AFP / ANWAR AMRO
Le secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, a affirmé dimanche que le nouvel objectif de l'axe de la résistance était la présence militaire américaine au Moyen-Orient, deux jours après l'assassinat du puissant général iranien Kassem Soleimani, commandant de la force d’élite al-Qods, tué dans la nuit de jeudi à vendredi dans un bombardement sur l'aéroport de Bagdad sur ordre du président américain Donald Trump. Cette attaque a également tué Abou Mehdi al-Mouhandis, l'homme de l'Iran en Irak et numéro deux du Hachd al-Chaabi, une coalition de paramilitaires pro-iraniens intégrés aux forces de sécurité irakiennes.
"L'armée américaine les a tués et elle en paiera le prix. Le juste châtiment après l'assassinat du général Soleimani visera la présence militaire américaine, bases, soldats et équipements, dans notre région et dans nos terres", a déclaré le leader du parti chiite dans un discours télévisé à l'occasion d'une cérémonie en hommage au général iranien dans la banlieue sud de Beyrouth, saluant le martyre de l'architecte de la stratégie iranienne au Moyen-Orient.
Vendredi, Hassan Nasrallah avait déjà promis un "juste châtiment" aux "assassins criminels" responsables de la mort de Kassem Soleimani. "Apporter le juste châtiment aux assassins criminels (...) sera la responsabilité et la tâche de tous les résistants et combattants à travers le monde entier", avait affirmé le chef du Hezbollah.
"Lorsqu'il verra les cercueils des soldats américains être rapatriés, le président US et son administration sauront qu'ils ont perdu la région et perdront les prochaines élections présidentielles américaines", a-t-il ajouté, appelant par ailleurs à ne se pas s'en prendre aux civils américains "car ceci serait dans l'intérêt de Donald Trump".
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Nouvelle phase
Depuis l'assassinat du général Soleimani et d'Abou Mehdi al-Mouhandis, le monde entier redoute la déflagration. D'un côté Téhéran crie "vengeance" et menace d'une réponse "militaire", de l'autre le président Trump menace de détruire 52 sites iraniens, autant que le nombre d'Américains retenus en otage pendant plus d'un an à l'intérieur de l'ambassade américaine à Téhéran en 1979.
"Il semble que la région entre dans une nouvelle configuration. Le martyre de Soleimani ne doit pas nous affaiblir, mais nous permettre de poursuivre les objectifs qu'il s'était fixés" a lancé Hassan Nasrallah d'un ton martial, dont le discours a été régulièrement interrompu par les slogans de ses partisans, qui scandaient notamment "Mort à l'Amérique".
"Le jour de l'assassinat de Soleimani est le début d'une nouvelle phase et d'une nouvelle histoire pour l'ensemble de la région. C'est le début d'une guerre américaine d'un nouveau type dans la région, a-t-il affirmé, indiquant que Kassem Soleimani s'était entretenu avec lui à Beyrouth la veille de sa mort.
L'Iran a directement participé à la création du Hezbollah et l'alliance se maintient depuis des décennies. Le Hezbollah a des combattants déployés en Syrie pour soutenir avec les forces iraniennes le pouvoir de Bachar el-Assad.
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"Un crime commis aux yeux de tous"
Le chef du Hezbollah a assuré qu'il avait reçu mercredi une visite du général Soleimani, deux jours avant son décès. "Jeudi soir, Kassem Soleimani a quitté l'aéroport de Damas pour l'aéroport de Bagdad où il a été reçu par Abou Mehdi al-Mouhandis et d'autres compagnons, avant que le convoi qui les transportait a été attaqué par des appareils américains qui ont tiré des missiles intelligents", a rappelé Hassan Nasrallah, soulignant que le général iranien avait échappé à plusieurs tentatives d'assassinat.
"Nous sommes face à un crime commis aux yeux de tous et ordonné par Donald Trump", a ajouté le leader du Hezbollah, insistant sur le fait que cet assassinat intervient "quelques mois avant les prochaines élections américaines" et soulignant par ailleurs qu'Israël "considérait Kassem Soleimani comme la plus grande menace depuis sa création".
"En revendiquant publiquement cette opération, les Américains tentent d'affaiblir l'Irak, les forces de la Résistance et l'Iran. La première riposte de la résistance est de rester attaché à la cause, car nous sentons que nous sommes proches d'une grande et historique victoire dans la région (...) "Les Irakiens et les dignes résistants que je connais ne permettront pas que les soldats américains restent en Irak. L'Irak doit se libérer de l'occupation américaine", a-t-il lancé, ajoutant que "la lutte doit se poursuivre jusqu'à la victoire en Syrie et au Yémen".Le Hezbollah utilise généralement le terme de "résistance" pour désigner le mouvement et ses alliés, Iran et Syrie en tête, dans leur lutte contre Israël et la présence militaire des États-Unis dans la région, qu'il dénonce comme une puissance impérialiste.
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"Une succession d'échecs"
"Le mandat de Trump est une succession d'échecs, surtout dans la région", a estimé le chef du parti chiite, évoquant les "échecs" de Washington en Syrie, au Yémen, en Palestine, en Afghanistan, s'arrêtant également sur le Liban. "Les États-Unis n'ont cessé de faire pression sur le Liban et ses responsables. "Lors de la dernière visite de David Satterfield (diplomate américain qui a fait la navette entre le Liban et Israël jusqu'il y a quatre mois pour trouver un accord sur une démarcation de leurs frontières terrestre et maritime), ce dernier a menacé de bombarder les installations du Hezbollah. Nous avions alors répondu que nous riposterions si cela devait arriver", a-t-il souligné.
Sur le dossier irakien, "le véritable projet de Trump est de prendre le contrôle de la manne pétrolière, d'affaiblir l’État et de permettre à Daech de perdurer, contrairement à ce que Soleimani et Abou Mehdi voulaient", a estimé Hassan Nasrallah, ajoutant que "les États-Unis reprochent également au gouvernement de Abdel Mehdi d'avoir conclu des milliards de dollars de contrats avec la Chine". "Dernièrement, les Américains ont tenté d'entraîner le peuple irakien vers la sédition, mais ce projet a échoué", a-t-il lancé avant d'ajouter : "Notre demande, notre espoir, ce qu'on attend de nos frères au Parlement irakien, c'est (...) d'adopter une loi réclamant le départ des forces américaines d'Irak".
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"Hussein des temps modernes"
De son côté, le numéro deux du Hezbollah, le cheikh Naïm Kassem, a affirmé depuis Téhéran que les États-unis avaient commis "une folie" en tuant le puissant général iranien. "Soleimani était en faveur de tout le monde musulman, de tous les hommes libres et de toutes les résistances contre l'occupation et l'arrogance", a affirmé le cheikh Kassem, venu présenter ses condoléances à la famille de Kassem Soleimani, en tant que représentant du chef du Hezbollah. "L'ennemi va découvrir qu'en assassinant (Kassem Soleimani), il a créé une grande force. Nous serons encore plus forts, si Dieu le veut, et l'Amérique va découvrir qu'elle a commis une folie et que ses calculs visant à changer l'équation sont de faux calculs", a ajouté le dignitaire chiite. "En tant que Hezbollah, nous avons désormais davantage de responsabilités, et nous continuerons de la sorte, en tout honneur et en toute honnêteté", a-t-il conclu.
Des milliers de partisans du Hezbollah s'étaient rassemblés dans le complexe des Martyrs, dans la banlieue sud, à l'occasion de la cérémonie en hommage à Kassem Soleimani. "Il représentait l’homme juste et honnête qui aime la paix et qui est contre l'injustice", a affirmé un homme d'une cinquantaine d'années à notre journaliste sur place Zeina Antonios. "Il se rendait partout où il y avait de l’injustice. C'est le Hussein des temps modernes", a-t-il ajouté, en référence au petit-fils du prophète Mahomet, précurseur du chiisme. "Je le considérais comme mon père. J’ai des photos de lui partout chez moi”, explique Sajida, 19 ans, les larmes aux yeux et la voix tremblante. "Trump pense qu’il défend les Etats-Unis, mais il est en train de détruire son pays et ses armées déployées dans la région. Le drapeau américain va brûler", prévient Haïdar, âgé de 19 ans.
Photo Zeina Antonios
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commentaires (9)
La seule phrase importante dans ce discours et de ne pas s'en prendre au civils américains, ce qui revient à dire qu'il vaut mieux ne pas envoyer les soldats américains d'Italie pour protéger leurs ambassade au Liban comme il a été diffusé dans la presse. A signaler que chaque peuple a un droit légitime de chasser une armée étrangère de son territoire. Le test sera plutôt en Irak, pas au Liban, si les chiites se mobilisent plus contre les américains ou contre leur propre gouvernement.
Shou fi
22 h 06, le 05 janvier 2020