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Lifestyle - Beirut Insight

« Beirut Sonder Stories », les histoires de Moustapha Ghabris

Ses vidéos saisissantes sur Instagram font parler les visages de parfaits inconnus qui s’abandonnent à son objectif et, en moins d’une minute, partagent des moments, des souvenirs, une tranche de vie. Émotions garanties.

« Beirut Sonder Stories », les histoires de Moustapha Ghabris

Un visuel de « Beirut Sonder Stories » sur Instagram. Capture d'écran

Moustapha Ghabris n’a pas encore trente ans, et pourtant, son (beau) regard qu’il porte sur des passants choisis au hasard révèle un œil percutant et un sens de l’humain, une qualité d’écoute qui permet des confidences sincères, celle-là même que l’on partagerait avec des amis. Pourtant, et en à peine 6 mois et quelques 37 posts, ce sont plus de 14 000 personnes qui le suivent sur son compte Instagram et attendent ces « minutes de vérité », minutes d’émotions intenses. Pour les amoureux de Beyrouth, tout comme lui, ces rencontres éphémères qu’il propose sont de véritables pépites à voir et revoir, tant elles contiennent des couches subtiles de sensibilités et d’émotions.

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Devant sa caméra, Moustapha capture l’essentiel et le résume dans un montage soigné et pudique, lui aussi touchant. Avec respect, il aborde des inconnus, un peu par instinct, et leur pose des questions qui les embarquent, les deux, dans un voyage émotionnel, une conversation intime. « Chacun dans ce monde a une histoire, une douleur, une passion et une palette d’émotions. Ces personnes qui errent, des vendeurs, une femme assise seule sur un banc, un vieux couturier, un enfant face à la mer… Tout comme moi… » C’est en lisant  The Obscure Dictionnary of Sorrow, de John Koenig que Moustapha a compris l’importance des couches de sentiments, des tonalités de peine ou de joie, communes à tous, créées par un vécu. Et c’est grâce à son parcours personnel et professionnel qu’il a senti l’importance de l’humain et perçu toutes les possibilités artistiques qui s’offraient à lui.

Moustapha Ghabris, vidéaste et conteur d'histoires intimes. Photo DR

Le pouvoir de l’image

Né en Arabie saoudite de parents libanais, il y a vécu une partie de son existence, ravi de « retrouver un jour mes racines », ravi aussi d’avoir vécu ce mélange de culture et une « diversité enrichissante qui m’a modelé et fait de moi ce que je suis aujourd’hui ». « Tout jeune, poursuit-il, j’étais nerdy, un premier de classe. » Alors évidemment, on lui rêve une carrière de grand médecin ou d’ingénieur réussi, « mais j’avais cette passion du cinéma et celle de devenir réalisateur. À 14 ans, j’avais tourné un premier court-métrage avec mon téléphone… »

Après des études de radio et télévision à la Lebanese International University (LIU), il en ressort ravi, vidéaste, graphiste et monteur accompli. Pendant les cours qu’il donne à des élèves souvent plus âgés que lui, mais surtout à des malentendants, les histoires humaines commencent à se dessiner dans sa tête. Son expérience auprès de Talpa Middle East, producteurs de The Voice, où il rencontre les candidats, écoute leur histoire et en fait un reportage, lui permet de s’épanouir dans ce sens. Avec son engagement auprès de la World Food Organisation, les histoires se précisent. En 2018, il s’éloigne un peu de sa « vocation » en travaillant en tant que graphiste pour al-Jadeed. « C’était une expérience professionnelle enrichissante, mais je déteste la routine. » Moustapha Ghabris s’en échappe et enchaîne ses déambulations dans Beyrouth et sa corniche sacrée. Les histoires se bousculent alors dans sa tête.

« Perfect strangers »

« J’aime cet endroit qui réunit une diversité de personnes d’âges, de milieux, de cultures et de profils différents », explique-t-il. Dans ce qu’il qualifie de « zone de confort », il ne craint pas d’aborder ces parfaits étrangers, de trouver leur vulnérabilité et d’en faire quelque chose de beau et de sincère. « Tous, en général, parlent d’emblée du pays et ses problèmes, je veux aller plus loin. Ressortir la faille, l’émotion. » Et il réussit si bien à le faire.

« Chacun d’entre eux m’a touché d’une certaine manière, chacun a son narratif et son expérience, uniques. J’aime les personnes âgées, dit-il. Elles ont vécu et, comme des livres ouverts, elles sont souvent plus bavardes que les plus jeunes parce qu’elles ont des choses à dire… » Dans cette galerie de portraits vivants, il y a Mariam, Ali, Ahmad, Carla, Jad, Claudette, Rafi, Maha, Roy,  oum Said, Faraj, Hind, Élie et les autres qui défilent au gré des publications sur son compte @beirutsonderstories. Des accidentés de la vie, une femme atteinte d’un cancer qu’elle a bien heureusement surmonté, une autre qui a perdu son fils dans un accident de voiture, un violoniste aveugle, un cordonnier. Aucune de ses rencontres n’a été préméditée, elles se sont faites spontanément et, comme par miracle, elles véhiculent chacune une histoire à la fois simple et extraordinaire. La plus « cliquée » et sans doute celle qu’il préfère « un peu… Je les aime toutes, comme mes enfants », c’est la vidéo et l’histoire de ce vieil homme, Georges, à la recherche de son premier amour. Avec une même identité visuelle, des images et des couleurs qui créent une atmosphère à la fois chaleureuse et tendre, Moustapha Ghabris réveille en nous la nostalgie d’une période qu’il n’a jamais connue, quelques larmes sincères et des sourires avec l’envie d’encore plus.

Moustapha Ghabris n’a pas encore trente ans, et pourtant, son (beau) regard qu’il porte sur des passants choisis au hasard révèle un œil percutant et un sens de l’humain, une qualité d’écoute qui permet des confidences sincères, celle-là même que l’on partagerait avec des amis. Pourtant, et en à peine 6 mois et quelques 37 posts, ce sont plus de 14 000 personnes qui le suivent...

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