"Nous ne participerons probablement pas à la séance du 13 octobre", a annoncé lundi soir le chef du Courant patriotique libre (CPL, aouniste) Gebran Bassil, alors que la deuxième séance du Parlement pour élire un président au Liban doit se tenir ce jeudi. Une date hautement symbolique pour le parti orange fondé par le chef de l'Etat, puisque le 13 octobre 1990, Michel Aoun avait été chassé du palais de Baabda par les troupes syriennes, à l'époque où il était chef de l'armée et Premier ministre d'un cabinet militaire.
Le chef du CPL a également estimé que "le Liban a acté sa plus grande victoire depuis 2000 (année du retrait israélien du Liban-sud)" au sujet de l'accord sur la frontière maritime avec Israël, quelques heures avant que Beyrouth et Tel Aviv ne reçoivent la version finale de cet accord négocié par les États-Unis, sous les auspices d'Amos Hochstein, chargé du dossier. Le Liban et Israël ont tous deux affirmé être sur la voie d'un accord "historique".
"C'est sûrement fait exprès"
Lors d'une interview télévisée accordée au journaliste Albert Kostanian sur la LBCI, Gebran Bassil a commenté le dossier de la présidentielle. "Nous ne participerons probablement pas à la séance du 13 octobre, parce que cette date a dû être choisie exprès. Ils l'ont probablement fixée à cette date car ils ne veulent pas de quorum pour la séance", a-t-il lancé dans une critique à Nabih Berry, le président de la Chambre qui a fixé la date de la séance. M. Berry affirme que le quorum requis pour la tenue de la séance est de 86 députés sur les 128 au total, alors que la Constitution n'évoque pas cela.
Le 13 octobre 1990, Michel Aoun avait dû quitter le palais de Baabda par la force après une offensive menée par l’armée syrienne. Il était alors commandant en chef de l'armée et avait été nommé par Amine Gemayel, président à l'époque, à la tête d’un gouvernement militaire de transition chargé d’élire le prochain chef de l’État, ce qu'il n'avait jamais fait par la suite. Une date importante pour le CPL, qui commémore "ses martyrs" à cette occasion.
"Même si le quorum est atteint, cette séance ne sera pas décisive", a poursuivi le chef du CPL. Lors de la première séance électorale du 29 septembre dernier, les élus du groupe du parti orange ont fait partie des 63 députés à avoir voté blanc alors que les partis de l'opposition, notamment les Forces libanaises, avaient choisi le député de Zghorta Michel Moawad. "Personne ne nous avait demandé de boycotter la séance du 14 septembre et pourtant nous l'avons fait", a également lancé Gebran Bassil, faisant allusion à la première séance consacrée à l'adoption du budget 2022 qui coïncidait avec les 40 ans de l'assassinat du président Bachir Gemayel. "Aujourd'hui, nous ne demandons rien à personne concernant la séance du 13 octobre, chaque groupe fera ce que bon lui semble", a poursuivi M. Bassil.
Manque de "sérieux"
Alors que les députés libanais doivent élire un président avant la fin du mandat de Michel Aoun le 31 octobre, Gebran Bassil a regretté le fait de "ne pas avoir ressenti de sérieux" autour de cette élection. "Nous avons souhaité établir une liste des priorités comme base du dialogue", a-t-il défendu, affirmant qu'il rendra visite mardi au président Michel Aoun et au patriarche maronite Béchara Raï pour leur faire part de cette liste. "La présidence et le patriarcat sont toutes deux capables de jouer un rôle de communication dans cette période", a affirmé le chef du CPL.
Sur le dossier gouvernemental, M. Bassil a estimé lundi soir que "si une vacance présidentielle a lieu, les ministres doivent prendre leurs responsabilités politiques", sans toutefois préciser ses propos. Le cabinet actuel mené par Nagib Mikati est démissionnaire et est chargé d'expédier les affaires courantes depuis mai dernier.
Frontière maritime
"Le Liban a obtenu ses revendications sur le sujet de la frontière maritime avec Israël", s'est également réjoui le chef du CPL au sujet de cet épineux dossier. "Ce qui retarde son adoption maintenant ce sont les élections législatives en Israël (prévues en novembre, ndlr). Je ne peux pas encore dire qu'une réussite a été atteinte avant la signature", a-t-il déclaré hier soir, des propos tenus quelques heures avant que la version finale de l'accord ne parvienne aux autorités des deux pays. Mardi matin, les autorités des deux pays ont affirmé que ce projet satisfait leurs demandes respectives, alors que les négociateurs des deux bords évoquaient la possibilité de la conclusion d'un accord "historique".
"Sous le mandat de Michel Aoun, le Liban a acté sa plus grande victoire depuis l'année 2000 dans le recouvrement de ses droits", a affirmé M. Bassil. "Cet exploit est politique, souverain mais aussi économique et financier. C'est là la Résistance économique requise pour nous libérer de notre contrainte financière", a-t-il déclaré en employant le terme de "Résistance" utilisé par son allié chiite, le Hezbollah, pour s'auto-désigner. "Vivement la victoire sur la corruption interne, car c'est la libération la plus importante", a lancé Gebran Bassil.
Visites à Bkerké et Baabda
Mardi, M. Bassil s'est rendu à Bkerké, où il s'est entretenu avec le patriarche Raï, comme il l'avait annoncé dans son entretien de la veille au soir. "Notre priorité est l'élection d'un nouveau président", a-t-il affirmé devant la presse à sa sortie. "Notre initiative permet de discuter de plusieurs noms (...)", a encore estimé le chef du CPL. Il a en outre indiqué que son parti allait former une délégation pour se réunir "avec les différents pôles".
Plus tard dans la journée de mardi, à l'issue d'une réunion à Baabda avec le président Michel Aoun, fondateur du CPL et son beau-père, M. Bassil a indiqué que, selon lui, l'accord sur la frontière maritime est un "accomplissement" qui a été rendu possible grâce "au chemin emprunté par le mandat de Michel Aoun".
commentaires (18)
On s en sacre…!!
Robert Moumdjian
04 h 38, le 12 octobre 2022