Ils sont de sortie, calepin de PV en main, casque vissé sur le crâne, l’air grave et déterminé. Depuis quelques jours, les rues de Beyrouth semblent regorger de gendarmes venus tenter de mettre de l’ordre dans le chaos qu’est redevenu le trafic de la capitale libanaise, à grands coups de contraventions pour stationnement interdit. Interrogée par L’OLJ à ce sujet, une source sécuritaire souhaitant rester anonyme indique que c’est la direction des Forces de sécurité intérieure qui a pris la décision « de renforcer le contrôle de la circulation depuis un mois ».
Une façon, peut-être, de montrer aux membres de la diaspora de retour pour les fêtes de fin d’année que la loi est appliquée comme partout ailleurs. « Je me suis garée un quart d’heure devant une boutique et, en ressortant, j’avais reçu une amende. J’ignorais que c’était interdit de se garer là ! » témoigne une conductrice sanctionnée dans le quartier de Salim Salam. Une surprise compréhensible, quand partout à Beyrouth, les véhicules sont garés en double, voire en triple file, au grand dam des rares piétons ayant la témérité de marcher sur les trottoirs.
« Parklet »
Dans la salle d’attente de la municipalité de Beyrouth, Mona Hallak, urbaniste fondatrice de l’AUB Neighborhood Initiative, est venue évoquer le projet de « parklet », un stationnement piéton qu’elle souhaite inaugurer début 2024 devant l’Université américaine de Beyrouth. Elle compte bien mettre un terme à la présence de scooters inondant les trottoirs dont elle montre une photo, exaspérée : « J’aimerais vraiment que les amendes pour stationnement en double file soient appliquées, mais cela ne va probablement pas durer », dit-elle, faisant écho à ce que disaient les automobilistes interrogés au lendemain de l’adoption du nouveau code de la route en 2015. Et d’ajouter : « D’autant que la somme demandée est dérisoire. »
Cinquante mille livres libanaises, soit 0,56 dollar, voilà la somme inscrite par le gendarme George Abi Habib sur le PV qu’il tend à une jeune femme garée quasiment au milieu de la chaussée, entre Adlieh et le Musée national. En découvrant cette somme, la jeune femme, au début énervée, esquisse un sourire discret. « Je peux vous les payer directement ? » s’enquiert-elle, prête à sortir un billet bleu. Mais l’homme en uniforme lui demande d’aller à la gendarmerie de Tayouné. Sur place, l’un des gendarmes s’exprimant de façon anonyme assure n’avoir reçu aucune directive pour augmenter les contrôles de stationnement.
Et quand on lui demande pourquoi la contravention est moins chère qu’une place dans un parking privé, qui oscille entre 100 000 et 200 000 LL, selon les quartiers, il répond que les tarifs n’ont pas été amendés depuis longtemps. Selon la source sécuritaire précitée, les contraventions vont de 50 000 à 3 000 000 LL (environ 33 dollars). « Nous attendons le vote de la loi de finances pour 2024 par le Parlement pour réajuster ces tarifs, mais c’est vrai que cela reste très peu », déclare-t-il.
Et comme la moitié des véhicules circulant dans les rues de la capitale n'ont pas de plaques d'immatriculation...
07 h 58, le 23 décembre 2023