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Moyen Orient et Monde - Société

Au Qatar, les employés de maison, ersatz de parents ?

Petit émirat où les familles autochtones sont de plus en plus riches, le Qatar affronte un problème social de taille : les parents se font de plus en plus remplacer par les employés de maison.

« Avant d’être mère, j’avais un regard méprisant envers celles qui confiaient leur enfant à une employée de maison. Aujourd’hui, j’ai bien entendu changé de regard », affirme Nadine, mère de famille.

Nadine, une expatriée arabe, vit au Qatar depuis quatre ans environ. Mariée et mère d'un enfant, ses horaires de bureau lui permettent peu de flexibilité. Pour parvenir à jongler entre ses différentes tâches, le soutien apporté par son employée de maison a été décisif.
Nadine se confie : « Avant d'être mère, j'avais un regard méprisant envers celles qui confiaient leur enfant à une employée de maison. Aujourd'hui, j'ai bien entendu changé de regard », dit-elle en riant. « Sans elles, impossibles d'être à la fois mère et employée à plein-temps. Certes, il y a un équilibre à trouver, il faut définir où commence le rôle de l'employée de maison et où il s'arrête car en définitive, il ne s'agit en aucun cas de se faire "remplacer" par sa domestique. »


Chaque jour, à 13 heures pile, Nadine met son écran d'ordinateur en veille, prend le volant et se rend à l'école où l'attend son fils, âgé de 3 ans. Elle explique profiter de son heure de déjeuner pour effectuer ce trajet. « Au début, je n'ai pas vraiment remarqué que j'étais une des rares mères à se rendre à l'école. Au fil des jours, je me suis rendue compte que la plupart de celles avec qui j'attendais que la cloche sonne sont en réalité des employées de maison. En général, la domestique arrive ici en compagnie du chauffeur qui l'attend dans le parking le temps qu'elle récupère l'enfant. » Nadine se dit choquée par cette pratique qui se développe de plus en plus au Qatar. « Lorsque j'aperçois une mère dans la foule, je suis soulagée pour son enfant... »
Le Qatar, ce petit émirat d'environ 11 000 kilomètres carrés, n'a connu la prospérité que récemment, c'est-à-dire au milieu des années 1990. Avant cela, les facilités de la vie moderne n'étaient pas encore réellement disponibles dans ce pays. Ce soudain accès au luxe a créé certains problèmes de société que les spécialistes s'attellent aujourd'hui à résoudre. Le manque d'implication des parents dans l'éducation de leurs enfants n'est qu'une des nombreuses facettes de ce malaise social.

 

(Lire aussi : Les Cendrillon des Philippines se servent de leur beauté pour conquérir le monde)


Ibrahim est qatari. La cinquantaine bien entamée, il est père de huit enfants. Il est pédiatre à l'hôpital public Hamad. Il ne souhaite pas que son nom de famille soit mentionné, par souci d'anonymat.
Interrogé sur la place occupée par les employées de maison dans l'éducation des enfants qataris, il s'insurge : « Nous vivons dans une société malade. Les parents ne se rendent pas compte du rôle qu'ils se doivent de jouer. Nombre d'entre eux se sont mariés trop tôt et choisissent de se défiler de leur responsabilité parentale. » Et Ibrahim d'ajouter : « De manière globale, l'emploi du temps des parents s'articule autour du shopping pour les femmes et des relations sociales pour les hommes. L'ensemble des tâches ménagères et tout ce qui concerne les enfants est dévolu à l'employée de maison qui se retrouve dans une situation difficile : elle remplace de facto une mère souvent absente. »
Il raconte que dans son cabinet, il soigne, entre autres, un jeune patient atteint d'une maladie chronique qui arrive à chaque visite accompagné de sa « nounou ». Il se dit choqué par cette pratique et comprend que certains hôpitaux privés aient opté pour une politique plus stricte en la matière. En ce sens, l'hôpital privé al-Ahli de Doha refuse depuis plusieurs années déjà de faire vacciner les enfants qui arrivent accompagnés d'une domestique ou d'un chauffeur.


Petite révolution en mars dernier, les autorités qataries ont suivi le mouvement lancé par ces hôpitaux privés, et décidé qu'à partir du 1er avril, tout enfant arrivant dans un centre de soin public ou un hôpital public – aux services d'urgence, ou pour une visite de routine –, accompagné uniquement d'une nounou ou d'un chauffeur, se verra refoulé tant que ses parents ne se seront pas fait connaître. Bien entendu, si le cas est d'extrême urgence, l'enfant sera pris en charge puis, une fois son état stabilisé, ses parents seront convoqués. Grâce à ce nouveau règlement, Ibrahim finira peut-être par rencontrer les parents de son jeune patient...
C'est en tout cas une première dans le secteur public. Car c'est là où se rendent les Qataris en masse pour se faire soigner, et les autorités ont longtemps hésité avant de prendre une telle décision. Mais elles ont tranché, arguant de l'incapacité des domestiques de répondre à des questions précises concernant la santé de l'enfant. Des questions souvent de grande importance surtout lorsqu'il s'agit d'allergies ou de problèmes spécifiques de santé.


Nadine, de son côté, raconte qu'elle a souvent vu des enfants communiquer avec leur nounou dans la langue maternelle de cette dernière. « Il y a quelque temps je jouais avec mon fils dans une aire de jeu d'un grand hôtel de Doha quand j'ai entendu deux très jeunes enfants qataris parler philippin avec leur nounou Philippine. Cela en dit long sur le nombre d'heures qu'ils passent ensemble... ».

 

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Nadine, une expatriée arabe, vit au Qatar depuis quatre ans environ. Mariée et mère d'un enfant, ses horaires de bureau lui permettent peu de flexibilité. Pour parvenir à jongler entre ses différentes tâches, le soutien apporté par son employée de maison a été décisif.Nadine se confie : « Avant d'être mère, j'avais un regard méprisant envers celles qui confiaient leur enfant à...

commentaires (1)

Est-ce qu'ici chez nous au Liban c'est mieux ????

Hind Faddoul FAUCON

08 h 42, le 08 avril 2015

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Commentaires (1)

  • Est-ce qu'ici chez nous au Liban c'est mieux ????

    Hind Faddoul FAUCON

    08 h 42, le 08 avril 2015

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