Rechercher
Rechercher

À La Une - Diplomatie

L'offensive de Trump offre une fenêtre de tir à Macron

"Il y a l'homme moderne, responsable modéré, qui parle de manière raisonnable face à un homme qui est lui prêt à détruire la Corée du Nord et à revenir sur des accords internationaux", selon Dominique Moïsi.

Le président français, Emmanuel Macron, serrant la main de son homologue américain, Donald Trump, à New York, le 18 septembre 2017. REUTERS/Kevin Lamarque

Le discours belliqueux de Donald Trump, qui s'en est violemment pris à la Corée du Nord et à l'Iran mardi à l'ONU, offre une fenêtre de tir à Emmanuel Macron pour se positionner en tant que médiateur sur la scène internationale, estiment des analystes.

"Les excès assez incroyables de Donald Trump ont donné à l'intervention d'Emmanuel Macron une dimension plus rassurante et à laquelle une grande partie des Etats parmi lesquels certains émergents vont spontanément se rallier", estime Bertrand Badie, spécialiste des affaires internationales. "L'accueil a été plutôt favorable si l'on en croit certains applaudissements et l'attitude des Etats qui y siégeaient", ajoute-t-il. "La prochaine étape va consister à mesurer l'influence de la France et de ce type de discours, de voir quel suivi la France sera en mesure d'assurer et si sa diplomatie sera assez forte pour porter ce message".

En l'espace de quelques heures, les présidents américain français, qui effectuaient leurs premiers pas sur la scène onusienne, ont livré deux visions du monde aux antipodes. Face à l'"Amérique d'abord" et aux menaces de "détruire totalement" la Corée du Nord de Donald Trump, Emmanuel Macron a répondu "multilatéralisme", "dialogue" et "action diplomatique". Le chef de l'Etat a notamment pris la défense de deux accords internationaux - sur le climat et sur le nucléaire iranien - dont la mise en œuvre est fragilisée par leur remise en cause par l'administration américaine.

Emmanuel Macron "s'offre comme une alternative, un substitut à Donald Trump en disant 'certes la France n'est pas l'Amérique mais il y a une place à prendre pour incarner le multilatéralisme, la responsabilité, la modération, le modèle démocratique libéral"", souligne Dominique Moïsi. "Il y a l'homme moderne, responsable modéré, qui parle de manière raisonnable face à un homme qui est lui prêt à détruire la Corée du Nord et à revenir sur des accords internationaux", poursuit le spécialiste des relations internationales.

Contrairement à l'espace dont disposait François Hollande face à Barack Obama, celui dont dispose Emmanuel Macron face à Donald Trump est infiniment plus grand", note Dominique Moïsi. "Le calendrier est par ailleurs assez favorable : cette succession d'ouragans force quand même les dirigeants à se poser la question du réchauffement climatique".

 

(Lire aussi : Trump à l’assaut (verbal) de la forteresse iranienne)

 

Parler à tout le monde
Depuis son élection, Emmanuel Macron, qui cherche à renforcer l'influence de la France sur la scène internationale, a multiplié les contacts avec ses homologues sur les gros dossiers diplomatiques, de la Corée du Nord à la Syrie, en passant par l'Ukraine et la crise dans le Golfe.

"La force de notre diplomatie, c'est cette capacité à parler à tous", a souligné le chef de l'Etat fin août en présentant les grandes lignes de sa politique étrangère devant les ambassadeurs de France réunis à Paris. Emmanuel Macron assume ainsi de recevoir en grande pompe successivement Vladimir Poutine sous les ors du Château de Versailles et Donald Trump sur les Champs-Elysées pour le défilé du 14-Juillet, quitte à froisser une partie de l'opposition et les organisations de défense des droits de l'homme.

Avec son homologue américain, le chef de l'Etat a pris soin ces derniers mois de ne pas couper le lien en dépit des désaccords, insistant sur les convergences - la lutte contre le terrorisme - et jouant la carte de l'"amitié". "Emmanuel Macron est à la fois le modèle face à l'anti-modèle qu'est Donald Trump mais en tant que modèle il reste fidèle aux valeurs occidentales", souligne Dominique Moïsi. "L'Amérique n'est plus tout à fait l'Amérique mais les valeurs qu'elle porte sont éternelles, la démocratie, le multilatéralisme, etc.", ajoute-t-il.

 

(Lire aussi : Macron : Assad est un « criminel », mais c’est aux Syriens de choisir)

 

Parler au nom de l'Europe
Au-delà des interrogations de la communauté internationale sur la politique de Donald Trump, Emmanuel Macron pourrait également tirer profit d'un contexte post-Brexit qui va faire de la France le seul pays européen membre permanent du Conseil de sécurité de l'ONU doté de l'arme nucléaire. Une fois le Brexit acté, la France deviendra également le seul pays européen doté de réelles capacités de projection sur les théâtres d'opérations extérieures.

Reste à déterminer dans quelle mesure le message du chef de l'Etat à la tribune de l'ONU sera audible. En l'absence de volonté réelle américaine sur le dossier syrien, la marge de manœuvre de la France apparaît en effet pour l'heure limitée sur ce sujet dont Paris a pourtant fait l'une des ses priorités.

"Tout dépend de la crédibilité et de la légitimité d'Emmanuel Macron en France : plus il apparaît solide sur le plan national, plus il est capable d'imposer les réformes économiques et sociales et plus sa parole portera à l'étranger", estime Dominique Moïsi. "L'autre question qui se pose, c'est de savoir s'il parlera au nom de la France seulement ou au nom de l'Europe", ajoute-t-il à l'heure où Emmanuel Macron veut faire de l'Europe "le leader du monde libre". "Il a une opportunité mais tout va dépendre de ce qu'il se passera" sur la scène internationale dans les mois qui viennent.

 

 

Lire aussi

« Pas d’angélisme » contre « le terrorisme islamiste », annonce Macron

Avec Macron, la France veut être une puissance médiatrice au M-O

À New York, Aoun évoquera les réfugiés, le dialogue des religions et la lutte contre le terrorisme

Rencontre Sissi-Netanyahu : l'Égypte veut revenir sur le devant de la scène régionale

Que donnera cette année le rassemblement diplomatique le plus couru de la planète ?

Le discours belliqueux de Donald Trump, qui s'en est violemment pris à la Corée du Nord et à l'Iran mardi à l'ONU, offre une fenêtre de tir à Emmanuel Macron pour se positionner en tant que médiateur sur la scène internationale, estiment des analystes.
"Les excès assez incroyables de Donald Trump ont donné à l'intervention d'Emmanuel Macron une dimension plus rassurante et à laquelle...

commentaires (0)

Commentaires (0)

Retour en haut