On peut s'amuser de telles croyances antiques qu'on croit révolues. Mais à y regarder de plus près, on réalise que, de nos jours, la relation de l'homme avec Dieu n'en est pas, en pratique, beaucoup plus éloignée. Ne voit-on pas encore certains pèlerins visiter des sanctuaires dans le seul but d'obtenir des grâces matérielles ? Ne récite-t-on inlassablement des prières pour être dans les bonnes faveurs de Dieu, pour invoquer sa pitié ou pour gagner sa protection ? N'avons-nous pas parfois recours au jeûne et autres mortifications pour attirer son attention ou pour obtenir son pardon ? L'amour qu'on prétend ainsi avoir pour Dieu est-il vraiment sincère ou intéressé ?
Que dire aussi des autres, les révoltés ? Combien d'entre eux rejettent même l'existence de Dieu sous prétexte qu'ils ne peuvent comprendre sa passivité face aux malheurs du monde, ou qu'ils ne peuvent concevoir qu'il puisse nous punir aussi sévèrement pour des péchés qu'on a souvent du mal à identifier nous-mêmes? Comment peuvent-ils accepter ce Dieu qui laisse souvent périr les innocents et qui sauve parfois les tyrans ?
Notre relation actuelle avec Dieu a-t-elle vraiment changé de celle que les hommes de l'Antiquité avaient avec leurs divinités ? Pas vraiment. L'homme est encore amené à craindre Dieu et à se prosterner devant Lui en sollicitant Sa pitié, et en Lui offrant louanges et prières pour obtenir Ses bonnes grâces.
Et pourtant, entre la mythologie antique et le monde moderne, il y eut un message qui nous proposa une autre vision de la relation entre Dieu et l'homme. Une vision non plus basée sur un marchandage continu entre Dieu et les hommes, mais sur un amour inconditionnel et désintéressé qui relie Dieu aux hommes et que les hommes sont appelés à reproduire entre eux. Dieu ne devient plus un souverain autoritaire et exigeant, mais un Père aimant, respectueux de la liberté de l'homme. Dieu ne devient plus ce justicier qui récompense le bon et punit le mauvais, mais ce Père qui aime tous ses enfants gratuitement et de la même façon, qui relève le faible, qui souffre avec le souffrant, qui pardonne sans condition... Une telle vision donne à l'homme l'entière responsabilité de ses actes et de son destin, et l'invite à contrôler lui-même l'avenir de ce monde. L'homme est ainsi libéré du joug de la servitude d'un Dieu qui impose son bon vouloir. La prière ne devient plus une succession de louanges censées amadouer Dieu ou obtenir Sa grâce, mais une communion continue avec Dieu qui guide l'homme dans ses choix et le met face à ses responsabilités.
Quoi de plus libérateur qu'une telle vision de la relation entre Dieu et l'homme ? Et pourtant, deux mille ans après, les hommes ne semblent toujours pas adhérer à cette vision si révolutionnaire.
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