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Liban - Francophonie

Ifadem, un programme pour renforcer l’éducation primaire au Liban

Plus de 200 professeurs du Liban-Nord sont venus au palais de l'Unesco à Beyrouth pour récupérer leur diplôme d'attestation de réussite au programme.

Un groupe de professeurs et leur tuteur montent sur scène pour récupérer leur attestation de réussite.

L'Initiative francophone pour la formation des maîtres à distance, Ifadem, est un programme piloté par l'OIF (l'Organisation internationale de la francophonie) et l'AUF (l'Agence universitaire de la francophonie). Il est également l'un des projets du pacte linguistique signé en 2010 entre l'OIF et le président de la République de l'époque, Michel Sleiman. Ce programme propose des formations pédagogiques dans différents pays partenaires francophones à travers le monde afin de soutenir et d'améliorer les méthodes d'enseignement du français. En 2012, le programme a été initié au Liban pour former près de 500 enseignants dans la région de Tripoli, avec l'aide d'une petite quarantaine de formateurs et d'encadreurs libanais.
Plusieurs professeurs ont fait le déplacement jusqu'à Beyrouth pour recevoir leur diplôme d'attestation de réussite à la formation Ifadem. La cérémonie a été ouverte avec les discours des différents partenaires du projet.

La doyenne de la faculté de pédagogie de l'Université libanaise, Thérèse Hachem, a mis l'accent sur l'importance d'une formation comme celle proposée par Ifadem au Liban. « La désertification linguistique » et « l'aridité culturelle » qu'elle a mentionnées sont une réalité pour certaines régions. À l'inverse, le transfert et le croisement des connaissances sont une nécessité pour un pays plurilingue, qui se développe aux croisements de nombreuses influences culturelles. Comme l'a rappelé Hervé Sabourin, directeur régional de l'AUF pour le Moyen-Orient, « c'est à l'école primaire que se fabriquent les aptitudes aux savoir-faire des élèves, des étudiants puis des citoyens de demain ».

 

(Lire aussi : L'enseignement bilingue libanais récompensé par le label Francéducation)

 

Des allocutions ont également été prononcées par la présidente du CRDP (Centre de recherches et de développement), de l'attachée de la coopération universitaire (rattachée à l'Institut français du Liban) ainsi que du ministre de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur, Marwan Hamadé.

Pour s'adapter et répondre à certains besoins pressants de l'éducation primaire au Liban, le programme Ifadem a demandé une réelle mutualisation des forces des différentes institutions publiques engagées dans le projet, ce qui n'était pas chose commune. Les formateurs, issus du CRDP et de l'Université libanaise, ont commencé par des suivis en classe pour repérer les priorités sur lesquelles travailler. Des professeurs intégrés à la formation ont également donné leurs ressentis. Suite à cela, quatre livrets ont été conçus, avec chacun un thème précis: l'éthique professionnelle, la pédagogie, la méthodologie et l'apprentissage du français. Des contenus numériques ont également été mis à disposition afin d'être consultables à distance par les enseignants et leurs élèves. Enfin, les professeurs du primaire ont été regroupés par vingtaines en moyenne autour d'un tuteur pour suivre une formation étalée sur neuf mois, validée par un examen final. Sur les 469 enseignants ayant reçu la formation, 399 se sont présentés à l'examen et 375 l'ont passé avec succès.

 

(Pour mémoire : Tout ce que fait réellement l'AUF au Moyen-Orient...)

 

Niveau faible des enseignants du public
Un travail de fond était attendu en premier lieu sur la pratique et la compréhension orale du français. Deux institutrices, Laure Affani, enseignante à l'école Abdelhadi Daybi à Tripoli, et Ghina Etri, enseignante à l'école publique Blatt pour les filles à Minieh, ainsi que leur tutrice, Micheline Chabab, ont abondé dans ce sens. Pour elles, une langue ne s'apprend pas qu'avec quelques cours de grammaire. En pratiquant une langue, on apprend aussi à pratiquer une culture. Le problème soulevé par ces deux institutrices était à la fois le manque de soutien accordé à l'apprentissage des langues par la direction de beaucoup d'établissements publics, mais également le manque de moyens alloués aux professeurs pour intéresser les élèves à une autre langue que l'arabe. Grâce à la formation Ifadem, toutes les deux ont pu bénéficier de contenus numériques et audiovisuels, ce qui a permis un apprentissage plus ludique et ainsi plus motivant pour leurs élèves. Elles constatent déjà une meilleure implication pendant les cours de langue grâce à ces nouvelles méthodes d'apprentissage.

Si ce programme a été une réelle réussite, il a également permis de mettre en exergue de vraies difficultés qui expliquent la baisse de niveau accusée par l'enseignement primaire public libanais. Plus de 80 % des professeurs employés sont des contractuels et n'ont donc pas ou peu de formation initiale avant de prendre leur poste. Au cours du recrutement, les formateurs ont également remarqué un niveau très faible des enseignants en français. Beaucoup ne dépassent pas le niveau A2 dans le cadre de référence européenne de maîtrise d'une langue (système de notation qui va du niveau le plus faible, A1, au niveau le plus élevé, C2). Cela a notamment posé problème lors de la formation des enseignants, note Rosalie Vigouroux, chargée de projet pour Ifadem. En effet, selon elle, il aurait parfois été nécessaire de commencer par une remise à niveau en langue avant de commencer la formation pédagogique. Par ailleurs, le système éducatif libanais souffre d'une trop grande mobilité des enseignants. En effet, beaucoup d'entre eux changent régulièrement de cycles, d'établissements ainsi que de disciplines. Si cela complique la mise en place d'un accompagnement régulier et en profondeur de l'élève, cela demande également l'adaptation des contenus de formation, qui ciblent les classes de premier cycle (EB1, EB2, EB3, voire EB4). Et puisqu'une formation théorique ne suffit pas toujours, Rosalie Vigouroux remarque qu'un suivi en classe pour accompagner les changements suite à la formation pourrait être nécessaire.

Ce premier programme exploratoire dans la région de Tripoli a été très bien reçu par les différents acteurs concernés. Des initiatives similaires sont mises en place pour l'apprentissage de l'anglais au Liban, notamment par le British Council. Pour Rosalie Vigouroux, ces initiatives pour l'apprentissage des langues au Liban doivent fonctionner ensemble afin de créer une unité linguistique entre l'arabe, le français et l'anglais. Le programme Ifadem a également permis une réelle cohésion des institutions publiques engagées dans le programme et une prise de conscience des besoins éducatifs dans certaines régions du Liban. Si le ministère de l'Éducation et de l'Enseignement supérieur en faisait la demande, ce programme pourrait être répété dans d'autres régions, voire dans le pays tout entier, et pourquoi pas concerner en plus le cycle du collège.

 

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