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Économie - Repères

Les dossiers économiques en suspens depuis la démission de Hariri

Outre le blocage du dossier des hydrocarbures offshore, l'adoption du projet de budget 2018 et le lancement de plusieurs projets d'infrastructure sont notamment compromis.

Le Grand Sérail, siège de la présidence du Conseil des ministres. Mohammad Azakir/Reuters

Depuis la démission surprise du Premier ministre Saad Hariri le 4 novembre depuis Riyad, l'incertitude règne quant au sort du gouvernement. La probabilité de voir cette crise politique s'enliser fait craindre un nouveau blocage institutionnel, qui mettrait notamment en suspens bon nombre de dossiers économiques. Focus sur quatre des principaux projets concernés.

 

L'adoption du projet de budget pour l'exercice 2018
Après le vote du budget de l'exercice 2017 au Parlement le 19 octobre dernier, le premier depuis celui de 2005, le gouvernement devait recevoir l'avant-projet de budget de 2018, afin de l'examiner et le transmettre au Parlement. « Nous étions en train de travailler là-dessus, mais depuis la démission de Saad Hariri, le dossier est en suspens », a confié à L'Orient-Le Jour une source au ministère des Finances.
Les appels au vote du budget prévisionnel pour l'exercice 2018 dans les délais constitutionnels s'étaient pourtant multipliés avant la crise politique, du président de la République Michel Aoun au gouverneur de la Banque du Liban, Riad Salamé.

D'autant plus que, selon le président de la commission des Finances, le député Ibrahim Kanaan, une importante partie du travail de sa commission concernait des réformes d'assainissement des comptes publics qui devaient être mises en œuvre dans le budget de 2018. « Plusieurs des réductions budgétaires identifiées par la commission n'ont pas pu être réalisées en 2017, car nous avions reçu le projet de budget avec sept mois de retard. Une part importante des dépenses initialement prévues ont déjà été décaissées », s'était désolé début octobre M. Kanaan. Il s'était néanmoins réjoui que le ministère des Finances se soit engagé à prendre en compte ses recommandations lors de l'élaboration de l'avant-projet de budget de 2018.

 

(Lire aussi : Hydrocarbures offshore : Abi Khalil écarte toute possibilité de retard dans la procédure)

 

L'exploitation des gisements offshore de pétrole et de gaz
Bien que le ministre de l'Énergie et de l'Eau, César Abi Khalil, ait tenté ces derniers jours de nier tout possible blocage de la procédure d'attribution des licences d'exploration et de production des hydrocarbures offshore en raison de la démission de Saad Hariri, le risque existe bel et bien.

Le 12 octobre, un consortium composé de deux opérateurs, le géant français Total et l'italien ENI, et d'un non-opérateur, la compagnie russe Novatek, avait soumis à l'Autorité de l'énergie (LPA) deux offres distinctes pour deux des blocs de la zone économique exclusive (ZEE) libanaise. La LPA avait déjà envoyé, il y a plus de trois semaines, son évaluation et ses recommandations sur les deux offres au ministre de l'Énergie. Ce dernier les avait approuvées et était sur le point de les transmettre au Conseil des ministres afin d'obtenir un accord préalable du gouvernement avant de commencer les négociations avec le consortium. Mais, suite à la démission surprise de Saad Hariri et au flou entourant l'avenir de l'actuel gouvernement, M. Abi Khalil a décidé la semaine dernière de passer outre à cet accord préalable du Conseil des ministres et invité le consortium à entamer les négociations sur leurs offres techniques. Cependant, si le protocole de l'appel d'offres (décret 43/2017) n'oblige pas légalement M. Abi Khalil à obtenir cet accord préalable, il devra toutefois demander au Conseil des ministres l'autorisation de signer les contrats d'exploration et de production avec le consortium, une fois les négociations abouties.

 

(Lire aussi : Hausse des eurobonds après l’interview de Hariri)

 

La modernisation des infrastructures via les PPP
Réclamée depuis une dizaine d'années par de nombreux acteurs du secteur privé, des organisations internationales et une partie de la classe politique, la loi sur les partenariats public-privé (PPP) a été finalement votée le 16 août au Parlement. Ce dispositif permet aux autorités publiques de faire appel à des prestataires privés afin de financer, construire, rénover ou gérer des équipements assurant un service public, mais sa mise en œuvre semble également compromise tant que le sort du gouvernement Hariri n'est pas fixé. La loi permet au Premier ministre – qui préside le Haut Conseil pour la privatisation et les partenariats (HCPP) –, au ministre concerné, au président d'une municipalité ou d'une fédération de municipalités de proposer un projet de PPP au HCPP. Un comité de pilotage du projet est ensuite créé, regroupant le secrétaire général du HCPP, le ministre concerné, un représentant du ministère des Finances et le président de l'autorité de régulation du secteur. Un accord du Conseil des ministres est requis avant le lancement d'un appel public à manifestation d'intérêt à l'égard du secteur privé.

Contacté par L'Orient-Le Jour, le secrétaire général du HCPP Ziad Hayek confirme que « tous les projets sont en suspens, en attendant une solution politique ». « Nous avions déjà préparé les études concernant plusieurs projets – dont celui de l'autoroute Khaldé-Nahr Ibrahim, de l'expansion de l'aéroport international de Beyrouth, d'un projet de transport en commun dans le Grand Beyrouth... – et nous étions sur le point de signer des contrats avec des cabinets de conseil spécialisés pour l'élaboration des cahiers des charges. C'est impossible en l'absence du Premier ministre », s'est désolé M. Hayek.

 

L'appel d'offres pour la location des navires-centrales
Déjà ponctué de nombreuses irrégularités, l'appel d'offres pour la location temporaire de deux navires-centrales de 400 mégawatts chacun pour le compte d'Électricité du Liban est une nouvelle fois bloqué en raison de la crise politique actuelle. Une commission ministérielle présidée par Saad Hariri était chargée d'y trouver une issue.

Le 30 octobre, la commission mixte nommée par la Direction des adjudications (DDA) et par le ministère de l'Énergie et de l'Eau pour évaluer les candidatures a recalé les dossiers de trois des quatre sociétés encore en lice. Elle avait estimé que les offres des trois sociétés libanaises – BBE, Younis et MEP – n'étaient pas conformes au volet administratif du cahier des charges. La seule offre recevable était celle de la société turque Karadeniz à qui l'État loue, depuis 2013 et jusqu'en 2018, deux navires-centrales déployant 370 MW, déployés à Zouk et Jiyeh. La commission mixte avait alors estimé que la procédure ne garantissait pas la concurrence, dans la mesure où un seul dossier a passé le cap de l'évaluation administrative.
La procédure n'étant pas officiellement annulée, malgré ces irrégularités, la commission mixte a décidé de passer le relais à une autre commission ministérielle formée le 20 octobre. Cette dernière est présidée par Saad Hariri (courant du Futur) et comprend notamment le ministre de l'Énergie César Abi Khalil (CPL), celui des Finances Ali Hassan Khalil (Amal), des Travaux publics et des Transports Youssef Fenianos (Marada), ou encore de la Jeunesse et des Sports Mohammad Fneich (Hezbollah). Mais la démission de M. Hariri semble avoir changé la donne.

 

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