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À La Une - France

Choc frontal Macron-Le Pen lors d'un débat télévisé crucial

Marine Le Pen a attaqué d'emblée son rival, le qualifiant de candidat "de la guerre de tous contre tous", tandis que celui-ci l'accusait de "porter l'esprit de défaite".

Emmanuel Macron et Marine Le Pen lors d'un face à face télévisé à quatre jours du deuxième tour de la présidentielle française. REUTERS/Eric Feferberg/Pool

Choc frontal et virulent mercredi soir lors du débat télévisé entre les deux finalistes de la présidentielle française: la candidate d'extrême droite Marine Le Pen a reproché à Emmanuel Macron de porter "la mondialisation sauvage", le candidat pro-européen l'accusant de "haine" et de "mensonges".
A quatre jours du second tour décisif dimanche, les échanges entre les deux candidats - aux programmes diamétralement opposés - ont souvent viré à la cacophonie et au pugilat verbal, au terme d'une campagne très tendue.


"M. Macron est le candidat de la mondialisation sauvage, de l'ubérisation, de la précarité, de la brutalité sociale, de la guerre de tous contre tous, du saccage économique notamment de nos grands groupes, du dépeçage de la France par les grands intérêts économiques, du communautarisme, et tout cela piloté par M. Hollande qui est à la manoeuvre maintenant de la manière la plus claire qui soit", a dénoncé la candidate FN, qui avait la parole en premier.
Mme Le Pen a également estimé dans son introduction que "les Français ont aussi pu voir le vrai mMacron dans ce second tour: la bienveillance a fait place à la médisance, la stratégie marketing a été reprise en main par la machine du PS, et puis le sourire étudié se transforme en rictus au fur et à mesure des meetings".
A ses yeux, "l'enfant chéri du système et des élites en réalité a tombé le masque".

 

(Lire aussi : Plagiat de Marine Le Pen : erreur grossière de com' ?)


"Vous avez démontré que vous n'êtes en tout cas pas la candidate de l'esprit de finesse, de la volonté d'un débat démocratique, équilibré et ouvert", a répliqué le candidat d'En Marche! "Je ne vais pas vous dire que vous êtes la véritable héritière non seulement d'un nom, d'un parti politique, du parti politique de l'extrême droite française, de tout un système qui prospère sur la colère des Français depuis tant et tant d'années", a ajouté M. macron, "parce que ça ne m'intéresse pas".
"Ce que vous portez, c'est l'esprit de défaite, c'est d'expliquer à nos concitoyens que c'est trop dur la mondialisation pour nous, c'est trop dur l'Europe, donc on va se replier, on va fermer les frontières, on va sortir de l'euro, de l'Europe parce que les autres y arrivent mais pas nous", a poursuivi l'ancien ministre de l'Economie, évoquant également la luttre contre le terrorisme.
"Face à cet esprit de défaite, moi je porte l'esprit de conquête français, parce que la France a toujours réussi et a toujours réussi dans le monde (...), sa langue se parle sur tous les continents, son histoire, sa civilisation, ce qui fait sa force, c'est précisément qu'elle rayonne partout, (...) nous sommes forts dans le monde", a-t-il plaidé.

 

Affaire Whirlpool

L'épisode emblématique de l'entre-deux-tours, la visite à l'usine Whirlpool d'Amiens le 26 avril, a été vite remis sur le tapis, au milieu de nombreux dossiers économiques : Emmanuel Macron a accusé Marine Le Pen d'avoir "profité de la détresse des gens" lors de sa venue sur le site de l'usine. "Jamais, jamais je n'ai fait ce que vous avez fait l'autre jour, c'est-à-dire aller profiter de la détresse des gens", a déclaré le candidat d'En Marche!.
L'ancien ministre de l'Economie a été le premier à rappeler cet épisode de la campagne, accusant la candidate du Front national d'être allée "passer un quart d'heure" sur le parking de l'usine "pour faire des selfies (...) avec les salariés".
"Ne soyez pas méprisant", lui a rétorqué Mme le Pen. "J'ai passé du temps avec eux. Ils m'ont très bien accueillie, parce qu'ils savent que ce qui les tue c'est la politique que vous menez (...) c'est la politique qui fait que l'Etat stratège n'intervient pas, laisse encore une fois les gros manger les petits", a argumenté cette eurodéputée.
"Vous ne les respectez pas. Moi, j'ai entendu la colère. J'ai passé des heures avec eux (...) Je suis allé au contact des salariés. Parce que c'est ça respecter les gens. Pendant que vous faisiez votre numéro avec les caméras, moi j'étais avec les représentants des salariés parce que je les respecte", a riposté M. Macron.


Alors que Mme Le Pen a proposé, entre autres, de mettre en place un "fonds souverain" pour soutenir les entreprises en difficulté, M. Macron a rétorqué que "cela existe" déjà, à travers l'Agence des participations de l'Etat. "Vous dites n'importe quoi", a taclé l'ex-ministre, qui a repris Mme le Pen à plusieurs reprises sur les dossiers industriels au cours du débat.
"Je vois que vous cherchez à jouer avec moi l'élève au professeur, mais en ce qui me concerne ce n'est pas particulièrement mon truc", a grincé Mme Le Pen, dans une allusion à la relation de M. Macron avec son épouse.

 

Le Pen et l'euro

Sur le dossier européen, Emmanuel Macron a fustigé  le "bidouillage" de Marine Le Pen sur l'euro, qui révèle selon lui l'"impréparation crasse" de la candidate du Front national à l'élection présidentielle.

A quatre jours du second tour, Marine Le Pen a répété qu'elle voulait revenir au franc et expliqué qu'existerait en parallèle un euro "panier de monnaies" qui serait utilisé comme l'a été selon elle l'ECU. "C'est n'importe quoi Mme Le Pen, ça n'a jamais existé", a répliqué Emmanuel Macron. "Votre bidouillage (...) n'a aucun sens, d'ailleurs il manifeste une impréparation crasse", a-t-il ajouté.

Accusé par son adversaire de vouloir faire peur aux Français sur la sortie de l'euro, Emmanuel Macron lui a répondu : "la grande peur, qui la manipule depuis le début ? C'est vous." Sortir de l'euro, "c'est un projet mortifère et c'est un projet dangereux", a poursuivi Emmanuel Macron. "Ce que vous proposez, c'est la guerre des monnaies".

 

Fondamentalisme

Marine Le Pen a par ailleurs accusé Emmanuel Macron de "complaisance" sur le fondamentalisme islamique au cours d'un vif échange sur la sécurité et le terrorisme. Le lendemain de l'attentat sur les Champs-Elysées, "vous avez dit +je ne vais pas inventer dans la nuit un programme contre le terrorisme+", a lancé la candidate du Front national à son concurrent. "Non seulement vous n'avez pas de projet, mais en plus vous avez une complaisance pour le fondamentalisme islamiste", a-t-elle poursuivi.


"Vous êtes constamment dans l'invective", lui a rétorqué le candidat d'En Marche!, qui l'a accusée de "porter" la "guerre civile". "Je serai intraitable et je mènerai la lutte sur tous les plans, mais le piège qu'ils nous tendent, c'est celui que vous portez, c'est la guerre civile", a-t-il affirmé.


Un vif échange les avait auparavant opposés à propos de la déchéance de nationalité pour les personnes liées au fondamentalisme islamique.
"Il faut que l'on expulse tout de suite les fichiers S étrangers qui sont sur notre territoire. Tous ceux qui, étrangers sur notre territoire, ont un lien avec le fondamentalisme islamiste, dehors, dehors ! Tous ceux qui sont doubles nationaux, on mettra en oeuvre la déchéance nationale", a déclaré Mme Le Pen.
M. Macron a affirmé pour sa part que "les terroristes que l'on veut combattre, et que j'éradiquerai, ce sont des gens qui se suicident dans les attentats". "Quelqu'un qui est dans cette disposition d'esprit, vous pensez que la déchéance nationale brandie par Mme Le Pen ça le fait trembler ?", s'est-il interrogé.
Emmanuel Macron a soutenu que la lutte contre la menace terroriste sera sa "priorité". "Les fichiers S ce sont des fichiers de renseignement", donc "tous les mettre en prison ou hors des frontières n'aurait pas de sens".
"La clé c'est de renforcer le renseignement", a-t-il dit, affirmant vouloir "reconstituer les forces de renseignement".

 

 

Les retraites

Emmanuel Macron a également attaqué Marine Le Pen sur son revirement quant à l'application de la retraite à 60 ans, que la candidate du FN ne prévoit plus d'appliquer immédiatement si elle est élue.
"Mme Le Pen propose de partir à 60 ans. Elle proposait naguère qu'on puisse le faire dès son élection, maintenant elle a reporté la chose", a pointé le candidat d'En Marche!.
Lors du débat, sa rivale du Front national s'est engagée à mettre en place la retraite à 60 ans, moyennant 40 annuités de cotisations, "d'ici la fin du quinquennat". "Non, ça n'a pas changé" quant à la date, a-t-elle affirmé, interpellée par M. Macron.
"C'était dans les deux mois il y a quelques semaines" que cette réforme devait être lancée, a martelé son opposant. "Le plus vite sera le mieux", a rétorqué Mme Le Pen.


La candidate au second tour de la présidentielle avait affirmé mercredi soir que "le retour à l'emploi" était nécessaire pour rendre effective, "probablement à la fin du quinquennat", la retraite à 60 ans avec 40 annuités de cotisations, qu'elle prévoyait jusque-là presque immédiate.


L'ancien ministre de l'Economie a en outre critiqué un projet coûtant "30 milliards" et étant "infinançable" à ses yeux. "Non, 17" milliards, l'a interrompu la candidate FN et actuelle eurodéputée.
"C'est ce qui avait été fait au début des années 80 par François Mitterrand à une époque où l'espérance de vie était de dix ans inférieure à celle d'aujourd'hui", a ajouté M. Macron, lançant: "il n'y a pas de finance magique".
L'âge légal, à partir duquel une personne peut demander à prendre sa retraite, a été relevé de 60 à 62 ans à partir de la génération née en 1955 par la réforme des retraites de 2010.
Pour bénéficier d'une retraite à taux plein, il faut avoir atteint l'âge légal mais aussi avoir cotisé suffisamment (166 trimestres, soit 41,5 ans pour la génération 1955). Le salarié qui n'a pas les trimestres requis peut attendre 67 ans pour une pension sans décote (âge dit du taux plein).
Ceux qui ont commencé à travailler très tôt peuvent néanmoins partir dès 60 ans s'ils ont tous leurs trimestres de cotisation (dispositif carrière longue de 2012).

 

"Aucun des deux n'est au niveau. Une dispute de chiffonniers. Ridicules. Quelle catastrophe pour le pays", a twitté la directrice de la communication de Jean-Luc Mélenchon, qui n'a pas clairement appelé à voter pour M. Macron.

 

"Moi ou Mme Merkel"

Mme Le Pen a également présenté son "arrogant" adversaire comme "à plat ventre" face à ses maîtres supposés. "La France sera dirigée par une femme", "moi ou Mme Merkel", a-t-elle lâché, dans une courte partie réservée aux questions internationales.

 

 

Macron jugé plus convaincant

Emmanuel Macron a été jugé le plus convaincant par 63% des Français lors du débat d'avant le second tour de l'élection présidentielle, contre 34% pour son adversaire Marine Le Pen, selon un sondage Elabe pour BFM TV diffusé mercredi. A la question de savoir qui avait le meilleur projet, les scores sont semblables (64%-33%).

Les électeurs de Jean-Luc Mélenchon (La France insoumise) sont 66% à avoir trouvé Emmanuel Macron le plus convaincant, 30% estimant que Marine Le Pen l'avait été.

Parallèlement, 58% des électeurs de François Fillon (Les Républicains) ont jugé Emmanuel Macron le plus convaincant, 38% estimant que Marine Le Pen l'avait été.

Le sondage a été réalisé auprès de 1.314 téléspectateurs, issu d'un échantillon national de 3.956 personnes, représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus.

 

"Dispute de chiffonniers"

Alors qu'en 2002, Jacques Chirac avait refusé le débat face à Jean-Marie Le Pen, qualifié au second tour à la surprise générale, Emmanuel macron avait tenu à livrer un match, finalement qualifié sur Twitter de "dispute de chiffonniers" par la directrice de la communication de Jean-Luc Mélenchon, lequel n'a pas clairement appelé à voter pour M. macron.
"Bon boulot ce soir de Marine Le Pen qui, par son indignité, aura donné envie de voter Emmanuel Macron aux derniers hésitants", a raillé Thierry Solère, organisateur de la primaire de la droite.
Bien que les sondages donnent Emmanuel Macron vainqueur le 7 mai, avec 59 ou 60% des voix, l'enjeu du débat était important: 18% des personnes certaines ou quasi certaines d'aller voter dimanche n'expriment aucun choix à ce stade, selon un sondage Elabe publié mardi.

 


Leurs programmes sont aux antipodes: libéral et pro-européen pour Emmanuel Macron, anti-immigration, anti-Europe et anti-système pour Marine Le Pen.
Le premier plaît surtout aux jeunes urbains, aux classes moyennes et aux milieux d'affaires. La seconde séduit les classes populaires, les ruraux et capte le ras-le-bol de Français victimes d'un chômage endémique.
"Ce n'est pas seulement deux personnalités, deux projets mais deux conceptions de la France, de l'Europe et du monde" qui s'affrontent, a estimé le président François Hollande.
Rituel de la vie politique française depuis 1974, le débat télévisé de l'entre-deux-tours constitue traditionnellement un moment fort et parfois décisif des campagnes présidentielles.

 

 

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ABRUTISSEMENT OU HEBETUDE ? FRANCAIS, LE CHOIX EST VOTRE...

LA LIBRE EXPRESSION

21 h 12, le 04 mai 2017

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Commentaires (3)

  • ABRUTISSEMENT OU HEBETUDE ? FRANCAIS, LE CHOIX EST VOTRE...

    LA LIBRE EXPRESSION

    21 h 12, le 04 mai 2017

  • "sa langue se parle sur tous les continents, son histoire, sa civilisation, ce qui fait sa force, c'est précisément qu'elle rayonne partout". Il faut un certain culot à Macron pour emprunter à le Pen ce discours patriotique, lui qui nie l'existence d'une culture française et qui parle anglais en Allemagne!

    Yves Prevost

    06 h 56, le 04 mai 2017

  • Sauvages diatribes entre deux candidats qui veulent changer le visage de la France .

    Antoine Sabbagha

    23 h 16, le 03 mai 2017

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