Trois jours après le début de la campagne contre le groupe de rock alternatif libanais Machrou' Leila, sur fond de polémique autour de l'homosexualité du chanteur et d'une atteinte présumée à la religion chrétienne, les membres du groupe ont participé, mercredi soir à Amchit, à une réunion présidée par l'archevêque de Jbeil, Mgr Michel Aoun, et ont décidé à son issue de s'excuser lors d'une conférence de presse. Cette décision devrait sauver le concert du groupe prévu le 9 août dans le cadre du festival de Byblos.
Selon l'Agence nationale d'information (Ani, officielle), ils étaient nombreux à assister à la réunion à l'évêché : l'imam de Jbeil, le cheikh Ghassan Lakkis, la présidente du festival de Byblos, Latifé Lakkis, des représentants des partis chrétiens dans le caza, Adib Gebran du Courant patriotique libre, Hadi Merhej des Forces libanaises, Rustom Saïbi des Kataëb, et l'avocat du patriarcat, Iskandar Gebran.
L'agence rapporte que "toutes les personnes réunies ont affirmé soutenir la position de l'évêché de Jbeil (...) surtout qu'elle est venue en réponse aux appels des croyants et des citoyens". "Les membres du groupe ont reconnu lors de la réunion qu'ils ont nui, à travers certaines chansons, à des symboles religieux et porté atteinte aux dogmes chrétiens et islamiques et se sont dit prêts à s'excuser lors d'une conférence de presse". Le groupe s'est en outre s'engagé à retirer les chansons offensantes de tous ses concerts, ajoute l'agence.
L'évêché de Jbeil continuera, de son côté, à coopérer avec le Centre catholique d'information pour prendre une décision "à la lumière de la conférence de presse qui doit avoir lieu".
Enquête ouverte
Plus tôt dans la journée, les membres du groupe avaient été interrogés par le service de la Sécurité de l’État. Les jeunes artistes ont été relâchés sur ordre de la procureure générale du Mont-Liban, la juge Ghada Aoun. A la demande de la Sécurité de l’État, Mashrou' Leila a ensuite retiré de ses pages sur les réseaux sociaux les publications qui ont été considérées comme offensantes à la religion chrétienne. Cela n'a pas empêché le parquet général d'ouvrir une enquête après l'information judiciaire transmise contre le groupe par un activiste, Philippe Seif, pour "atteinte aux religions et incitation à la discorde sectaire et aux dissensions communautaires".
Il semblerait que l’orientation sexuelle du chanteur du groupe, Hamed Sinno, ouvertement gay, ainsi qu’un article qu’il a partagé sur les réseaux sociaux montrant la chanteuse Madonna se substituant à la Vierge Marie sur une icône russe ou byzantine, aient suscité la colère ou la désapprobation dans certains milieux. Il en est de même pour ce qui est du titre Djin (2015), que certaines personnes ont ressorti sur les réseaux sociaux pour en scruter les paroles à la loupe, avant de l’accuser de porter atteinte au christianisme et de promouvoir l’occultisme.
(Lire aussi : Avec les menaces contre « Mashrou’ Leila », la liberté artistique et d’expression en jeu)
Parmi le flot de responsables politiques et élus locaux qui ont réclamé l'annulation du concert du 9 août, figure un cadre du Courant patriotique libre, Nagi Hayek, qui a publiquement menacé le groupe musical dans un message partagé sur Facebook, qu'il avait ensuite supprimé.
Mardi, ce sont les Forces libanaises qui ont exprimé leur soutien à l'archevêché maronite de Jbeil et au Centre catholique d'information, ces deux instances ayant appelé à l'annulation du concert de Mashrou' Leila. D'autres personnalités politiques, à l'instar du président du Rassemblement de Saydet el-Jabal et ancien député de Jbeil, Farès Souhaid, ont en revanche exprimé leur soutien au groupe.
Mashrou’ Leila avait répondu lundi à ses détracteurs, se disant étonné des attaques contre le groupe. "Le Festival de Byblos nous a invités à l’occasion du 10e anniversaire de la création de notre groupe. Nous avons été surpris par une campagne infondée menée contre nous et qui frappe la liberté d’expression et touche à l’apostasie", selon un communiqué du groupe, diffusé sur les réseaux sociaux.
Le Festival de Byblos ne s’est pas encore prononcé sur la question, mais des sources au sein de la direction affirment œuvrer pour le maintien du concert, grâce à des contacts avec les autorités compétentes.
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Ainsi on se croirait au Tribunal de la Sainte Inquisition ou des Procès de l'URSS et de la Chine de Mao. L'accusé, sous la pression de la peur et de la torture (ici morale), finit par avouer sa faute, ou son péché, et demander pardon à l'idéologie du groupe identitaire. Son humiliation publique (= excuses) sera son châtiment. QUELLE HONTE. La loi est la loi, et elle doit être appliquée. Nul ne discute ce point. Mais pourquoi l'évêque? Quel jeu joue l'église dans cette affaire? Quelle différence y a-t-il entre le clergé local et les Mollahs ou autres Imams accablant les gens de fatwas? Et pourquoi ne poursuit-on pas les "méchants" qui ont appelé à la haine, qui ont menacé, qui ont exercé une authentique torture morale d'une violence inouïe sur l'opinion publique, au nom de leurs fantasmes identitaires? Pourquoi? Et cela veut se prétendre "moderne"? Occidentalisé? Que nenni .......... Que nenni ........ Ça le Christianisme? Que nenni .... Au diable toute cette populace dont la foi chrétienne se résume à quelques folkloriques bondieuseries.
11 h 13, le 25 juillet 2019