L'ancien Premier ministre libanais Saad Hariri lors de son arrivée au Biel où s'est tenue la commémoration de l'assassinat de son père, Rafi Hariri. Mohamed Azakir/Reuters
De retour à Beyrouth à l'occasion de la commémoration du 10ème anniversaire de l'assassinat de son père, l'ancien Premier ministre Rafic Hariri, le chef du Courant du Futur et ex-chef du gouvernement libanais Saad Hariri s'est lancé samedi dans une diatribe contre le régime de Damas, appelant le Hezbollah à se retirer du conflit syrien.
Dans un discours retransmis en direct à la télévision, M. Hariri, qui s'est exilé il y a trois ans pour des raisons de sécurité, a évoqué plusieurs dossiers épineux devant une foule de politiciens et de partisans rassemblée au Biel, dans le centre-ville de Beyrouth. Des députés et ministres du Courant patriotique libre (CPL), qui avaient autrefois boycotté cette cérémonie, étaient également présents.
Après l'hymne national libanais, entonné par la soprano Tania Kassis, et une série de témoignages de bénéficiaires de bourses scolaires de la Fondation Hariri, l'ancien Premier ministre a entamé son allocution en rendant hommage au roi Abdallah d'Arabie, décédé le 22 janvier dernier et saluant le nouveau souverain Salman qui lui a succédé à la tête du royaume wahhabite.
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"Dix ans plus tôt, un séisme a secoué Beyrouth, tuant Rafic Hariri, a rappelé Saad Hariri au début de son discours. Ils ont voulu tuer un symbole de la réussite et de la reconstruction au Liban et dans le monde arabe. Depuis cette date, des séismes en série ont bouleversé la région, entraînant mort et destruction".
"Après la mort de Rafic Hariri, l'ennemi (israélien, ndlr) a déclenché une guerre contre le Liban, lequel est ensuite devenu otage, la décision de guerre ou de paix n'étant plus entre les mains de l'Etat, a poursuivi M. Hariri. Après ta mort, plusieurs régimes se sont écroulés et plusieurs villes arabes ont sombré dans la guerre et le terrorisme. Bachar el-Assad a réussi à détruire la Syrie et a lâché son armée et les marchands de guerre contre son peuple, ouvrant la voie à l'extrémisme et entraînant la mort de centaines de milliers de personnes. Après ta mort, a encore dit M. Hariri, le Yémen a sombré dans le chaos et a succombé à la force des armes, la plupart des pays arabes ont abandonné la Palestine et la Libye est tombée entre les mains des milices. Mais nous ne renoncerons pas au rêve de Rafic Hariri, a affirmé le leader du Courant du futur. Nous ne baisserons pas les bras. Nous allons continuer à défendre la modération face à l'intégrisme et à la barbarie."
Plusieurs personnalités politiques ont assisté à la cérémonie.Mohamed Azakir/Reuters
Evoquant la situation politique locale, le chef du Courant du Futur s'est attardé sur le dialogue entamé avec le Hezbollah, soulignant que les discussions avec le parti chiite représentent "une nécessité nationale visant à mettre fin au vide présidentiel". "Nos différends (avec le Hebzollah, ndlr) sont nombreux", a-t-il ajouté, évoquant le tribunal international pour le Liban, la légalité des armes et les conflits régionaux, notamment en Syrie, au Yémen et au Bahreïn. Répondant, sans le nommer, au directoire du Hezbollah qui souligne que le Liban fait partie de l'axe irano-syrien, Saad Hariri a declaré : "Le Liban ne fait pas partie de cet axe. Il ne fait partie d'aucun axe régional, le pays ne servira jamais de carte politique".
"Nous ne permettrons pas au Hebzollah de décider de la guerre ou de la paix au Liban qui est du ressort exclusif de l'Etat libanais", a martelé le chef du Courant du Futur, soulignant toutefois les bienfaits du dialogue (avec le Hezbollah) en vue de l'apaisement des tensions confessionnels entre sunnites et chiites au Liban. L'ancien Premier ministre a toutefois affirmé que les raisons de ces tensions sont toujours présentes : "Il y a d'abord le refus du Hezbollah de remettre à la justice les accusés dans l'assassinat de Rafic Hariri, a dit Saad Hariri. Ensuite, il y a l'implication militaire du Hezbollah en Syrie et le comportement de certains qui se sentent au-dessus de la loi et qui ne sont pas concernés par le plan sécuritaire du gouvernement".
M. Hariri a également condamné l'ingérence du Hezbollah dans les affaires internes du Bahraïn, affirmant que "le Liban a zéro intérêt dans tout cela".
"Le plus grand danger reste le vide présidentiel", a encore insisté M. Hariri, réitérant son appel au Hezbollah de retirer ses hommes de Syrie. "Toute tentative de sauver le régime syrien est une folie, a-t-il affirmé. La présence du Hezbollah dans le Golan est une folie aussi. Il faut se retirer de ce conflit pour sauver le Liban des incendies qui le guettent. Assez !".
Il a critiqué notamment l'implication du Hezbollah dans le Golan syrien, où un raid israélien le 18 janvier a fait six morts parmi les membres du parti. Celui-ci a riposté par une attaque qui a tué deux soldats israéliens à la frontière, faisant craindre une escalade entre l'Etat hébreu et son ennemi juré qui s'étaient affrontés lors d'une guerre destructrice en 2006.
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Le leader sunnite a par ailleurs profité de son discours pour réitérer son appui à l'armée libanaise et aux forces de sécurité. "Notre soutien à l'armée est inconditionnel et sans frontières", a-t-il lancé.
Concernant la vague islamiste dans la région, Saad Hariri a affirmé que son parti représente la modération et lutte aux côtés de l'Etat contre l'intégrisme religieux et le terrorisme. "Nous avons compris il y a longtemps qu'il n'existe pas de compromis entre la modération et l'intégrisme, ni un juste milieu entre l'armée et la milice, la paix et la guerre civile", a-t-il déclaré. "Je suis venu vous dire que je ne suis pas un modéré, je suis un fanatique: Je suis un fanatique du Liban, de l'État et de la Constitution, a-t-il ajouté. Je suis un fanatique des institutions, de la légitimité, de l'armée, des Forces de sécurité intérieures, je suis un fanatique de la croissance économique, des opportunités d'emploi et d'une vie digne, je suis un fanatique de la coexistence et de la parité, je suis un fanatique de la construction d'un Etat civil, oui l'Etat civil: l'Etat de droit, qui gouverne tous les citoyens par la loi, et seulement par la loi. (...) Je suis un fanatique de la souveraineté, de la liberté et de l'indépendance".
M. Hariri s'est prononcé dans ce cadre pour un Etat civil rassembleur et pour la liberté de conscience et de croyance. "Tout le monde doit pouvoir exercer ses croyances dans les mosquées et les églises, et l'Etat doit rassembler toutes les parties", a-t-il déclaré.
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Evoquant le tribunal international, l'ancien Premier ministre a affirmé qu'il est confiant que "la justice sera faite et que les accusés seront enfin condamnés". "Le rêve de Rafic Hariri l'emportera sur la haine et l'extrémisme. Nous poursuivrons le chemin tous ensemble. Vive le Liban !", a-t-il conclu.
Rafic Hariri avait été tué le 14 février 2005 dans un attentat à la bombe lorsque 1 800 kilos de TNT avait explosé au passage de son convoi. Cet attentat avait ramené le Liban au bord de la guerre civile. La Cour pénale internationale de La Haye a inculpé cinq membres du Hezbollah pour leur implication dans cet assassinat. Un procès par contumace s'est ouvert en janvier 2014 et le parti chiite a toujours démenti les accusations portées contre lui.
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Dans un discours retransmis en direct à la...
commentaires (7)
Il mérite plus qu'une "diatribe", ce (c)hébél-lionceau aSSadique ! Pourquoi pas lui bastonner les planches des pieds ?
ANTOINE-SERGE KARAMAOUN
08 h 10, le 17 février 2015