De gauche à droite Melhem Riachi, Samir Geagea, Michel Aoun et Ibrahim Kanaan. Photo archives
Les réseaux sociaux ont été le théâtre, le week-end dernier, d’un va-et-vient de tweets entre les Forces libanaises et le Courant patriotique libre, sur fond de querelle concernant un « isolement » présumé des Forces libanaises par le Courant patriotique et l’attribution des portefeuilles ministériels, alors que les concertations de Saad Hariri pour la formation du gouvernement ne devraient commencer qu’aujourd’hui. Les FL, qui ont quasiment doublé le nombre de leurs députés, réclament des parts égales à celles du CPL dans le gouvernement, mais se trouvent confrontées à la volonté du chef de la formation aouniste, Gebran Bassil, de rafler la majorité des portefeuilles alloués aux chrétiens, sous prétexte de disposer du plus grand bloc parlementaire.
C’est un tweet samedi du ministre sortant de l’Information, Melhem Riachi, qui a enflammé les esprits et fait exploser les réactions, alors que les escarmouches se multipliaient dernièrement entre les deux partis. « Nimrod pensait qu’il pouvait obtenir et prendre possession de ce qu’il voulait, sans partager le pain même avec ses frères (…). Il est tombé de la tour de Babel, mort écrasé », a-t-il écrit sur son compte Twitter. Ce à quoi le ministre sortant de la Justice Salim Jreissati s’est empressé de répondre : « Au ministre de l’Information, en toute sincérité, cherche Nimrod sous le toit de ta maison. »
Gebran Bassil s’en est également pris samedi au discours des FL. « La rhétorique de l’isolement est une histoire que l’on raconte pour sensibiliser et obtenir des résultats politiques... Personne n’est isolé. Chacun doit se contenter de sa juste représentativité », a-t-il écrit sur Twitter.
C’est alors que l’ancien député FL, Fady Karam, a répondu au leader du CPL, toujours sur le réseau social. « Ne te prends pas pour le propriétaire de la République, tes falsifications ne serviront à rien et la plus grande preuve ce sont les résultats des dernières législatives au cours desquelles tu as été obligé de compter sur un grand nombre d’indépendants pour cacher ta faiblesse », a-t-il souligné, accusant M. Bassil d’avoir « essayé d’isoler » les FL.
Contacté par L’Orient-Le Jour, Fady Karam a déclaré que « les FL ne peuvent pas être encerclées et réduites à moins qu’elles ne sont ». « M. Bassil doit comprendre que le partenariat est la meilleure façon de gouverner et non pas le fait de mettre la main sur tous les portefeuilles. Dans tous les cas, ce n’est pas M. Bassil qui composera le gouvernement, mais le Premier ministre, Saad Hariri », a-t-il dit. Selon M. Karam, l’accord de Meerab passé avec le président de la République, Michel Aoun, en décembre 2016 stipule que les FL et le CPL sont « partenaires », ce qui signifie qu’ils devraient obtenir des parts équitables au sein du gouvernement. « Nous n’avons pas encore demandé de ministère particulier, mais il nous importe de travailler dans un partenariat sincère et efficace », a-t-il ajouté.
(Lire aussi : Hariri face à la guerre d’influence interchrétienne...)
« Les chiffres des FL ne sont pas corrects »
Interrogé par L’OLJ, Ziad Assouad, député CPL de Jezzine, a estimé que les chiffres avancés par les FL concernant la taille de leur électorat « ne sont pas corrects ». « Les FL ne peuvent pas se considérer égales au CPL si elles ne sont pas égales en termes de chiffres », a-t-il dit. « Ils disent que l’accord de Meerab a parlé d’équité au niveau des sièges, mais ce n’est pas parce qu’ils le disent que c’est vrai », a-t-il lancé.
Ziad Assouad a rejeté par ailleurs les plaintes des FL qui dénoncent un « isolement » pratiqué à leur encontre par le CPL. « Il y a une différence en terme de chiffres et de tailles qui ne sont pas en rapport avec l’isolement. L’usage du terme “isolement” n’a pas lieu d’être », a-t-il souligné. Il a ensuite laissé entendre que les FL pouvaient se joindre à l’opposition si elles n’étaient pas satisfaites de l’ordre des choses. « Si on veut corriger quelque chose à l’intérieur du gouvernement, on le fait dans l’opposition, on ne le critique pas de l’intérieur. Ceux qui pensent pouvoir torpiller le gouvernement de l’intérieur se trompent », a-t-il poursuivi.
Mario Aoun, député de Chouf-Aley du CPL, a pour sa part appelé les FL « à être ouvertes par rapport aux réalités concernant la taille de leur représentation au Parlement ». « Les FL ne peuvent pas être à égalité avec le CPL, car il représente le double de leur taille », a-t-il indiqué à L’OLJ, avant de tempérer ses propos : « Nous ne voulons personne hors du gouvernement, nous voulons un gouvernement d’union nationale. »
(Lire aussi : Trois nœuds pour la formation du gouvernement, mais des tractations rapides, le décryptage de Scarlett HADDAD)
Majorité et minorité
Pour l’analyste politique Élias Zoghbi, « il est clair qu’il y a volonté de réintroduire le principe de majorité et de minorité au sein du gouvernement ». « Le bloc du Liban fort (emmené par Gebran Bassil) veut éloigner les souverainistes du gouvernement en prenant les chiffres électoraux pour prétexte alors que les FL ont prouvé le poids de leur présence populaire et politique à travers les législatives », a-t-il estimé dans un entretien à L’OLJ.
M. Zoghbi a par ailleurs insisté sur le fait que l’accord de Meerab comportait « un accord passé directement avec Michel Aoun sur le partage équitable des portefeuilles ». « Le problème est celui de la cupidité du CPL qui veut 12 ministres (7 pour le CPL et 5 pour le président) », a déclaré l’analyste. Selon lui, les FL ont obtenu des votes lors des législatives « par leurs propres moyens » alors que le CPL a obtenu ses voix « grâce à ses alliés et non pas uniquement grâce à son public ». Si le CPL se targue aujourd’hui d’avoir un bloc de 29 députés, il feint d’ignorer que ses alliés pourraient l’un après l’autre s’éloigner de lui, selon M. Zoghbi.
« Le président est lié à un bloc parlementaire, donc rien ne justifie qu’il choisisse des ministres », a indiqué M. Zoghbi, qui a en outre critiqué la suggestion du chef des FL, Samir Geagea, de créer un duopole chrétien à l’image du tandem chiite Amal-Hezbollah. « Se mesurer au duopole chiite qui monopolise la représentativité de la confession chiite est malsain. Ce genre de raisonnements est contraire à la spécificité du Liban », a-t-il estimé.
Lire aussi
Les doléances des différentes parties ne devraient pas retarder la formation du gouvernement
Aoun appelle à former rapidement un gouvernement d’union nationale
SI JE PEUX ME PERMETTRE ... LE HAKIM QUAND IL DIT VOULOIR FAIRE COMME LA COMMUNAUTE CHIITE CELA NE VEUT PAS DIRE L'IMITER DANS LA DICTATURE OU L'AUTORITARISME .. MAIS IL VEUT RASSEMBLER LES CHRETIENS DANS SA FORME LA PLUS PURE ET LA PLUS JUSTE !!! meme mr Zoghby n'a pas compris le fond de ce que veux le hakim .. VOUS N'ALLZ JAMAIS VOIR LES FL MENACER OU DECOURAGER LES GENS A SE PRESENTER AUX LEGISLATIVES COMME ON A VUE FAIRE CERTAINS
15 h 52, le 28 mai 2018