Le chef du Courant patriotique libre, Gerban Bassil, saluant ses partisans lors d'un rassemblement du CPL, le 3 novembre 2019 à Baabda. AFP / ANWAR AMRO
L'avocat Marwan Salam a déposé vendredi une note d'information contre le ministre sortant des Affaires étrangères et chef du Courant patriotique libre, Gebran Bassil, une des cibles privilégiées du mouvement de contestation contre la classe dirigeante, entré aujourd'hui dans son 23ème jour. La note, qui se base sur un article publié en janvier par le quotidien Ad-Diyar, porte sur des détournements de fonds publics, blanchiment d'argent et enrichissement illicite présumés, notamment dans le dossier de l'électricité.
"Merci à celui qui a déposé une note contre moi auprès de la justice", a réagi M. Bassil sur son compte Twitter, se défendant des accusations. "La teneur des informations est fausse, et les preuves se basent comme d'habitude sur un article fabriqué", a-t-il ajouté. "Les mêmes accusations sans preuve ont été formulées dans le passé. J'ai déposé plainte contre ceux qui les avaient lancées, et j'ai obtenu gain de cause. Ce sera une nouvelle occasion de faire apparaître la vérité, mettre fin aux rumeurs et à la diffamation", a-t-il conclu.
L'avocat de M. Bassil, Majed Boueiz, a lui aussi défendu son client contre les accusations qui le visent, affirmant que "la note d'information (contre le chef du CPL) est mensongère et concerne des soi-disant crimes qui sont infondés". Il a rappelé que les allégations contre M. Bassil sur lesquelles se basent la note d'information ont "déjà fait l'objet de plainte en justice". Me Boueiz a enfin affirmé qu'"il est clair que cette note d'information ainsi que d'autres notes mensongères s'inscrivent dans le cadre d'une campagne de diffamation qui vise M. Bassil pour des raisons qui sont désormais claires pour tout le monde".
Jeudi, la justice libanaise a ordonné l'ouverture de nouvelles enquêtes dans des affaires de corruption ou de gaspillage de fonds publics supposés visant de hauts responsables. Les autorités ont mis en avant des initiatives similaires ces derniers jours pour illustrer leur lutte anti-corruption, sans parvenir à calmer la colère de la rue. Jeudi, le parquet général a ordonné une enquête concernant "tous les ministres des gouvernements successifs depuis 1990 à ce jour".
De son côté, le procureur financier Ali Ibrahim a engagé des poursuites contre le directeur des douanes Badri Daher pour "gaspillage de fonds publics". Le même juge a entendu pendant trois heures l'ancien Premier ministre Fouad Siniora concernant 11 milliards de dollars de dépenses, effectuées entre 2006 et 2008 quand il était à la tête du gouvernement. M. Siniora s'est défendu par le passé de tout détournement de fonds publics. Mercredi, le procureur financier avait engagé des poursuites pour blanchiment d'argent et pots-de-vin contre le président de l'Agence pour la sécurité de l'aviation civile à l'Aéroport international de Beyrouth, Omar Kaddouha. Des poursuites ont également récemment été engagées contre l'ancien Premier ministre Nagib Mikati et la Banque Audi pour enrichissement illicite. Elles ont aussi visé l'ancien ministre Fayez Chokr pour "négligence dans l'exercice de ses fonctions".
Mercredi, le président Michel Aoun a assuré que le prochain gouvernement - dont la formation se fait toujours attendre après la démission du cabinet de Saad Hariri le 29 octobre - inclurait des "ministres compétents et à l'abri de tout soupçon de corruption". Il avait aussi précisé que 17 dossiers de corruption faisaient l'objet d'enquêtes judiciaires.
Depuis le 17 octobre, des centaines de milliers de Libanais se mobilisent à travers le pays pour crier leur colère contre des dirigeants accusés de corruption et d'incompétence, dans un pays en proie à une grave crise économique. Le Liban est classé 138e sur 180 pays en matière de corruption par l'ONG Transparency International.
En septembre dernier, plusieurs associations libanaises avaient porté plainte contre le chef du CPL, pour incitation aux dissensions sectaires.
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commentaires (16)
C’est amusant d’entendre la réponse des inconditionnels de Mr Bassil qui me disent: « mais voyons, le père de Gebran Bassil est un gros propriétaire terrien dans la région de Batroun, et son fils a certainement hérité tout cela et était très riche déjà avant de rentrer en politique »... Du n’importe quoi pour justifier son train de vie princier, ses demeures somptueuses, ses investissements immobiliers, ses dépenses incroyables pour se faire élire qui se chiffrent par dizaines de millions de $... C’est simple à vérifier: déclaration de patrimoine et revenus avant de rentrer en politique, avec preuves à l’appui, comparés au salaire de ministre, patrimoine et possessions actuelles, circulation sur les comptes en banque au Liban et à l’étranger, ainsi qu’aux membres de sa famille, évaluation de son train de vie actuel et un simple calcul comptable vous fournirait la réponse! Oui, mais c’est sans compter que ça prendrait une commission judiciaire indépendante, une enquête approfondie, une mise en accusation ferme et un procès loin des feux de la rampe! Pensez-vous qu’on arrivera un jour à cela? C’est là où le bat blesse, et il y a encore beaucoup à faire avant d’avoir la coupe aux lèvres!
Saliba Nouhad
00 h 31, le 09 novembre 2019