
"La Ligne 29 est une ligne rouge" peut-on lire sur cette bannière brandie par des manifestants à Nakoura, dans le sud du Liban, le 11 juin 2022. Photo REUTERS/Aziz Taher
Quelques centaines de Libanais et plusieurs députés dits "du changement" ont manifesté samedi à Nakoura, dans le sud du Liban, afin d'appeler les autorités à amender le décret 6433/2011 sur le tracé de la frontière maritime, afin de revendiquer les droits du pays sur une zone économique exclusive plus large et délimitée par la Ligne 29, et de protester contre l'extraction du gaz par Israël sur le champ de Karish.
Ce sit-in est organisé alors que le litige frontalier avec Israël s'est réinvité dans l'arène politique, suite à l'arrivée dimanche dernier d'une unité flottante d'exploitation gazière au large de l’État hébreu. Cette plateforme doit extraire le gaz du champ de Karish qui se trouverait en zone disputée entre Beyrouth et Tel-Aviv, si le Liban officialise les revendications maximalistes d'experts basées sur la Ligne 29.
Sur place, des protestataires tenaient une grande bannière sur laquelle on pouvait lire que "La Ligne 29 est une ligne rouge" tandis que d'autres agitaient des drapeaux libanais, palestiniens ou du Parti communiste libanais.
La Ligne 29 est "légitime"
Au cours de cette manifestation, les députés issus du mouvement de contestation du 17 octobre 2019 ont prononcé un discours dans lequel ils ont souligné que cette Ligne est "légitime et fixée dans des documents et textes de loi" et qu'ils n'accepteront jamais que les droits du Liban sur ses ressources maritimes "qui sont la propriété de tous les citoyens" ne soient compromis. "Nous réclamons une nouvelle fois au chef de l’État (Michel Aoun) et au Premier ministre (sortant, Nagib Mikati) de prendre immédiatement l'initiative d'amender le décret 6433/2011" afin de préserver les "droits souverains" du Liban, a encore appelé le député Firas Hamdane au nom de son groupe parlementaire, selon un texte publié par l'ex-bâtonnier de Beyrouth Melhem Khalaf (Beyrouth II) sur son compte Twitter. Leur collègue Halimé Kaakour était également présente à ce sit-in.
La revendication maximaliste des négociateurs libanais dans les pourparlers indirects avec Israël, réclamée par des experts civils et militaires, avait été initialement portée par Michel Aoun. Cette revendication fait état d'un droit supplémentaire en faveur du Liban sur 1.430 km2 limités par la Ligne 29. Celle-ci coupe en deux le champ de Karish, alors que les négociations se basaient jusqu'à leur interruption sur une zone de 860 km2 délimitée par ce qui a été appelé Ligne 23, telle que cela apparaît dans les revendications officielles du Liban enregistrées auprès de l'ONU, sur base du décret 6433. Toutefois, le chef de l’État n'a jamais signé l'amendement de ce décret et Beyrouth s'est contenté d’adresser une lettre officielle à l'ONU rappelant que le champ gazier de Karish se trouve dans une zone contestée, tout en soulignant son "attachement au respect de ses droits sur ses ressources offshore".
Les députés du "changement" ont réclamé d'être mis au courant de toute "négociation" qui aurait lieu pour justifier l'abandon éventuel de la Ligne 29, alors que certains estiment que la non-signature de l'amendement du décret 6433 pourrait être liée à un marché avec les Américains en échange d'une levée des sanctions frappant le gendre du président, Gebran Bassil. Les treize membres du Parlement issus du soulèvement populaire avaient tenu lundi une conférence de presse au cours de laquelle ils s'étaient déjà ouvertement prononcés en faveur de la consécration officielle de la Ligne 29, dans l’objectif d’empêcher Israël d’avancer dans la zone contestée et de protéger les droits du Liban.
En début de journée, Michel Aoun et Nagib Mikati s'étaient réunis à Baabda afin de se mettre d'accord sur la position officielle du Liban sur cette question, sans toutefois en annoncer les détails, avant une visite du médiateur américain Amos Hochstein, qui parraine les négociations indirectes avec l’État hébreu.
""Nous réclamons une nouvelle fois au président et au Premier ministre de prendre immédiatement l'initiative d'amender le décret 6433/2011" afin de préserver les "droits souverains" du Liban,". Lisez bien: 6433/2011! Durant onze an, personne n'a parlé de l'amendement de ce décret, et maintenant tout le monde devient "maximaliste", y compris les "illuminati" de la "thaoura"...
11 h 03, le 13 juin 2022