, des comptes pro-FL ont formulé des accusations contre le Hezbollah, basées sur des rumeurs suivant lesquelles Pascal Sleiman aurait été emmené dans une localité chiite de Jbeil. En face, des internautes pro-Hezbollah ont accusé les FL d’avoir mis en scène cette disparition et colporté des rumeurs diffamatoires sur la victime.

Sur 221 messages analysés et portant sur la « polarisation politique », 64,7 % contiennent des accusations contre les FL après l'enlèvement, alors que 35,3 % ciblent le Hezbollah. Sur un autre échantillon de 104 messages, 62,5 % d'entre eux contiennent de la désinformation et 20,2 % un discours de haine. Ces messages sont véhiculés à 76,92 % par des comptes anti-FL contre 19,23 par des internautes anti-Hezbollah.

Des observateurs dénoncent régulièrement l’efficacité et la virulence de « l’armée électronique » proche du Hezbollah, qui s'active sur les réseaux sociaux lorsque des polémiques visent le parti de Dieu.

Incitation antiréfugiés

Une fois que l’identité des suspects a été établie, la rhétorique antiréfugiés syriens a pris le dessus. Si le discours antiréfugiés est loin d’être nouveau sur les réseaux sociaux au Liban, cet incident a contribué à le renforcer, note SKeyes. Sur un échantillon de 88 messages antiréfugiés, 52,27 % d'entre eux réclament la déportation des Syriens, alors que 20,4 % d'entre eux considèrent leur présence comme une « menace existentielle ».

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En conclusion, le rapport de SKeyes constate que chaque incident sécuritaire majeur « tourne à la bataille virtuelle sur les réseaux sociaux, riche en désinformation, discours de haine et propagande ». « Les conséquences de l’enlèvement de Pascal Sleiman montrent clairement la dangereuse convergence entre la rhétorique virtuelle et les répercussions sur le monde réel », poursuit le texte.

Pour faire face à ces risques, le rapport préconise « une approche aux facettes multiples, qui combine interventions juridiques et mesures de réglementation » afin de tenir les auteurs de ce discours de haine responsables de leurs actes. À cette fin, le rapport appelle à des efforts concertés entre les institutions gouvernementales, la société civile, les médias et les Libanais eux-mêmes.


Retrouvez l'intégralité du rapport de SKeyes ici.

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