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Liban - Baalbeck-Hermel

La loi d’amnistie, moyen d’apaisement ou atout électoral ?

Plus de 1 200 personnes faisant l'objet de trente-sept mille mandats d'arrêt seraient concernées par la mesure, face à laquelle des juristes se montrent sceptiques.

Bachir Khodr, mohafez de la Baalbeck-Hermel.

Il est question actuellement d'une nouvelle loi d'amnistie qui éteindrait l'action publique à l'encontre d'auteurs de crimes commis dans la région de Baalbeck-Hermel. C'est ce qu'a annoncé mercredi le mohafez Bachir Khodr, appelant les personnes faisant l'objet d'un mandat d'arrêt dans cette région à se rendre à la justice en vue de profiter de cette amnistie qui pourrait bientôt être décrétée. Quelle autorité a le pouvoir d'annuler le caractère d'infractions à des actes censés être sanctionnés par la loi ? Dans quel contexte l'amnistie pourrait-elle être décidée ? Quels sont les délits et crimes qui seraient concernés par une telle mesure ?

Une source administrative haut placée, contactée par L'Orient-Le Jour, indique que le Parlement est en effet sur le point de voter une loi d'amnistie dont devraient bénéficier 1 200 à 1 500 personnes recherchées dans la localité de Baalbeck-Hermel, en vertu de 37 000 mandats d'arrêt. Parmi les actes qui leur sont imputés, la culture de plantes illicites, les tirs anarchiques, le vol du courant électrique et d'autres méfaits, délits et infractions. Pour ce qui est de la collaboration avec l'ennemi, la source estime que ce point serait source de controverses au sein de la Chambre des députés, et ne devrait donc pas relever de la future loi d'amnistie.

Interrogé sur la raison du timing choisi pour annuler ces infractions et par conséquent les sanctions qui pourraient en découler, ce haut fonctionnaire estime que le Parlement tente de parvenir à l'adoption de la loi d'amnistie avant les élections législatives prévues le 6 mai, parce-que, affirme-t-il, en la votant, « les députés verraient le nombre de leurs électeurs augmenter ». Il évoque, dans ce cadre, le même avantage qu'obtiendraient les candidats parlementaires qui œuvrent pour l'amnistie des islamistes recherchés à Tripoli et Saïda, ceux-ci et leurs familles constituant, selon lui, une masse considérable de votants.

S'il reconnaît que la loi d'amnistie pourrait ouvrir une nouvelle page entre l'État et les auteurs d'infractions qui se considèrent délaissés et défavorisés, ce fonctionnaire juge cependant que pour une amélioration de la situation sécuritaire, il faudrait que ces délinquants reconnaissent leur faute et fassent preuve d'une volonté de ne plus récidiver. Il faudrait aussi une période de probation. Pour lui, c'est dans ce cadre que le mohafez de Baalbeck-Hermel a appelé les suspects à régulariser leur situation en se livrant à la justice.

 

(Lire aussi : Amnistie générale probable à Baalbeck-Hermel)

 

Cortbaoui et Tabbarah
L'ancien ministre de la Justice, Chakib Cortbaoui, doute pour sa part que la loi d'amnistie soit votée avant l'échéance électorale. « Tout comme certains députés pourraient bénéficier de l'adoption de cette mesure, d'autres, au contraire, auraient peur d'être perdants lors du prochain scrutin et chercheraient à entraver le vote de l'amnistie », estime-t-il, ajoutant qu'« il n'existerait pas, pour le moment, un projet ou une proposition de loi concrets en ce sens ».

M. Cortbaoui juge, en outre, qu'il n'y aurait pas lieu de voter une telle loi. « Généralement, une telle mesure est adoptée au lendemain d'une guerre civile, pour tourner la page », indique-t-il, affirmant qu'« il est contraire au droit et à l'éthique d'y avoir recours sans aucun motif ». Or, selon lui, « les considérations politiques ou encore le prétexte d'une surpopulation carcérale ne représentent en aucun cas un motif valable ». Il insiste, dans ce cadre, sur le fait que « tout auteur d'un délit ou crime devrait assumer la responsabilité de son méfait ».

Bahige Tabbarah, un autre ancien ministre de la Justice, estime lui aussi que « la loi d'amnistie a des explications politiques plutôt que juridiques ». « Si la loi d'amnistie votée en 1991, au lendemain de la guerre civile, a été opportune pour effacer un passé douloureux, il est par contre inacceptable que chaque quelque temps, on vienne annuler des crimes et des délits en les catégorisant seulement sous le label de la période où ils ont été commis ».

 

 

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Il est question actuellement d'une nouvelle loi d'amnistie qui éteindrait l'action publique à l'encontre d'auteurs de crimes commis dans la région de Baalbeck-Hermel. C'est ce qu'a annoncé mercredi le mohafez Bachir Khodr, appelant les personnes faisant l'objet d'un mandat d'arrêt dans cette région à se rendre à la justice en vue de profiter de cette amnistie qui pourrait bientôt être...

commentaires (4)

A bien comprendre, le scélérat veut se faire garantir son élection grâce à tous les autres scélérats. Est-ce ainsi que les Libanais veulent faire évoluer leurs pays ? Choquant ? Non. Triste ? Certainement.

Remy Martin

14 h 53, le 12 janvier 2018

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Commentaires (4)

  • A bien comprendre, le scélérat veut se faire garantir son élection grâce à tous les autres scélérats. Est-ce ainsi que les Libanais veulent faire évoluer leurs pays ? Choquant ? Non. Triste ? Certainement.

    Remy Martin

    14 h 53, le 12 janvier 2018

  • Quand on découvre les trésors d'imagination que ces Messieurs-responsables, dont le Mohafez de Baalbeck-Hermel sont capables de développer pour leurs propres intérêts personnels, on se dit que si un petit pourcentage seulement de cette imagination était utilisée pour le développement de cette région, ça ferait des merveilles ! Et alors plus de méfaits...car les habitants auraient du travail, des revenus, de la dignité tout simplement... Irène Saïd

    Irene Said

    09 h 18, le 12 janvier 2018

  • APAISER... POUR PROFITER !

    LA LIBRE EXPRESSION

    08 h 52, le 12 janvier 2018

  • De mieux en mieux, on croit rêver ! "...parmi les actes qui leur sont imputés: la culture des plantes illicites, tirs anarchiques, vol du courant électrique etc. etc.!" Ce qui veut dire en clair que si on les amnistie, ils continueront ces méfaits bien tranquillement, sachant qu'ils ne seront pas punis. Et que vive et soit encouragée de cette façon l'indiscipline libanaise...pour augmenter les voix aux...prochaines législatives, si elles auront effectivement lieu ?! Irène Saïd

    Irene Said

    08 h 42, le 12 janvier 2018

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