La juge Aoun avait fait appel auprès du Conseil supérieur de discipline contre une décision du Conseil de discipline des magistrats qui avait décrété, en mai 2023, sa destitution de ses fonctions judiciaires. Les motifs de cette décision s’étaient principalement fondés sur des accusations de refus de se conformer à une décision prise en juin 2021 par l’ancien procureur général près la Cour de cassation Ghassan Oueidate de la dessaisir des affaires liées aux crimes financiers, ainsi que sur une violation du droit de réserve et un refus de répondre aux convocations du parquet de cassation.
Lors de la première audience tenue le 22 mars auprès du Conseil supérieur de discipline, Ghada Aoun avait affirmé qu’elle entendait porter un recours en dessaisissement contre Souheil Abboud pour invoquer « une rivalité » entre eux. L’audience avait été reportée une première fois au 15 avril, avant d’être fixée à lundi dernier. Ce recours « pour suspicion légitime » doit être normalement présenté devant la cour d’appel, mais le premier président de la Cour de cassation étant le plus haut placé parmi les magistrats, la juge Aoun l’avait présenté devant l’assemblée plénière de cette cour. Ayant perdu son quorum en janvier 2022 en raison du départ à la retraite de six de ses membres, cette juridiction ne pourra pas siéger de sitôt pour statuer sur le dessaisissement demandé, au vu des désaccords politiques sur les nominations judiciaires.
La juge Aoun avait présenté la même requête au CSM et au Conseil supérieur de discipline. Mais ces deux dernières instances n’ont pas, elles non plus, prononcé de décision sur ce plan. Lundi, l’avocat de la procureure Roland Aouad s’est donc rendu au Palais de justice peu avant la séance prévue pour présenter au greffe du Conseil supérieur de discipline un justificatif de l’absence de la juge Aoun ainsi que de la sienne. Ce justificatif est fondé sur le fait que les recours présentés n’ont pas encore été tranchés.
Parmi les raisons du recours, figure le fait que le CSM présidé par M. Abboud avait adressé des plaintes contre la magistrate devant l’Inspection judiciaire, avait indiqué à L’Orient-Le Jour une source proche de Ghada Aoun. Or on ne peut être juge et partie à un procès, avait-elle affirmé. Un autre motif est que le CSM aurait évoqué la possibilité de révoquer Ghada Aoun en se fondant sur l’article 95 de la loi sur l’organisation judiciaire qui permet au CSM de déclarer un juge incapable après l’avoir entendu, sans procès et sans droit de recours.
La magistrate Aoun avait engagé des poursuites contre l’ex-gouverneur de la Banque du Liban Riad Salamé et procédé à l’arrestation de son frère Raja en mars 2022, de même qu’elle avait ciblé plusieurs banques libanaises, interdisant à leurs PDG de voyager et de disposer de leurs biens. Elle jouit du soutien de l’avocat de l’association Sherpa et du collectif les « Victimes des pratiques frauduleuses et criminelles au Liban » William Bourdon, qui lui avait adressé, avant la première audience, un message dans lequel il salue son courage, son indépendance et son professionnalisme, soulignant que les enquêtes qu’elle a menées ont été utiles à l’instruction ouverte en France sur la plainte déposée par Sherpa et le collectif.
Lorsqu’il s’agit d’un citoyen honnête on le pourchasse jusqu’aux chiites pour le faire comparaître devant un tribunal militaire pour donner l’exemple et faire taire les citoyens. Où est passé Riad Salamé par exemple? Plus personne n’en parle et pour cause ils sont tous complices du hold-up historique et font semblant de ne pas le trouver alors qu’ils ne le cherchent même pas. Espérons que la justice internationale sera plus juste et moins clémente avec tous ces malotrus qui continuent d’agir comme si de rien n’était faute de condamnation et de courage des institutions concernées.
12 h 16, le 02 mai 2024