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Culture - Bipod

Est-ce que l’on danse le flamenco, ou est-ce que l’on est flamenco ?

Après dix-neuf spectacles de danses déroutants dans leur diversité et leur facture particulière, le festival a clôturé hier soir à D-Beirut Warehouse sa 14e édition avec Israël Galvan, dans un spectacle seul et sans musique, « Solo ».

©Luis Castilla Fotografia

Né dans les milieux obscurs et malfamés au début du XIXe siècle, le flamenco appartient à la culture de l’Espagne, mais a souvent été controversé et considéré par les intellectuels en 1889 comme symptôme de décadence morale, tout en étant apprécié par les romantiques. Mais la véritable culture, c’est l’œuvre d’art qui se détache, celle qui se détermine par sa singularité et son universalité. Issue au départ d’une géographie particulière, la mazurka de Chopin ou les valses de Strauss, elle accède à l’universalité parce qu’elle est mélange de particularités et de génie. C’est à cette forme de culture et d’art qu’appartient Israël Galvan parce qu’il a fait de son flamenco un style propre à lui, dans un univers parallèle qui reste fondamentalement le sien.


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Dictature du rythme
Le danseur et chorégraphe espagnol Israël Galvan de los Reyes est né en 1973 à Séville de parents tous deux célèbres danseurs de flamenco à Séville. Il intègre la Compañía Andaluza de danza dirigée par Mario Maya en 1994, travaille avec Manuel Soler et, en 1998, fonde sa propre compagnie. Il accumule prix et distinctions, et, en 2016, il est nommé officier dans l’ordre des Arts et Lettres. Sur la plateforme improvisée du D-Beirut Warehouse, malgré un public soi-disant éclectique et averti, mais désespérément irrespectueux, entre sonnerie de portable ou lumière aveuglante de messageries, Israël Galvan a une fois de plus réinventé le flamenco dans une performance exceptionnelle faite de prouesses complexes, de mouvements saccadés, et un mélange d’enthousiasme fantaisiste et de technique maîtrisée. Sa prestation dépasse le champ traditionnel et la gestuelle classique, et lorsque ses pieds piétinent et ses mains tambourinent sur son ventre ou sur ses hanches, son corps tendu et nerveux dessine des formes extraordinaires et un style résolument contemporain. Et quand il paraît courir, marcher ou galoper, il semble fendre l’air, dévorer l’espace et presque voler. Israël Galvan casse les codes de la danse avec une liberté toujours plus folle et plus affirmée, et les repousse dans ses plus lointaines limites.


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Le corps comme orchestre
La musique est l’une des principales caractéristiques de la danse flamenco en général et de la danse d’Israël Galvan en particulier qui se considère lui-même tout autant danseur que musicien. Il précise que le flamenco est une des rares danses où le danseur est à la fois musicien et danseur. Dans son spectacle Solo, il s’accompagne lui-même comme musicien en produisant sa propre musique avec la frappe des pieds, le claquage des mains, utilise un bout de moquette pour produire des sons sortis des profondeurs ou le sol de la scène qu’il balaye de ses genoux. Tout son corps produit du rythme et du son, et les bruits que sa bouche laisse échapper entraînent le spectateur dans des effets de percussion maîtrisée. Avant de monter sur les planches, l’artiste raconte à L’Orient-Le Jour que l’idée de Solo est née suite à un incident sur scène où l’arrêt de la musique l’a laissé désarmé, comme tétanisé. Il prend alors conscience qu’il lui fallait produire sa propre musique. « Depuis sa création, ajoute Israël Galvan, Solo ne cesse d’évoluer et d’ajouter, il est à chaque fois le témoin de ce que je suis en train de vivre et de développer comme travail, toujours dans des espaces insolites et inhabituels (les jardins du musée Picasso ou la Fondation Calder de New York). Ce spectacle a pour but de partager une certaine proximité avec le spectateur dans une parfaite osmose. » Pour Israël Galvan, danser le flamenco, c’est adhérer à une religion, c’est entrer dans les ordres, mais aussi les renverser et s’inventer sa propre foi et s’ouvrir à un nouveau monde.


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commentaires (1)

Pure esthétique, emotions, expressions, partage.... Enflammés.

Sarkis Serge Tateossian

09 h 42, le 28 avril 2018

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Commentaires (1)

  • Pure esthétique, emotions, expressions, partage.... Enflammés.

    Sarkis Serge Tateossian

    09 h 42, le 28 avril 2018

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