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À La Une - crise

La contestation en Algérie reste fortement mobilisée contre Bensalah et la présidentielle

Pour la première fois en 8 semaines de défilés hebdomadaires dans la capitale, des policiers en tenue anti-émeutes ont limité plusieurs heures de la matinée l'accès au parvis de la Grande Poste, épicentre de la contestation dans le centre d'Alger, avant de finalement libérer l'accès.

Une manifestante algérienne tient une pancarte devant des forces de l'ordre, le 12 avril 2019 à Alger. Photo AFP / Ryad KRAMDI

Un cortège monstre défile dans le centre d'Alger pour un 8e vendredi consécutif de contestation, le premier depuis l'entrée en fonctions du président par intérim et son annonce d'une présidentielle le 4 juillet pour désigner un successeur à Abdelaziz Bouteflika, refusés par les manifestants.

Le nombre exact de manifestants est difficile à établir, ni les autorités ni les protestataires ne communiquant de chiffres. Mais en début d'après-midi une foule dense emplit les rues du centre-ville, au moins aussi importante que celle des vendredis précédents. Des manifestations d'ampleur diverses sont signalées dans d'autres villes d'Algérie, notamment Constantine et Annaba (3e et 4e villes du pays), où la pluie a affaibli la mobilisation, ou Tizi-Ouzou et Béjaia, principales localités de Kabylie (nord), où de très nombreux manifestants sont signalés.

Après avoir obtenu le 2 avril la démission du chef de l'Etat, le mouvement populaire algérien réclame désormais le départ d'Abdelkader Bensalah, apparatchik de 77 ans, chargé par la Constitution d'assurer l'intérim, mais aussi de l'ensemble des personnalités de l'appareil mis en place par M. Bouteflika en 20 ans de pouvoir.

Sur les réseaux sociaux, où est née en février la contestation, les appels à manifester ont repris ces derniers jours pour la 8e semaine consécutive, notamment sous le mot-dièse "Ils partiront tous".



(Lire aussi : La présidentielle, un moyen pour le régime algérien « de toiletter sa vitrine »)



Les contestataires estiment que les structures et personnalités mises en place par M. Bouteflika ne peuvent garantir un scrutin libre et équitable pour désigner son successeur et craignent une élection frauduleuse ne servant qu'à conforter le "système" au pouvoir.

L'ampleur de la mobilisation vendredi sera jaugée attentivement par chacun des deux camps, qui campent sur leurs positions.

Le pouvoir entend mordicus poursuivre le processus prévu par la Constitution: l'élection d'un nouveau président sous 90 jours. Trop court pour manifestants et société civile, qui réclament la mise en place d'institutions ad hoc, en vue d'une véritable transition post-Bouteflika.

"Le peuple est plus grand que la Constitution", peut-on lire sur la pancarte d'un manifestant. Certaines étaient également hostiles au général Ahmed Gaïd Salah, chef d'état-major de l'armée qui a écarté ces derniers jours toute transition hors des institutions actuelles, tout en promettant de garantir la régularité du scrutin.

Sera également scrutée vendredi, l'attitude de la police qui a semblé moins tolérante ces derniers jours à l'égard des rassemblements dans la capitale. Vendredi, pour la première fois en 8 semaines de défilés hebdomadaires dans la capitale, des policiers en tenue anti-émeutes ont limité plusieurs heures de la matinée l'accès au parvis de la Grande Poste, épicentre de la contestation dans le centre d'Alger, avant de finalement libérer l'accès. Ils ont également vainement tenté, sans force excessive, de déloger plusieurs centaines de manifestants les ayant devancés en s'installant dès l'aube sur les escaliers de ce bâtiment néo mauresque emblématique du cœur de la capitale. Certains étaient venus d'autres villes, après de longues heures de route, ralentis par de nombreux barrages filtrants de la gendarmerie sur le trajet.

Les multiples tentatives d'intimidation de la police dans la matinée contre les manifestants à Alger n'ont pas découragé les contestataires, venus pour certains en famille avec leurs enfants.
"Je crains qu'ils n'aient l'intention de faire quelque chose aujourd'hui, mais on ne répondra pas à la provocation" assure Yacine, ingénieur de 35 ans, venu avec sa fiancée. "Silmiya!" ("pacifique!") scandent les manifestants, reprenant le mot d'ordre de la contestation.


(Lire aussi : Libye, Algérie, Soudan : les trois crises qui inquiètent Le Caire)


Présidentielle rejetée
"C'est clair que les élections seront truquées avec eux" (les anciens partisans de M. Bouteflika), lance Hamid Bouchnab 24 ans étudiant à Jijel: "Nous n'avons pas confiance alors nous refusons", qu'ils gèrent l'après-Bouteflika, "nous refusons Bensalah. Nous l'avons dit et nous le redirons jusqu'à ce qu'il comprenne".

Désigné par la Constitution pour assurer l'intérim, M. Bensalah a remplacé dans les slogans hostiles M. Bouteflika, président malade dont il était ces dernières années la "doublure" officielle, en Algérie et à l'étranger.

"L'élection du 4 juillet est rejetée par le peuple qui refuse également la nomination de Bensalah", analyse Mahrez Bouich, professeur de philosophie à l'université de Bejaia (250 km à l'est d'Alger).



(Lire aussi : Quels enjeux pour la présidentielle en Algérie ?)



"Légale mais non légitime"
Pour les protestataires, cette présidentielle ne peut être libre et équitable si elle est organisée par les institutions et personnalités héritées des 20 ans de pouvoir de Bouteflika, marqués par des scrutins frauduleux selon l'opposition. Mais M. Bensalah a reçu le soutien implicite de l'armée, revenue au centre du jeu politique depuis que le général Gaïd Salah a lâché M. Bouteflika rendant inéluctable sa démission.

Le chef d'état-major de l'armée a estimé "irraisonnable" une transition hors du cadre institutionnel actuel et promis aux manifestants que l'armée garantirait "la transparence et l'intégrité" du scrutin. "L'essentiel pour l'armée est d'avoir un président rapidement, pour avoir des institutions stables et se concentrer sur ses missions de sécurisation du pays", analyse Rachid Grim, qui enseigne les Sciences politiques à l'Institut supérieur de gestion et de planification (ISGP).

Cette présidentielle est "légale mais non légitime", estime de son côté Louisa Dris-Aït Hamadouche, enseignante en Sciences politiques à l'Université d'Alger 3.

Le pouvoir va scruter attentivement la mobilisation dans l'espoir d'un affaiblissement. "Trois mois, c'est long pour un mouvement populaire, pour le moment il tient bon", note Louisa Dris-Aït Hamadouche. Mais, à l'inverse "trois mois c'est court" pour transformer un mouvement populaire en mouvement politique organisé, souligne Rachid Grim, estimant qu'une telle structuration n'est "pas pour demain".


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commentaires (1)

SE DIRIGE-T-ON VERS LA CONFRONTATION ? CE SERAIT VRAIMENT REGRETTABLE SI ON VERRAIT UN NOUVEAU PRINTEMPS HIVERNAL ARABE OU SI LE DESPOTISME RESTE SUR PLACE. L,ENTENTE EST DE RIGUEUR.

LA LIBRE EXPRESSION

20 h 10, le 12 avril 2019

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Commentaires (1)

  • SE DIRIGE-T-ON VERS LA CONFRONTATION ? CE SERAIT VRAIMENT REGRETTABLE SI ON VERRAIT UN NOUVEAU PRINTEMPS HIVERNAL ARABE OU SI LE DESPOTISME RESTE SUR PLACE. L,ENTENTE EST DE RIGUEUR.

    LA LIBRE EXPRESSION

    20 h 10, le 12 avril 2019

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