Rechercher
Rechercher

À La Une - Liban

Devant le Parlement, Hariri prépare le terrain à des mesures d'austérité "sans précédent"

Le Premier ministre promet toutefois d'épargner les personnes à revenus limités.

Le Parlement libanais, réuni mercredi sous la présidence de Nabih Berry, dans le cadre d'une séance législative. Photo Hassan Ibrahim/Parlement libanais

Le Premier ministre libanais, Saad Hariri, a laissé entendre mercredi devant le Parlement que le gouvernement préparait des mesures "d'austérité sans précédent" dans l'histoire du pays pour empêcher une détérioration de l'économie. M. Hariri a dans le même temps promis de ne pas porter atteinte aux personnes à revenus limités, sans donner plus de précisions sur les mesures prévues par son cabinet dans le projet de budget qu'il est censé présenter dans les semaines qui viennent.

Le chef du gouvernement s'exprimait dans le cadre de la séance législative du Parlement, alors que des milliers de fonctionnaires manifestaient à proximité, place Riad el-Solh, afin d'exprimer leur colère contre une éventuelle atteinte à leurs salaires.

"Tout ce qui est dit au sujet des baisses (de salaires) n'est que des informations de presse", a déclaré M. Hariri dans le cadre de la séance législative. "Le gouvernement s'active jour et nuit pour (approuver un budget avec) des chiffres qui préservent les finances de l'Etat ainsi que les personnes à revenus limités", a-t-il affirmé. "La surenchère ne sert à rien, car si le pays s'effondre, nous tomberons tous avec lui", a-t-il prévenu. "Nous sommes avec les retraités et avec l'administration publique, mais nous cherchons la stabilité de la livre et nous devons être honnêtes avec eux en leur disant que la situation dans le pays risque de se détériorer".

Le Premier ministre a encore assuré que le gouvernement ne voulait pas "réduire les salaires par plaisir, mais nous sommes parvenus à un point qui nous impose de prendre des mesures radicales". "L'important est que nous ne toucherons pas aux choses essentielles", a-t-il ajouté sans donner plus de précisions.

Samedi dernier, le ministre des Affaires étrangères et chef du Courant patriotique libre Gebran Bassil avait préconisé une réduction "momentanée" des salaires des fonctionnaires pour pouvoir remédier au déficit des finances publiques, enflammant ainsi les milieux politiques et les corps professionnels, qui ont crié au scandale. Cette annonce-surprise a suscité une cascade de réactions survoltées parmi ses pairs, mais aussi dans les milieux associatifs et les corps professionnels qui ont unanimement dénoncé une mesure "injuste et inadaptée". Pour l’heure, ces mesures, qui selon certains médias auraient reçu l’aval du Premier ministre et du président de la République Michel Aoun, n’ont "aucun fondement concret", à en croire des sources informées qui se sont confiées à L'Orient-Le Jour.

Mardi, ce sont les militaires à la retraite qui ont exprimé leur colère en manifestant dans la rue et en coupant brièvement certains axes routiers.

"Le gouvernement a été formé il y a deux mois et doit élaborer un budget d'austérité sans précédent dans l'histoire du Liban", a souligné M. Hariri. "Ma porte est ouverte à tous ceux qui ont un avis à exprimer en matière de chiffres et des propositions à faire", a-t-il ajouté.

Le chef du gouvernement a ensuite demandé aux responsables réunis s'ils étaient en faveur de la conférence CEDRE qui s'est tenue à Paris en avril dernier, et à l'issue de laquelle les bailleurs de fonds ont promis au Liban 11 milliards de dollars en prêts, à condition de mettre en place des réformes économiques et financières.

"Dites si vous ne voulez pas de CEDRE et si vous voulez que nous empruntions à des taux de 9 à 10% pour construire un aéroport et effectuer des chantiers d'infrastructure", a lancé M. Hariri.

Répondant au Premier ministre, le président du Parlement, Nabih Berry, lui a dit : "Nous comprenons de vos propos que vous avez besoin de trois mois pour approuver le budget, mais nous nous étions mis d'accord sur deux mois. Nous souhaitons que les choses s'accélèrent".


M. Hariri s'est de nouveau exprimé sur le même dossier à la fin de la séance. "Nous devons être sincères avec les citoyens. Si nous continuons dans cette direction, nous pouvons arriver à une catastrophe", a-t-il ajouté, tout en assurant que le Liban n'est pas en situation de faillite. "Si nous ne prenons pas les mesures requises, la situation pourrait empirer. Nous avons un problème économique. Nous devons réduire les déficits et augmenter l'investissement", a-t-il ajouté, affirmant que "ces mesures ne concerneront pas les pauvres". "Nous avons besoin aujourd'hui du budget le plus austère de l'histoire du Liban", a souligné M. Hariri, insistant sur la nécessité de mener de "vraies réformes au sein de l'administration".


(Lire aussi : « Qu’ils arrêtent de voler et tout ira bien »)



Bassil tempère
"Le projet de budget sur lequel nous travaillons ne contient pas de réduction de 15% des salaires des fonctionnaires, contrairement à ce qui est dit. Rien n'a été tranché. Je ne suis pas devenu en faveur d'une telle réduction, et la question ne s'est pas posée", a de son côté expliqué le ministre des Finances, Ali Hassan Khalil, lors d'un point de presse au siège du Parlement. "Rien n'a été tranché jusque là ou adopté", a-t-il répété. "Je souhaite que les citoyens s'expriment sur cette question une fois le budget adopté", a-t-il dit.
Interrogé sur les propos de M. Bassil, samedi, M. Khalil a dit : "C'est son point de vue, il l'a dit clairement, et nous respectons cela."

De son côté, Gebran Bassil a affirmé que ses propos concernant la baisse des salaires avaient été mal interprétés."J'ai dit ce que j'avais à dire. Certains médias et responsables politiques ont détourné ce que j'ai dit sur ce sujet". M. Bassil a affirmé que ce dossier comporte cinq volets : "la taille de l'Etat, le service de la dette, l'évasion fiscale et douanière, l'électricité et les impôts que l'on peut prélever des personnes fortunées". "Ce dossier demande de l'audace et de la transparence. Nous l'avions déjà dit lorsque nous avons voté la nouvelle grille des salaires pour la fonction publique", a-t-il ajouté.
"Tout le monde parle de mesures difficiles, mais elles sont temporaires et concernent pas les personnes à revenus limités", a-t-il encore dit, insistant sur l'importance de voter rapidement le budget.




"Une minute de silence"
Le gouvernement était censé se réunir demain au palais présidentiel de Baabda afin de plancher, entre autres, sur la question du budget. Mais la séance a été reportée à une date ultérieure, en raison des divergences politiques autour de cette question, selon des informations de presse.


Par ailleurs, la député Paula Yacoubian, issue de la société civile, a appelé à une minute de silence symbolique "en mémoire de l'Etat". "Si nous ne prenons pas les mesures nécessaires, nous allons en arriver à ce point-là", a prévenu M. Hariri.

Le député Hassan Fadlallah, affilié au Hezbollah, a, lui, demandé au Premier ministre de réclamer à la Cour des comptes une clôture des comptes des années précédentes, estimant qu'il sera "impossible de rétablir l'équilibre dans les finances publiques sans une clôture des comptes de toutes les années précédentes, à défaut de quoi, nous serons en présence d'une violation de la loi et de la Constitution".

Le président du parti Kataëb, Samy Gemayel, qui a également pris la parole, a rappelé que sa formation avait demandé un état des lieux de la fonction publique afin de mettre un terme aux emplois fictifs, et ce avant l'adoption de la nouvelle grille des salaires qui a prévu des augmentations de traitements. "Nous avions réclamé des réformes avant les élections (législatives) et l'adoption de la grille, afin qu'on n'accorde pas de droits à ceux qui ne le méritent pas, mais notre proposition n'a pas été prise en compte et plus de dix mille personnes ont été embauchées en violation de la loi", a affirmé le député, en allusion au scandale des recrutements abusifs de plusieurs milliers de fonctionnaires. La commission parlementaire des Finances et du Budget mène actuellement son enquête à ce sujet.

En outre, le député Elias Hankache, affilié au parti Kataëb, a demandé au président Berry si le gouvernement comptait élargir les décharges d'ordures installées sur le littoral. "Il vaut mieux que vous ne le sachiez pas", lui a répondu le chef du Législatif.



Lire aussi

La réduction des salaires des fonctionnaires annoncée par Bassil provoque un séisme


Pour mémoire

Recrutements irréguliers : des institutions déjà montrées du doigt

Les retraités de la fonction publique réclament le respect de leurs droits

Éducation : Le gouvernement ignore l’échelonnement des effets de la grille des salaires

Le Premier ministre libanais, Saad Hariri, a laissé entendre mercredi devant le Parlement que le gouvernement préparait des mesures "d'austérité sans précédent" dans l'histoire du pays pour empêcher une détérioration de l'économie. M. Hariri a dans le même temps promis de ne pas porter atteinte aux personnes à revenus limités, sans donner plus de précisions sur les mesures prévues...

commentaires (4)

De toute façon le monde va mal , partout, n'importe où . Je n'ai pas l'habitude d'être un adepte de Fifi pessimiste/nostalgique , mais pour vivre sur 3 continents et ayant un lien avec des hommes d'affaires divers , je peux vous dire que le pire est à venir . Worldwide.

FRIK-A-FRAK

16 h 39, le 17 avril 2019

Tous les commentaires

Commentaires (4)

  • De toute façon le monde va mal , partout, n'importe où . Je n'ai pas l'habitude d'être un adepte de Fifi pessimiste/nostalgique , mais pour vivre sur 3 continents et ayant un lien avec des hommes d'affaires divers , je peux vous dire que le pire est à venir . Worldwide.

    FRIK-A-FRAK

    16 h 39, le 17 avril 2019

  • LES CITOYENS SONT CONFRONTES A ACCEPTER UNE REDUCTION DIRECTE DES SALAIRES ET RETRAITES ET L,AUGMENTATION DE LA TVA... OU UNE DEVALUATION DE FACTO DE LA L.L. ! LE PREMIER CHOIX EST LE PLUS POSITIF CAR LE SECOND REDUIRA LA PUISSANCE D,ACHAT... DONC SALAIRES ET RETRAITES INCLUES... ET HAUSSE INCONTROLEE DES PRIX EN GENERAL. DEVANT DEUX MAUX ON CHOISIT LE MOINDRE.

    LA LIBRE EXPRESSION

    15 h 03, le 17 avril 2019

  • Au train ou vont les choses au Parlement chez nous, ils pourront élaborer et approuver les budgets pour 2019 et 2020 en même temps, si l'Etat Libanais est encore debout...inchallah...comme on dit chez nous ! Irène Saïd

    Irene Said

    14 h 38, le 17 avril 2019

  • Mille fois hélas le pays doit passer par cette étape d'austérité pour recouvrer une santé économique. L'important est de ménager le petits gens sans ressources réelles.

    Sarkis Serge Tateossian

    14 h 13, le 17 avril 2019

Retour en haut