Le secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, a affirmé mardi que "la résistance libanaise, avec ses armes, ses capacités et son expertise, est aujourd'hui plus forte que jamais" et que lors de la guerre de juillet 2006, le Hezbollah était "plus puissant que l'armée israélienne". Évoquant brièvement le dossier libanais, notamment la formation du futur gouvernement, qu'il va plus longuement évoquer lors d'un discours dimanche prochain, Hassan Nasrallah a appelé "toutes les parties à "poursuivre le dialogue".
Le secrétaire général du Hezbollah a fait ces déclarations à l'occasion du douzième anniversaire de la "victoire contre Israël", lors d’un rassemblement organisé dans la banlieue sud de Beyrouth.
La guerre de juillet-août 2006, qui avait duré 33 jours, avait fait 1.200 morts libanais, en majorité civils, et 165 morts israéliens, des soldats pour la plupart. Elle s'était terminée après l'adoption de la résolution onusienne 1701 qui prévoie le déploiement de la Force intérimaire des Nations unies au Liban-Sud (Finul) et le désarmement du Hezbollah.
"De 2006 à aujourd'hui, Israël n'a pas arrêté de changer sa stratégie militaire. Jusqu'à hier, son armée effectuait des manœuvres au nord du pays parce qu'elle reconnaît qu'il existe au Liban une véritable force qui constitue une menace", a déclaré le leader chiite. Et de poursuivre : "L'Etat hébreu se reconstruit à la lumière des revers qu'il a subis en 2006. Il prépare des plans concernant ses centrales électriques et ses extractions de gaz parce qu'il sait que nous pouvons les atteindre".
L’armée israélienne a mené, la semaine dernière, de nouvelles manœuvres dans le nord du pays, testant de nouvelles technologies et tactiques pour se préparer à une éventuelle confrontation avec le Hezbollah.
Fin juillet, le quotidien israélien Haaretz avait annoncé que l'armée israélienne avait évoqué avec le gouvernement une éventuelle nouvelle guerre avec le Hezbollah et présenté trois scénarios possibles. Selon le quotidien, l'armée israélienne prévoit qu'en cas de guerre, des centaines de milliers de roquettes pourraient être tirées du Liban-Sud et un bon nombre d'entre elles risqueraient de ne pas pouvoir être interceptées par le système de défense aérien israélien.
(Lire aussi : L'armée israélienne se prépare à différents scénarios de guerre avec le Hezbollah)
"La victoire en Syrie ne tardera plus"
Concernant la situation en Syrie et le rôle d'Israël dans le conflit syrien, le leader chiite a estimé que le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu mène "une campagne de mendicité pour faire sortir l'Iran et le Hezbollah de Syrie". "Israël, qui a été battu en Syrie, veut imposer ses conditions et la bataille de Netanyahu consiste aujourd'hui à faire sortir l'Iran et le Hezbollah de Syrie", a-t-il lancé.
Et de poursuivre : "Tout le monde sait qu'Israël a combattu en Syrie et soutenu les groupes rebelles armés", a-t-il ajouté, estimant que l’État hébreu espérait "la chute de l'armée syrienne et l'abandon, par le gouvernement syrien, du Golan" occupé par Israël. "Mais aujourd'hui, nous sommes confiants que le régime syrien sortira gagnant de la guerre et que la victoire ne tardera plus, c'est une question de jours, de semaines ou de mois", a-t-il affirmé, soulignant que "même le ministre israélien de la Défense, Avigdor Lieberman, a déclaré que l'armée syrienne allait devenir encore plus forte qu'elle ne l'avait jamais été".
Plus de sept ans après le début du conflit en Syrie, les forces du régime syrien, soutenues militairement par les alliés russe et iranien, ainsi que par des combattants du Hezbollah, ont réussi à reprendre des régions entières du pays, contrôlant désormais près des deux-tiers du territoire, y compris une grande partie des villes principales, des axes routiers ainsi que plusieurs points de passage frontaliers. Le régime a dernièrement repris le contrôle des régions de Deraa, Qouneitra et Soueida, proches de la frontière israélienne, dans le sud du pays, suite à quoi les combattants du Hezbollah et iraniens s'étaient retirés à 85 km de la partie du Golan occupée par Israël. La province d'Idleb, sous le feu du régime depuis plusieurs jours, est l'une des dernières de Syrie à échapper au contrôle de Bachar el-Assad qui a averti que sa reconquête était l'un de ses objectifs.
(Lire aussi : Le Hezbollah assure avoir décuplé sa force depuis 2006, le décryptage de Scarlett Haddad)
"Il ne faut pas miser sur une chute du régime iranien"
Hassan Nasrallah a par ailleurs évoqué la crise iranienne, estimant que l'Iran "est plus fort qu'il ne l'a jamais été" et ce malgré les sanctions imposées par les États-Unis. "Il ne faut pas miser sur une chute du régime iranien ou sur un changement de sa politique à travers les sanctions, cela n'arrivera pas", a lancé le leader chiite, allié de Téhéran. "L'Iran est la plus grande puissance de la région, a-t-il insisté. Les sanctions contre l'Iran et le Hezbollah auront peut-être un impact, mais n'ébranleront pas notre force". Et de marteler : "Personne ne peut nous menacer de guerres. Et si quelqu'un veut lancer une guerre, qu'il soit le bienvenu, nous sommes prêts et nous serons vainqueurs".
Le retrait unilatéral des Etats-Unis de l'accord conclu en 2015 avec les grandes puissances sur le nucléaire iranien a été suivi d'une première salve de sanctions entrées en vigueur le 7 août. Mais l'économie iranienne était déjà à la peine, souffrant d'un taux de chômage élevé et d'une nette inflation. Le rial iranien a plongé, perdant près des deux tiers de sa valeur en six mois. Et beaucoup d'iraniens tiennent leur propre gouvernement pour responsable de cette situation. Plusieurs villes ont récemment été le théâtre de manifestations sporadiques et de grèves, fruits de l'inquiétude croissante et d'un sentiment de colère envers le système politique.
"Tenir la rue à l'écart" des tractations gouvernementales
Évoquant brièvement à la fin de son discours le dossier libanais, notamment la formation du futur gouvernement, Hassan Nasrallah a appelé "toutes les parties à poursuivre les négociations et le dialogue jusqu'à ce qu'un résultat soit atteint", appelant à "tenir la rue à l'écart" des tractations gouvernementales. Il répondait ainsi indirectement au chef du Courant patriotique libre, Gebran Bassil, qui avait menacé de recourir à la rue au cas où les revendications de son parti n'étaient pas prises en compte. Le leader chiite a mis en garde "ceux qui parient que des changements sur la scène politique interne ou extérieure influenceront la formation du gouvernement", soulignant qu'en cas de victoire de l'axe de la résistance, le Hezbollah "aura le droit de faire de nouvelles demandes".
Hassan Nasrallah a par ailleurs souligné que la lutte contre la corruption et le gaspillage financier était un des grands objectifs de sa formation politique, indiquant que son parti était en train de préparer un plan clair à ce sujet, en coopération avec ses alliés politiques, et qu'il présenterait le moment venu. Il a affirmé qu'il ne fallait pas "presser les solutions" concernant la corruption. Et d'appeler l'ensemble des parties à éviter "les querelles politiques et les accusations, qui entravent la mise en œuvre du développement et des services publics au Liban". Il a dans ce cadre assuré qu'il n'existe "aucune dispute entre le Hezbollah et le mouvement Amal". "Nous avons eu des divergences d'opinion mais elles ont été résolues", a-t-il dit, en référence aux tensions entourant l'accostage du troisième navire-centrale pour la production d'électricité à Zahrani, au Liban-Sud.
Depuis sa désignation, le 24 mai, le Premier ministre, Saad Hariri, a présenté plusieurs formules qui ont toutes été rejetées par les différentes forces politiques. En attendant les contacts que M. Hariri devrait entamer prochainement avec les Forces libanaises, le Parti socialiste progressiste et les Marada de Sleiman Frangié, le processus de formation du gouvernement continue à buter sur plusieurs obstacles. Il s’agit surtout du différend opposant le Courant patriotique libre aux FL autour de leurs quotes-parts gouvernementales respectives. À cela s’ajoute la querelle entre le chef du PSP Walid Joumblatt et son principal rival sur la scène druze, Talal Arslane, le CPL insistant à intégrer ce dernier à la future équipe ministérielle, contrairement à la volonté du leader de Moukhtara qui veut nommer tous les ministres appartenant à sa communauté au sein du cabinet Hariri. Certains observateurs et responsables politiques attribuent les causes du blocage gouvernemental à la situation régionale.
Peu avant le discours de Hassan Nasrallah, M. Hariri avait affirmé avoir besoin "de plus de temps" pour parvenir à une version finale du prochain cabinet, soulignant toutefois les "petites concessions" faites par les différentes parties politiques. Le Premier ministre désigné avait ajouté que les atermoiements que connaissaient le formation du gouvernement n'étaient pas dus à la situation régionale. "La situation dans laquelle nous nous trouvons est un échec purement libanais", avait-il souligné.
Lire aussi
Ne l’appelez plus « nœud chrétien », c’est le « nœud Bassil », soulignent les FL
Gouvernement : le bras de fer se poursuit autour des portefeuilles
Les nœuds chrétien et druze n’en finissent pas de se compliquer
- De quelle victoire parle-t-il? 1200 civils tués, un pays en ruines. Est-ce cela qu'il appelle une victoire? Il aurait dû saisir l'occasion de cet anniversaire pour présenter au peuple libanais ses excuses pour les souffrances dont il est totalement responsable. - De quelle "résistance libanaise" parle-t-il? Un mouvement de résistance oeuvre à libérer le pays d'une occupation étrangère. Or, le Liban, que je sache, n'est occupé par aucune troupe étrangère (par pitié, soyons sérieux: ne parlons pas de la farce de Chebaa) , sauf la milice dont il est lui-même le chef. De plus qu'irait faire une résistance "libanaise" en Syrie (au Kweit, Yemen etc.) - Israël a été battu en Syrie? Première nouvelle! Le régime des Assad a toujours été, pour Israël, le "meilleur ennemi". Netanyahu rappelait récemment que, jusqu'à la guerre actuelle, pas un coup de feu n'avait été tiré sur le Golan occupé. Quant à la lutte contre la corruption , qu'il commence par nettoyer ses propres écuries.
08 h 02, le 15 août 2018