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Nos Lecteurs ont la Parole

Cana de Galilée, non loin de Tyr...

Cana de Galilée, non loin de Tyr...

La couverture du livre de Nagi Maroun Karam. Photo DR

Cana de Galilée est le lieu choisi par Jésus-Christ pour accomplir son premier miracle. D’après le remarquable ouvrage de Naji Maroun Karam (Qana de Galilée, éditions Saër al-Mashrek), ce village où Dieu fait homme manifesta sa gloire aux hommes, en changeant l’eau en vin, se situerait au Liban, à 12 km au sud-est de Tyr.

L’investigateur, archéologue et coordinateur des recherches archéologiques et historiques de l’association « Sur les pas du Christ au Liban » revient sur des témoignages anciens et authentiques, provenant d’auteurs crédibles et reconnus, fins connaisseurs de la région, tels qu’Eusèbe de Césarée (qui a vécu entre 260 et 340), l’évêque Épiphane de Salamine (né en 315) et saint Jérôme (né en 347).

Leurs témoignages, d’une valeur historique indéniable, attestent que la ville de Cana décrite dans le Nouveau Testament est bien Qâna el-Gealil ou Qâna la grande ou Qâna major, située au sud de Tyr.

Des arguments opposés, ultérieurs aux affirmations d’Eusèbe et d’Épiphane, se sont manifestés à partir de 333, avec le début des pèlerinages à Jérusalem. Ces arguments seraient en faveur de deux villes palestiniennes plus proches de Nazareth : Kafr Kanna et Khirbet Qâna, situées respectivement à 6 et 14 km de Nazareth.

Pour appuyer l’hypothèse de Cana la libanaise, M. Karam se base, entre autres éléments, sur les variations d’orthographe et de prononciation qui plaident en faveur de la localité proche de Tyr (différence orthographique et de prononciation entre le « qaf » en arabe = Q de Qana (ou Cana) et le « kaf » (en arabe) = K de Kanna, différence de prononciation entre Cana avec un seul n et Kanna avec deux n).

Il analyse également le récit des noces de Cana tel qu’il figure dans l’Évangile de saint Jean pour apporter des arguments logiques et factuels en faveur de cette hypothèse.

Au fur et à mesure de cette étude, que je vous invite à consulter intégralement dans cet ouvrage passionnant, il ressort qu’au cours des siècles, le choix s’est porté vers des villes « homonymes » de Cana la tyrienne, en réponse à une logique

touristico-pratique assez évidente.

En effet, les trois cents ans d’abandon forcé des lieux saints, en rapport avec les trois premiers siècles de persécution des chrétiens, étaient largement suffisants pour effacer le souvenir de certains sites de la mémoire collective chrétienne.

Lors de la ruée des pèlerins vers la Terre sainte au IVe siècle, il était plus simple que les hauts lieux du christianisme (Jérusalem, Nazareth, Bethlehem, Capharnaüm… et Cana) se retrouvent dans un périmètre géographique limité, ce qui expliquerait la fréquentation de Kafr Kanna en raison de sa proximité.

Cette « méprise » a été confortée jusqu’à nos jours par les analyses de plusieurs auteurs « délocalisés » (européens), réalisées à des époques fort éloignées des faits historiques (Victor Guérin en 1880, Fréderic Godet en 1903, J. Carl Laney en 1977, Klemens Kopp en 1964…). Cette posture étant elle-même encouragée par la confusion initiale qui avait guidé les pèlerins vers des localités proches de Jérusalem à partir du IVe siècle.

Tout en admettant l’existence d’un doute sur la localisation réelle, l’Église catholique de son côté a conservé l’hypothèse de Kafr Kanna, plus par permissivité vis-à-vis de la tradition populaire que par certitude historique et/ou archéologique.

Décidément, ces Occidentaux ! Dès qu’ils s’impliquent dans les affaires orientales, ils ont bien du mal à se déjuger… Hélas, on le constate encore de nos jours.

Ceci étant dit, quelle conséquence particulière cette découverte peut-elle avoir sur la vie d’un croyant ou d’un citoyen libanais ?

Pour mon défunt père Émile, ardent défenseur du Liban idéal (uni et multiconfessionnel), cette découverte était une source d’exaltation et d’espérance sans mesure.

Il m’encourageait avec ferveur (et sans relâche, comme seul un papa libanais sait le faire !) à rédiger un texte sur le sujet.

De mon côté, je lui répondais invariablement : Papa, cette découverte est enthousiasmante, il est vrai. Mais au final, qu’a-t-elle changé ? En quoi a-t-elle influencé le comportement des Libanais, qu’ils soient chrétiens ou pas ?

Ne sommes-nous pas aussi détachés de l’enseignement du Christ que Cana est ancrée dans le sol libanais ?

Depuis le décès de mon père, j’ai beaucoup réfléchi et j’ai fini par regretter mes propos. (J’espère que L’Orient-Le Jour paraît au ciel !)

Je m’en suis providentiellement remis à cette parole du Christ telle qu’elle apparaît dans les Évangiles de Matthieu, Marc et Luc : « Car à celui qui a, on donnera, et celui qui n’a pas, même ce qu’il croit avoir lui sera enlevé. »

J’ai enfin saisi la force indéfectible de la flamme qui anima mon père jusqu’à son dernier souffle.

Dans le chaos d’un pays qui part en miettes, les Libanais qui affrontent leur quotidien sans jamais se départir des valeurs véhiculées par le miracle de Cana, telles que la dignité, la justice, la foi, la joie, la fraternité et l’amour, seront comblés au centuple d’un supplément de dignité, de justice, de foi, de joie, de fraternité et d’amour.

Tandis que les Libanais qui foulent aux pieds les valeurs de ce pays, même la fortune (crapuleuse), les plaisirs (pervers), la bombance (fallacieuse), la fierté (poisseuse) et la puissance (assassine) avec lesquels ils avilissent cette terre leur seront enlevés.

Paix à ton âme papa.


Les textes publiés dans le cadre de la rubrique « Courrier » n’engagent que leurs auteurs. Dans cet espace, « L’Orient-Le Jour » offre à ses lecteurs l’opportunité d’exprimer leurs idées, leurs commentaires et leurs réflexions sur divers sujets, à condition que les propos ne soient ni diffamatoires, ni injurieux, ni racistes.

Cana de Galilée est le lieu choisi par Jésus-Christ pour accomplir son premier miracle. D’après le remarquable ouvrage de Naji Maroun Karam (Qana de Galilée, éditions Saër al-Mashrek), ce village où Dieu fait homme manifesta sa gloire aux hommes, en changeant l’eau en vin, se situerait au Liban, à 12 km au sud-est de Tyr.L’investigateur, archéologue et coordinateur des recherches...

commentaires (2)

Très bel article cher Mario, avec une conclusion marquante.

Vartkes arzoumanian

17 h 41, le 28 mars 2024

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Commentaires (2)

  • Très bel article cher Mario, avec une conclusion marquante.

    Vartkes arzoumanian

    17 h 41, le 28 mars 2024

  • Il faut pas crier car Israël veut faire le grand Israël, attention

    Eleni Caridopoulou

    17 h 58, le 27 mars 2024

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