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Liban - Focus

Le 8 Mars, fort de la « faiblesse des souverainistes » ?

Retour sur la genèse et l’état actuel des alliés du Hezbollah 14 ans plus tard.

Le secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, prononçant son allocution le 8 mars 2005. Photo Wissam Moussa.

Mardi 8 mars 2005, place Riad el-Solh. Le Hezbollah et ses alliés, exception faite du Courant patriotique libre qui se trouvait encore à l’époque dans les rangs souverainistes du 14 Mars, manifestent dans la rue pour « remercier la Syrie », alors que depuis l’assassinat de l’ancien Premier ministre Rafic Hariri au cœur de Beyrouth, trois semaines plus tôt, les manifestations populaires et massives se multiplient pour un départ des troupes syriennes. Le rassemblement du 8 Mars, lui aussi populaire, a jeté les bases d’une large alliance politique sous le label de laquelle se sont regroupés tous les protagonistes gravitant dans l’orbite de la moumana’aa et favorables au régime de Bachar el-Assad. Un tableau sur lequel s’est par la suite greffé le CPL à la faveur de l’entente de Mar Mikhaël, signée le 6 février 2006 entre Michel Aoun, alors chef du parti aouniste et député du Kesrouan, et le secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah. Cette alliance a longtemps été caractérisée par des rapports particulièrement étroits et solides en raison de l’arsenal du Hezbollah, d’une part, et de la convergence sur une option stratégique bien définie de l’autre. Il n’en demeure pas moins que 14 ans plus tard, ce regroupement est passé par des moments politiques forts et par quelques épisodes qui l’ont affaibli, aussi bien sur le plan local qu’au niveau international.

Le Hezbollah est parvenu à imposer son candidat à la présidence de la République, en l’occurrence le général Michel Aoun, élu en octobre 2016. Le parti chiite a même été jusqu’à bloquer l’échéance présidentielle durant deux ans et demi pour le mener à la première magistrature. C’est dans le même cadre que s’inscrivent les grands efforts menés par la formation de Hassan Nasrallah pour que soit mise sur pied une loi électorale qui lui est favorable. Au terme d’une laborieuse gestation, le Parlement a adopté une loi prévoyant la proportionnelle appliquée à 15 circonscriptions avec un vote préférentiel appliqué au caza. Selon certains observateurs, il s’agit d’une formule à même d’assurer un pluralisme politique dans les rangs de toutes les communautés, exception faite des chiites. On en veut pour preuve la réussite du Hezbollah à propulser ses alliés sunnites et druzes à l’hémicycle et au cabinet.

Cet état des lieux caractérisé par un déséquilibre en faveur du 8 Mars, un analyste politique proche des milieux souverainistes et qui a requis l’anonymat l’explique à L’Orient-Le Jour, d’abord par le manque de cohésion des adversaires du Hezbollah et de ses alliés. Allusion à l’effondrement de l’alliance souverainiste du 14 Mars, qui a longtemps fait le contrepoids politique à la coalition menée par le parti chiite.

Il est rejoint sur ce point par Ali el-Amine, opposant chiite de longue date au Hezbollah, contacté par L’OLJ. « Si le Hezbollah s’est vu affaibli, ses détracteurs ont connu une régression beaucoup plus significative et importante », affirme-t-il. Allusion à peine voilée au compromis politique élargi conclu en 2016 entre Michel Aoun et Saad Hariri, leader du courant du Futur. Une entente à laquelle il conviendrait d’ajouter l’accord de Meerab signé entre M. Aoun et le chef des Forces libanaises Samir Geagea. Outre le fait qu’il a scellé la réconciliation interchrétienne, cet accord a permis à Michel Aoun, candidat du Hezbollah avec qui les FL ne convergent sur aucun principe stratégique, de bénéficier de l’appui de son adversaire historique dans la course pour Baabda. « Les forces souverainistes sont fautives parce que, à la faveur des ententes qu’elles ont tissées avec les satellites du Hezbollah, elles observent le silence face aux flagrantes atteintes à la souveraineté et au maintien d’un arsenal illégal », analyse Ali el-Amine. En revanche, l’analyste politique précité insiste sur « l’importance de respecter les limites de la realpolitik », notamment en ce qui concerne les questions de souveraineté.


(Lire aussi : La décision britannique anti-Hezbollah, une « arme » instrumentalisée en politique intérieure ?)

Rapports perturbés

Mais en dépit de ce bilan favorable au 8 Mars, celui-ci a subi plusieurs camouflets particulièrement significatifs tant sur le plan politique que par leur dimension symbolique. Il s’agit bien entendu des rapports perturbés entre certaines composantes de cette alliance. On en veut pour preuve le froid persistant entre le CPL et les Marada de Sleiman Frangié, avec en toile de fond un bras de fer autour de la course pour la présidence de la République. Il y a aussi les rapports en dents de scie entre le parti de Gebran Bassil et le mouvement Amal. Mais c’est surtout Nawaf Moussaoui, député hezbollahi de Tyr, qui a secoué récemment les rapports entre le parti chiite et le CPL. Le 13 février dernier, il avait déclaré au Parlement que « Michel Aoun a accédé à la tête de l’État grâce aux armes de la résistance », provoquant ainsi la colère des aounistes.

Un incident que Ali el-Amine veut limiter à la politique politicienne. « Le Hezbollah se soucie peu de ce genre de querelles tant que ses adversaires ne franchissent pas certaines lignes rouges qu’il a tracées, comme l’interdiction d’un sérieux débat qui porterait sur son arsenal illégal », estime-t-il.


(Lire aussi : Nasrallah : La lutte contre la corruption est aussi « sacrée » que la résistance à Israël)

Les sanctions contre l’Iran

Il serait toutefois peu rigoureux de confiner la faiblesse du camp du 8 Mars à la stricte dimension locale, dans la mesure où elle est également liée à la conjoncture régionale et internationale. C’est en tout cas dans ce cadre qu’il conviendrait d’inscrire le déclin du rôle iranien en Syrie, qu’expliquent parfaitement les sévères sanctions américaines infligées en novembre dernier à la République islamique et à ses alliés, notamment le Hezbollah. Des mesures à même de conduire à une réduction significative du soutien financier iranien au parti chiite. D’ailleurs, Hassan Nasrallah n’a pas mâché ses mots sur ce plan. Dans un discours prononcé hier en l’honneur de l’organisation de soutien à la Résistance islamique, il a reconnu, pour la première fois, que son parti « a besoin de soutien financier » face aux sanctions qui le visent. Certains milieux politiques estiment cependant que le Hezbollah pourrait combler ce vide en tentant « d’apaiser sa base populaire », comme le souligne Hanine Ghaddar, journaliste hostile au parti chiite et basée aux États-Unis, dans un article publié sur le site web du Washington Institute. D’où son accession au ministère de la Santé, à titre d’exemple, de même que la lutte – quoique peu convaincante – contre la corruption, nouveau cheval de bataille du parti.

Sur un registre strictement politique, certains milieux expliquent la faiblesse du Hezbollah par le déclin du rôle de Téhéran en Syrie. D’autant que Moscou et Tel-Aviv sont en négociations pour réduire l’influence des supplétifs de l’Iran sur le terrain syrien. Le régime de Bachar el-Assad est donc lui aussi en position de faiblesse, tout comme le Hezbollah. Un tableau qui n’est pas sans susciter des interrogations sur le positionnement de Michel Aoun, longtemps partenaire chrétien privilégié du parti chiite. En sa qualité de chef de l’État, il ne peut plus répondre favorablement à toutes les exigences de son entente avec le Hezbollah. D’autant qu’un accord le lie à Saad Hariri. M. Aoun se retrouve donc entre le marteau des rapports de force locaux et l’enclume des sanctions internationales, estiment des milieux politiques... sans oublier « les ambitions présidentielles de son gendre, Gebran Bassil ».


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commentaires (4)

FORT D,UNE AILE ARMEE LE 8 MARS L,UTILISE COMME UN SPECTRE POUR S,IMPOSER...

LA LIBRE EXPRESSION

09 h 49, le 09 mars 2019

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Commentaires (4)

  • FORT D,UNE AILE ARMEE LE 8 MARS L,UTILISE COMME UN SPECTRE POUR S,IMPOSER...

    LA LIBRE EXPRESSION

    09 h 49, le 09 mars 2019

  • Ceux que vous avez décidé d'appeler des "souverainistes" sont FAIBLES par leur alignement IDIOT et stérile à un bloc qui les vend pour un radis, au gré de ses intérêts régionaux, mais toujours au profit d'un état qui usurpe à tour de bras . Que voulez vous de plus que ce bloc fasse pour les " souverainistes" ? Qu'il décide d'attaquer manu militari les résistants du 8 Mars , pour leurs beaux yeux ? Il a essayé de le faire en 2006 et continue d'essayer de le faire, s'il n'y arrive pas c'est que leur tête pensante ne sont plus que de pôv POLTRONS.

    FRIK-A-FRAK

    09 h 33, le 09 mars 2019

  • De grâce surveillez votre langage. Souverainiste dans n’importe quel dictionnaire et dans tout entendement sain veut dire celui ou celle qui est indépendant, libre, le front haut, pour qui le drapeau national à force de foi. Non celui ou celle qui reçoit des subsides, donc des ordres de l’etranger, non celui qui s’est mis à la traîne et encore pires au service d’interets contraires à ceux de son propre pays. Georges Tyan

    Lecteurs OLJ 3 / BLF

    07 h 08, le 09 mars 2019

  • Compliquée comme situation....trop compliquée.

    Sarkis Serge Tateossian

    02 h 16, le 09 mars 2019

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