Dans son allocution télévisée consacrée hier soir au dossier de la présidentielle, le secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, a réaffirmé « la non-ingérence de l'Iran dans les affaires libanaises », ainsi que l'appui officiel du parti chiite à la candidature du chef du bloc du Changement et de la Réforme, le général Michel Aoun, à la présidence de la République, de même qu'il a confirmé explicitement son souhait d'un consensus autour de la présidentielle.
Il a, avant tout, tenu à répondre « à ceux qui accusent l'Iran de bloquer le scrutin au Liban et qui mettent en doute sa démocratie », pour reprendre ses propos. « L'Iran est la première puissance de la région. Convoitée actuellement par le monde entier, la République islamique iranienne n'a jamais eu besoin d'évoquer le dossier de la présidentielle libanaise dans ses négociations. (...) Elle a par ailleurs organisé 35 scrutins sur son territoire, sans en reporter aucun. Que les parties qui mettent en doute ses pratiques démocratiques prennent conscience de leur propre taille », a déclaré le numéro un du parti chiite.
Il a cherché à démontrer la non-ingérence iranienne en mettant l'accent sur son abstention jusque-là à évoquer le dossier libanais dans ses négociations. « Les pays du 5+1 vous diront que l'Iran a toujours refusé tout débat en dehors du nucléaire. » Cela tiendrait aussi pour les négociations menées par le président iranien avec le Vatican et l'Élysée. « Ce sont les interlocuteurs du président Hassan Rohani qui lui ont demandé de s'ingérer dans la présidentielle libanaise. » Et sa réponse à ces sollicitations reste inchangée : « Il s'agit d'une affaire libanaise interne. Nous soutenons tout accord émanant des Libanais. Que les chrétiens s'entendent sur la question. »
Il n'existe par ailleurs « aucune preuve d'une volonté iranienne de monnayer ce dossier, ni de le bloquer à cette fin ». Puisque, si l'intention s'y trouvait réellement, « elle aurait dû déjà se manifester, surtout après l'entrée en vigueur de l'accord sur le nucléaire – en dépit de tentatives d'Israël et de l'Arabie saoudite de le mettre en échec ».
Le secrétaire général du Hezbollah a révélé avoir contacté les responsables iraniens, préalablement à son allocution, afin de s'informer de la teneur des échanges de M. Rohani à Paris et à Rome et confirmer cette volonté de non-ingérence iranienne. « L'Iran n'interférera pas dans ce dossier. Ne comptez pas sur Téhéran pour débloquer la présidentielle », a déclaré Hassan Nasrallah. Une déclaration qu'il a assortie d'une mise en garde aux parties libanaises : « Plus votre attente des développements régionaux tarde, moins les choses seront à votre avantage. » Et d'ajouter : « Si les Libanais tendent actuellement à sortir de la situation (de désaccord autour de la présidentielle), et si leurs efforts sont sérieux, qu'ils aillent prendre part au dialogue. »
Il a exprimé le souhait que « la conférence de dialogue au Liban finisse par acquérir un rôle stratégique, comme celui que remplit le conseil de discernement de l'intérêt supérieur du régime en Iran, à l'heure où l'on peine toujours à trouver une solution à la crise des déchets ».
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M. Nasrallah a ensuite rejeté les accusations dirigées directement contre le parti chiite de bloquer la présidentielle afin d'obtenir « la tenue d'une assemblée constituante, des amendements constitutionnels, ou encore l'élargissement de sa part au sein de l'État ». « Toutes ces spéculations auxquelles d'aucuns s'adonnent sont vides. » « Lorsque j'avais appelé à un compromis autour de la présidentielle, l'esprit en était de faciliter sa tenue. Le compromis équivalait à des concessions mutuelles, non pas à des velléités d'amendements constitutionnels. Au contraire, ma proposition s'accordait avec Taëf. (...) Et ma proposition d'une solution d'ensemble avait pour but de faciliter les solutions. »
S'attardant ensuite sur la relation du Hezbollah avec ses alliés, Hassan Nasrallah a mis l'accent sur « les liens affectifs » qui se tissent au sein de l'alliance du 8 Mars, où « personne n'ira poignarder l'autre dans le dos ». Précisant que « le 8 Mars n'a pas de chef », il a expliqué par exemple que le Hezbollah s'était abstenu de faire part à ses alliés de sa décision de participer au combat en Syrie, « afin de leur éviter un embarras éventuel ».
Dénonçant « la campagne menée pour mettre en doute nos rapports avec les sunnites, et nos liens avec nos alliés respectifs », Hassan Nasrallah a dit « avoir honte de rapporter ce qui a été dit sur nos rapports avec le mouvement Amal ». « Loin d'être une relation de suivisme, cette alliance est en passe de devenir un modèle pour la région et le pays ».
Pour ce qui est des rapports du parti chiite avec le général Michel Aoun, il a précisé que « nous avons pris l'initiative de soutenir sa candidature, alors que lui n'avait rien demandé. Ce soutien est naturel ». Il a justifié en outre le vote blanc du Hezbollah et de ses alliés à la première séance électorale, par le fait que « le général Michel Aoun nous avait informé au préalable de ne pas vouloir encore annoncer sa candidature ». Il a ensuite justifié « le boycottage des séances, qui est notre droit constitutionnel, par (...) notre attente d'un candidat qui soit accepté par nous ». « Nous ne nous rendrons au Parlement que si la victoire du général Aoun est garantie », a ajouté Hassan Nasrallah, précisant que le Hezbollah « ne pouvait rien imposer à ses alliés ».
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Valorisant « le dialogue intercommunautaire », il s'est attardé sur la première rencontre à Paris entre le chef du courant du Futur, Saad Hariri, et le député Sleiman Frangié. « Nous sommes liés à Sleiman bey par une amitié de longue date. Il nous a informés de ses rencontres au préalable. Il m'avait demandé quelle serait la position du Hezb si l'appui à sa candidature par le Futur était sérieux. Je lui ai répondu à la lettre : cela produirait une nouvelle donne, dont il faut débattre avec le général Aoun. Nous vous faisons confiance, mais sommes engagés avec le général Aoun, avec lequel nous entendons examiner éventuellement la question. »
Le secrétaire général du Hezbollah a néanmoins critiqué « toute l'approche » des échanges Hariri-Frangié à Paris. « Je n'en accuse personne, mais la rencontre de Paris, telle qu'elle a été présentée, a eu des répercussions négatives aussi bien pour le 8 Mars que pour le 14 Mars. Je tends par ailleurs à ne pas croire les informations rapportées sur un accord englobant la présidence du Conseil et d'autres dossiers. Je ne retiens à cet égard que ce que dit Sleiman Frangié, c'est-à-dire qu'aucun accord de cette nature n'a été conclu. » Mais les « surenchères verbales » ont conduit alors à questionner la position du Hezbollah à l'égard de Michel Aoun. « Pourquoi faire assumer au Hezbollah la responsabilité de la non-élection de Sleiman Frangié? N'est-ce pas injuste de nous accuser d'entraver le scrutin ? » a-t-il demandé.
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C'est sur un ton neutre qu'il a évoqué ensuite l'appui du chef des Forces libanaises, Samir Geagea, à la candidature du général Michel Aoun. « Nous faisons confiance à notre allié. Cela ne nous gêne pas que l'un de nos rivaux soutienne l'un de nos alliés. C'est le camp opposé qui est noyé dans la confusion, alors que nous sommes entièrement confiants de notre position locale et régionale. »
S'agissant du mutisme prolongé du Hezbollah sur la rencontre de Meerab, Hassan Nasrallah a précisé que « nous avons préféré attendre que se calment les effets dramatiques de ce développement ». Il a dénoncé là encore les tentatives de « mettre en doute nos rapports avec le général Aoun ».
« Nous continuons de nous concerter avec nos alliés, mais nous ne leur imposons aucune position à prendre. Tout propos contraire est une insulte, aussi bien à eux qu'à nous », a-t-il ajouté.
« Pour tout résumer, il existe aujourd'hui deux candidats à la présidence, issus de notre camp politique. Cette configuration est une victoire politique pour notre camp, puisque, en l'absence d'un candidat du 14 Mars, nous sommes sûrs que le prochain président de la République sera du 8 Mars », a-t-il fait remarquer.
Réitérant l'appui « éthique » du Hezbollah à la candidature du général Michel Aoun, il a annoncé qu'il ne reviendra sur cet appui que « si le général Aoun décide lui-même de se retirer de la course. Il n'y a pas d'autre issue possible ». Et de déclarer, à l'adresse des Marada : « Si l'appui à la candidature de Sleiman Frangié avait été obtenu il y a un an et demi, nous l'aurions soutenu. »
Il a appelé enfin les parties libanaises à « œuvrer pour un président qui fasse l'objet d'une unanimité, afin qu'aucune partie ne se sente lésée ». Réitérant son appel à un dialogue interne, il a prôné la non-précipitation, en dépit de l'importance des dossiers en suspens. « Nous ne sommes pas pressés », a-t-il conclu.
Pour mémoire
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commentaires (16)
HAL ORANGE 3ASARNEHA OU CHRIBNEHA OU MA BAA FADDAL MINNA ILLA IL ICHIRRRRRR.... BAS HIBAYNEHA OU RAH INKHALLI HAL ICHRAATTTT ZIKIR... EH WALLA... LA T2AKHZOUNA !
LA LIBRE EXPRESSION
20 h 38, le 31 janvier 2016