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Liban - Environnement

Les municipalités intraitables : la fermeture de la décharge de Naamé est définitive

Alors que le Conseil des ministres a voté lundi le plan de gestion des déchets avec prolongation de l'activité du dépotoir pour trois mois renouvelables, les réactions de refus s'enchaînent. Les critiques de la société civile contre le plan aussi.

Photo d’archives d’un rassemblement de la Campagne civile pour la fermeture de la décharge de Naamé.

C'est après de multiples tribulations que le plan national de gestion des déchets, préparé par une commission ministérielle, a été adopté en Conseil des ministres lundi. De nombreuses modifications y ont été apportées en réponse aux remarques des ministres. En définitive, le plan adopté se fonde, comme prévu, sur une division du Liban en six régions devant être gérées par des sociétés privées (les zones seront regroupées deux par deux pour des raisons économiques). L'appel d'offres doit être lancé d'ici à deux mois (voir L'Orient-Le Jour du mardi 13 janvier). Comme le plan ne peut être mis en application avant plusieurs mois, il a également été décidé, malgré l'opposition des ministres du Front démocratique de Walid Joumblatt, de garder la décharge de Naamé ouverte durant trois mois renouvelables une fois, et de prolonger par conséquent le contrat avec la compagnie Averda qui s'occupe de la collecte et du traitement des déchets de Beyrouth, du Mont-Liban et d'une partie du Liban-Nord. La plan est supposé couvrir sept ans, renouvelables une fois pour trois ans.


La décision de maintenir l'activité à Naamé a fait mouche auprès des habitants des villages qui entourent la décharge. Ceux-ci manifestent depuis longtemps déjà en faveur de la fermeture du site qui, disent-ils, leur cause désagréments et propagation de maladies. Hier, les municipalités qui entourent le dépotoir et la Fédération des municipalités du Haut-Gharb et du Chahar ont tenu une réunion au siège de la municipalité de Naamé, avec des représentants de partis et de la société civile. Dans un communiqué, les participants à la réunion qualifient la décision du gouvernement d'« ambiguë ». Ils réaffirment que « la décision de fermer la décharge le 17 janvier est définitive ». « Nous garderons nos réunions ouvertes pour suivre de près l'évolution de la situation, poursuivent-ils. Nous prendrons les décisions qui s'imposent après la réunion qui aura lieu demain (aujourd'hui) au domicile du président du Front démocratique, le député Walid Joumblatt, en présence des ministres de l'Environnement, de l'Intérieur, des Finances et des ministres du Parti socialiste progressiste (PSP). »


Face à l'adoption du plan de gestion des déchets en Conseil des ministres, la société civile ne compte donc pas rester les mains croisées. « L'escalade est la seule option qui nous reste », nous confie Imad Kadi, porte-parole de la Campagne pour la fermeture de la décharge de Naamé. Il refuse de nous informer sur les mesures envisagées avant la réunion des associations écologiques qui devrait avoir lieu aujourd'hui à 18h et qui sera suivie d'un communiqué. Mais le ton de la voix n'en est pas moins très ferme. « Nous avons promis aux habitants de nos villages de ne pas rester inactifs et c'est exactement ce que nous allons faire », dit-il.

 

(Lire aussi : Gemayel : L'approche Kataëb du dossier des déchets est « audacieuse et constructive »)

 

« On nous pousse à la désobéissance civile »
Le président du Mouvement écologique libanais (LEM), Paul Abi Rached, dont l'organisation a maintes fois qualifié le plan national de gestion des déchets de non écologique, a réagi hier à son adoption en Conseil des ministres. À L'Orient-Le Jour, il se dit « étonné » que l'État ait tranché en faveur d'« une solution fondée sur la privatisation, après une expérience de vingt ans qui n'a été gratifiante ni d'un point de vue écologique ni d'un point de vue économique, au lieu de confier le dossier aux municipalités comme il aurait été naturel de le faire ».


L'écologiste se demande « comment de telles décisions, susceptibles d'avoir un impact à long terme sur le pays, sont prises dans les circonstances actuelles, en l'absence d'un président de la République et en présence d'une Chambre des députés qui en est à sa seconde prorogation de mandat ». Pour lui, « le problème de la décharge de Naamé aurait pu être réglé à court terme, en attendant des temps meilleurs ».
Paul Abi Rached note que dans la justification de la prolongation de l'activité dans le dépotoir de Naamé, le Conseil des ministres a évoqué « l'hygiène publique ». « Ils semblent oublier la notion de santé publique ! s'insurge l'écologiste. Ils ferment des supermarchés et des boucheries pour des échantillons de viande non conformes aux normes, et gardent une décharge ouverte malgré l'opposition de tous les habitants des localités voisines qui se plaignent des odeurs et de la propagation de maladies ! »
Selon le président du LEM, « le gouvernement pousse la population à la désobéissance civile ». L'association Green Globe a été encore plus loin dans un communiqué, estimant que « le plan du gouvernement est un péché durable contre l'environnement du Liban ».

 

(Pour mémoire : Résoudre le problème des déchets en un seul clic !)

 

« D'un plan d'urgence à un autre »
Le bilan que dresse Habib Maalouf, président de l'Association libanaise de développement et d'environnement et responsable de la section environnement au journal as-Safir, est plus mitigé. Selon lui, « nous sommes passés d'un plan d'urgence, adopté en 1997, à un autre plan d'urgence ». « Le retard du gouvernement à trancher cette question des déchets nous a mis face à trois possibilités, dit-il à L'Orient-Le Jour. Voir les rues inondées de déchets, prendre des mesures urgentes pour éviter le désastre ou adopter une véritable stratégie pour gérer ce secteur, poursuit-il. C'est évidemment la seuxième option qui a été retenue. »


Concernant le plan adopté lundi en Conseil des ministres, Habib Maalouf note « certaines améliorations par rapport aux plans précédents, notamment le taux plus élevé de déchets qui seront compostés et recyclés, et par conséquent moins de déchets enfouis dans les décharges ». Pour ce qui est du délai que se donne l'État en vue de mettre ce plan en application, en d'autres termes les trois mois renouvelables pour la prorogation du contrat précédent, il pense que « cela pourrait être suffisant pour les centres de tri et de traitement, peut-être qu'il faudra un peu plus de temps pour les décharges ».


« Toutefois, comme pour tous les autres plans, il faudra attendre la mise en application pour se prononcer, poursuit-il. À mon avis, dans les régions où les pôles d'influence politique sont assez puissants, il sera possible de déterminer des sites de décharges et de les aménager assez rapidement, avec des compagnies qui auraient le soutien de ces responsables politiques locaux. Mais dans d'autres zones, des difficultés pourraient survenir. »
Quoi qu'il en soit, la tension est loin de retomber dans la région de Naamé. Les prochains jours seront déterminants pour savoir lequel prendra le dessus, l'escalade ou les appels au calme.

 

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