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Liban - La psychanalyse, ni ange ni démon

La folie, l’art et la psychanalyse (5)

Le fait que « la musique est un art quasiment sans effet sur lui » indique bien que Freud n'aime pas être confronté aux origines. Parce que la musique, bien avant le langage, est à l'origine de notre être. La musique c'est la voix de la mère qui berce le nourrisson. Comme le nourrisson n'a aucune espèce d'idée de ce qu'il est, il est la voix de sa mère. Comme il puise sa force aux origines de l'être, l'artiste sera aussi sa propre œuvre. L'art touche donc au corps. Pour Freud « le voilement du corps progresse avec la culture » que nous impose la société. La curiosité sexuelle infantile s'attachera donc au dévoilement du corps. L'artiste puisera sa force dans cette curiosité sexuelle infantile que Freud appelle « Pulsion épistémophilique ». La sublimation qui s'opère ainsi sera à l'origine de la notion de « beau ». Si pour Freud « le beau s'enracine dans le sol de l'excitation sexuelle », nous ne pouvons trouver beaux les organes génitaux eux-mêmes le rappelle Paul Laurent Assoun.

Non seulement nous ne les trouvons pas beaux, mais ils peuvent être terrorisants lorsque plus tard, le petit enfant surprend ses parents dans une relation sexuelle. Appelée par Freud « Scène primitive », on la retrouve invariablement dans une cure analytique, sous forme de souvenir ou de fantasme conscient et inconscient. Les organes sexuels y jouent donc un rôle fondamental. La fascination et la terreur qu'ils exercent sur l'enfant auront un impact indélébile sur sa vie sexuelle adulte.

 

La folie et l'art offrent un regard sur la « Scène primitive »
La folie et l'art offrent un regard sur ce moment originel dont nous sommes issus, cette « Scène primitive » tant fantasmée et tant redoutée, où le couple parental se donne à des ébats sexuels étranges et étrangers à l'enfant et d'où l'enfant est exclu. Toute terrorisante qu'elle soit pour l'enfant, la Scène primitive lui signifie un, qu'il est enfin sorti du corps de la mère, deux qu'il n'a pas sa place dans le couple sexuel de l'homme et de la femme qui sont à l'origine de son existence et, enfin, qu'il doit son identité à cette Scène primitive. Sans cette relation sexuelle des parents, il ne serait pas né. Il doit donc à cette Scène primitive, son être, son existence et son identité. La Scène primitive fait partie de ce monde de fantasme auquel l'enfant doit renoncer pour entrer dans la Culture.

Ce qui permet au nourrisson de renoncer à sa mère, à la mère originelle, objet total et à la jouissance fusionnelle, incestueuse qu'il vit avec elle, c'est de se contenter des objets partiels (Mélanie Klein), objets (a) de Jacques Lacan (à lire objet petit a) qui se substitueront au corps de la mère. Le regard, la voix, l'odeur de la mère etc. seront les objets qui susciteront désormais le désir du sujet. Ce sont les restes de cette Jouissance Autre. Grâce à la « Fonction paternelle » et au refoulement qui séparent l'enfant de la mère originelle, le désir prend le relais de cette Jouissance Autre et les objets partiels ou les objets (a) permettront au sujet de ne plus être sa mère, et d'entrer dans le social en désirant un autre semblable.

Dans Malaise dans la civilisation, Freud considère que « l'art n'a pas son pareil pour opérer une réconciliation avec les sacrifices consentis » par l'enfant pour entrer dans le social et la culture. Par contre, la folie rejette la culture parce que le fou n'arrive pas à renoncer à son monde pulsionnel. Il reste rivé à la Jouissance Autre, fusionnelle avec la mère, ou mortifère contre le père. Cependant, le délire est une tentative d'en sortir. Ainsi, le délire du Président Schreber, grand paranoïaque dont les Mémoires d'un névropathe ont été analysés par Freud, est une tentative de réhétérosexualiser la Scène primitive, c'est-à-dire d'avoir un père et une mère qui ont copulé à l'origine, alors que son père, le vrai paranoïaque, a fantasmé une descendance par parthénogenèse, scissiparité ou clonage comme on le dirait aujourd'hui. Une descendance qui exclut la mère. Pour échapper à cela, Schreber, dans son délire, s'est voulu la femme de Dieu. Nous verrons plus tard la signification du délire de Schreber.
Dans cette perspective, si l'art réconcilie l'homme avec ce à quoi il a dû renoncer, son monde pulsionnel, le délire pourrait être considéré comme une œuvre d'art ratée.

 

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