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Économie - Finances publiques

Budget 2018 : le Conseil constitutionnel abroge l’amnistie fiscale et l’article 49

Seul l’article 26 prévoyant une amnistie fiscale sur le règlement de l’impôt sur le revenu a été invalidé aussi bien sur la forme que sur le fond.

Le fronton du siège du Conseil constitutionnel, à Beyrouth. Photo ANI

Le Conseil constitutionnel a décidé hier d’abroger sept articles de la loi de finances de 2018, suite à un recours déposé le 24 avril par dix députés sortants, dont le président du parti Kataëb, Samy Gemayel. « C’est une victoire de la Constitution ! », s’est réjoui auprès de L’Orient-Le Jour Lara Saadé, la conseillère juridique de Samy Gemayel, qui a rédigé le recours.

Sur les sept articles du budget invalidés par le CC, seul l’article 26 prévoyant une amnistie fiscale sur le règlement de l’impôt sur le revenu sur la période 2011-2016 l’a été aussi bien sur la forme que sur le fond, notamment en raison de sa violation du principe d’équité et d’égalité des citoyens devant l’impôt. Le CC invoque tout d’abord le principe d’égalité des droits et des devoirs des citoyens et les principes fondateurs de justice sociale et d’égalité consacrés par le préambule de la Constitution, ainsi que l’article 7 sur l’égalité des citoyens devant la loi, pour justifier cette invalidation. Il considère également que « l’article 26 du budget opère une distinction entre les Libanais, en faveur de ceux qui ne s’acquittent pas de leur obligation de payer leurs impôts en vertu de la loi, en les exemptant du paiement d’une partie de ces impôts, tandis que d’autres citoyens ont, dans une situation juridique similaire, payé les montants dus dans les délais impartis ». Le CC va plus loin en estimant que cette amnistie fiscale aurait eu pour effet « d’encourager les citoyens à ne pas payer leurs impôts et d’obliger ceux qui se sont toujours acquittés de leurs impôts à ne plus le faire dans l’espoir de voir de nouvelles lois d’exonération fiscale promulguées ».

Le président de l’Association libanaise pour les droits et l’information des contribuables (Aldic), l’avocat fiscaliste Karim Daher, qui avait vivement dénoncé cette mesure, voit dans la décision du CC « un tournant historique ». « C’est un message clair pour les lobbies d’affaires, financiers et immobiliers qui ont été déboutés. L’État de droit n’a pas disparu », a-t-il déclaré à L’Orient-Le Jour. Le président sortant de la commission des Finances et du Budget, le député CPL Ibrahim Kanaan, confie à L’Orient-Le Jour qu’il approuve la décision du CC sur l’article 26. « Nous l’avions maintenu dans le budget car le ministère des Finances nous avait assuré que cela permettrait une hausse significative des recettes (à moyen terme), mais nous avions tout de même exprimé notre opposition à cette mesure dans nos recommandations », a-t-il indiqué.


(Pour mémoire : Budget 2018 : Samy Gemayel parraine un recours en invalidation auprès du Conseil constitutionnel)


Cavaliers budgétaires
Les six autres dispositions du budget abrogées par le CC l’ont été sur un principe de forme, puisqu’elles ont été qualifiées de cavaliers budgétaires (devant faire l’objet de lois distinctes) et de mesures ne respectant pas les principes généraux du budget, dont celui de l’annualité. Il s’agit de l’article 14 sur les nominations des membres des autorités de régulation ; l’article 35 portant sur les régularisations face aux infractions aux lois de l’urbanisme ; l’article 43 sur la suppression ou la fusion d’institutions publiques ; l’article 51 portant sur les horaires de travail de la fonction publique ; l’article 52 sur les vacances judiciaires ; et également l’article 49 permettant à tout étranger faisant l’acquisition d’un domicile au Liban d’obtenir un titre de séjour. Cet article avait dans un premier temps était suspendu fin avril par le CC, quelques jours seulement après le dépôt du recours, en raison de la polémique qu’il avait soulevée.

Car si le CC n’a abrogé l’article que sur le principe de forme, sans s’exprimer sur le fond, le recours déposé par les dix députés soulevait également le risque de voir cette mesure détournée puisqu’elle permettrait « une quasi-naturalisation » des propriétaires de ces biens immobiliers et de leurs familles, ce qui est « contraire aux dispositions du préambule de la Constitution interdisant l’implantation ». Selon M. Kanaan, le fait que le CC ait choisi de ne pas se prononcer sur le fond de cet article « met fin à la polémique initiée par les Kataëb à des fins électorales ».

Par ailleurs, le CC a également condamné les violations constitutionnelles soulevées par le recours, concernant le non-respect des délais constitutionnels dans le vote du budget et des lois de règlement, conformément à l’article 87 de la Constitution, mais a estimé que cela ne « constituait pas une raison valable pour invalider (l’ensemble) de la loi de finances de 2018 ». Un argument qui n’a pas fait l’unanimité au sein du CC, puisque sur les dix membres, le vice-président de l’institution, le juge Tarek Ziadé, s’est opposé à la décision du CC. Il a estimé que la violation de l’article 87 devrait se traduire par une invalidation du budget. « Le CC n’a pas souhaité invalider l’ensemble du budget simplement car il ne souhaitait pas entraver le fonctionnement des finances publiques en cette période de vide institutionnel », a expliqué à L’Orient-Le Jour Lara Saadé.



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