
Des chats et des chiens rassemblés autour de Rafic Kassem, un civil tué lors d’une frappe aérienne israélienne sur le village de Aïta el-Chaab au Liban-Sud, le 26 mai 2024. Photo fournie par le moukhtar du village
Les photos le montrant entouré de chiens et de chats qu’il nourrissait ont fait le tour des réseaux sociaux. Rafic Kassem, un civil de Aïta el-Chaab, a été tué dimanche par une frappe de drone israélienne visant cette localité du Liban-Sud. Sa mort a secoué le village et ému des internautes qui lui ont rendu hommage sur la Toile. Rafic Kassem, qui a été tué aux côtés d’un autre civil, Hussein Saleh, s’occupait des animaux errants de Aïta el-Chaab, poursuivant sa tâche sans relâche, même durant les combats entre le Hezbollah et Israël, au lendemain de l’opération Déluge d’al-Aqsa lancée par le Hamas le 7 octobre 2023.
« Martyr de l’humanité »
Sur le réseau X, Rana, une internaute, a posté une photo de Rafic Kassem en compagnie d’animaux de rue : « Martyr de l’humanité, martyr de la compassion et de la miséricorde, chaque âme de ces êtres prie pour toi, repose en paix. »
Le président de la municipalité de Aïta el-Chaab, Mohammad Srour, racontait dimanche à notre correspondant Mountasser Abdallah que Rafic Kassem était carrossier et Hussein Saleh électricien. « Ils n’ont jamais quitté le village et n’ont jamais touché une arme. Je suis vraiment triste pour eux, comme pour tous les martyrs. »
Des chats rassemblés autour de Rafic Kassem, un civil tué lors d’une frappe aérienne israélienne sur le village de Aïta el-Chaab au Liban-Sud, le 26 mai 2024. Photo fournie par le moukhtar de Aïta el-Chaab
À l’instar de la plupart des autres localités frontalières, la majorité des habitants de Aïta el-Chaab ont quitté leur village en raison des bombardements israéliens. Le moukhtar du village, Majed Tehini, également voisin du défunt, se souvient que Rafic Kassem s’occupait des chats, des chiens et des chevaux dont les propriétaires avaient fui la bourgade. « Sa famille a quitté le village, mais lui a décidé d’y rester, raconte le fonctionnaire local. Chaque matin, il distribuait de la nourriture à ces animaux qui l’accompagnaient tout le temps. »
Agriculteur, Rafic Kassem élevait du bétail, notamment des moutons, des vaches, des chèvres et des oiseaux. Un proche, qui souhaite rester anonyme, raconte à notre correspondant que la victime avait l’habitude de se procurer de la nourriture pour les animaux à partir des restes des restaurants et des abattoirs de Tyr. « Il payait parfois cette nourriture de sa propre poche », souligne ce proche. Il explique avoir conseillé à Rafic Kassem de quitter le village à plusieurs reprises, mais que ce dernier lui répondait toujours qu’il resterait parce que « les animaux sont seuls ». « Les chiens et les chats ne trouveraient personne pour les nourrir et ils vivraient dans la peur », disait-il. Selon ce proche, la victime avait échappé à la mort il y a deux mois lorsqu’un missile s’était abattu près de lui. Cette fois-ci, le sort en a voulu autrement.
Rafic Kassem avait créé un groupe WhatsApp sur lequel il envoyait régulièrement des nouvelles de son village à ses amis et ses connaissances. « Rafic Kassem et Hussein Saleh ont documenté toutes les attaques, ils étaient le symbole de la résistance des civils face à l’ennemi, ils passaient leur temps à servir les gens », écrit Hussein Srour, un étudiant, sur X.
Selon notre décompte, les bombardements israéliens ont tué 65 civils au Liban et 321 membres du Hezbollah au Liban et en Syrie depuis le 8 octobre 2023.
paix à son âme Monsieur Rafic, triste histoire, un homme humain quel dommage , Nada Tadros Lourdelle
17 h 16, le 29 mai 2024