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Politique - Tragédie du 4-Août

Le Conseil d’État annule une décision de Maoulaoui concernant Bitar

Le ministre sortant de l’Intérieur avait décidé, le 22 septembre 2021, que les responsables mis en cause par le juge d’instruction soient notifiés par de simples huissiers plutôt que par les forces de sécurité.

Le Conseil d’État annule une décision de Maoulaoui concernant Bitar

Une vue du port de Beyrouth détruit par la double explosion d’août 2020. Anwar Amro/Archives AFP

Une toute petite brèche s'est ouverte dans l’impasse dressée par la classe politico-judiciaire devant le juge d’instruction près la Cour de justice chargé du dossier de la double explosion au port de Beyrouth (4 août 2020) Tarek Bitar. Le Conseil d’État, présidé par Fadi Élias et composé également de Hiba Braïdy et Carl Irani, a récemment annulé une décision prise le 22 septembre 2021 par le ministre sortant de l’Intérieur Bassam Maoulaoui de refuser de notifier à travers les Forces de sécurité intérieure (FSI) les convocations du juge Bitar adressées à « des hommes politiques occupant (ou ayant occupé) des fonctions au sein du pouvoir exécutif ».

Si l’arrêt, dont L’Orient-Le Jour a consulté une copie, ne précise pas quels sont les hommes politiques en question, les archives montrent que la veille de la décision de M. Maoulaoui, le juge Bitar avait fixé au 30 septembre 2021 une audience au député et ancien ministre Ali Hassan Khalil, et au 1er octobre, les audiences du député et ancien ministre Ghazi Zeaïter et de l’ancien ministre Nohad Machnouk. M. Bitar avait été notifié de la décision du ministre de l’Intérieur sortant le 28 septembre 2021, soit avant les dates prévues des interrogatoires.

La décision du Conseil d’État fait suite à une action en annulation de la décision de M. Maoulaoui contre l’État libanais et le ministère de l’Intérieur, intentée par le bureau des plaintes créé par l’ancien bâtonnier Melhem Khalaf au sein de l’ordre des avocats de Beyrouth. La plainte avait été présentée au nom d’Amine Sadek, qui figure parmi près de 1 400 plaignants que le bureau de plaintes représente devant le juge d’instruction près la Cour de justice.

Dans la procédure devant le Conseil d’État, M. Sadek avait soutenu que la décision du ministre sortant Maoulaoui viole l’article 147 du code de procédure pénale, selon lequel « les pièces de convocation, mandats, jugements et mesures judiciaires sont signifiés et exécutés par des brigades spéciales placées sous les ordres directs du procureur général, du premier juge d’instruction et des présidents des juridictions et tribunaux compétents ». Il avait indiqué que le ministre sortant Maoulaoui, ancien magistrat, « appliquait lui-même cet article lorsqu’il présidait la Cour criminelle du Liban-Nord ».

Devant la haute instance, les avocats de M. Sadek avaient également affirmé que « l’objectif implicite » de la mesure ministérielle était d’« entraver l’enquête » sur la double explosion au port de Beyrouth. « Des huissiers ordinaires ne jouissent pas de l’autorité et des moyens des FSI, sachant que s’ils s’étaient présentés, les gardes des politiciens leur auraient interdit de les notifier », avaient-ils avancé.

Le 2 janvier 2022, le ministère de l’Intérieur avait déclaré, en réponse aux conclusions du bureau des plaintes, qu’« il n’y avait ni de raisons sécuritaires, ni de circonstances exceptionnelle,s ni un manque d’huissiers qui empêchaient ces derniers d’exécuter les notifications par la voie ordinaire ». « Les FSI ne sont pas obligées de procéder aux notifications », avait ajouté le ministère, précisant qu’« elles le font sous l’angle d’une coopération avec les autorités judiciaires pour faciliter leur travail ».

Selon l’arrêt, le Conseil d’État avait réclamé des documents au ministère de l’Intérieur que celui-ci n’a pas présentés. Pour la haute juridiction, ce manque l’a empêchée « de vérifier les éléments matériels et juridiques sur lesquels le ministre s’était basé pour prendre sa décision et a renforcé la présomption de véracité des arguments du plaignant ».


Pouvoir arbitraire et précédent dangereux

Le Conseil d’État a par ailleurs réfuté les arguments selon lesquels « le ministre de l’Intérieur a usé de son pouvoir discrétionnaire d’exécuter les notifications que lui donne l’article 210 de la loi sur l’organisation des Forces de sécurité intérieure », jugeant que « pouvoir discrétionnaire ne signifie pas pouvoir arbitraire et décision illégale ».

La haute instance a enfin condamné le fait que M. Maoulaoui ait pris sa décision sur base d’une note que lui avait envoyée le directeur général des FSI, selon lequel une exécution des notifications aurait pu « porter préjudice à la direction des FSI et l’impliquer dans des tiraillements politiques propres à impacter son indépendance et sa neutralité ». « Donner à la police judiciaire le pouvoir d’évaluer la situation politique et l’opportunité de l’exécution des notifications constitue un précédent dangereux de nature à entraver le cours de la justice et paralyser le service public », peut-on enfin lire dans l’arrêt.

Joint par L’Orient-Le Jour, Me Akram Azoury, qui fait partie du bureau des plaintes, se félicite de la décision du Conseil d’État. « La justice administrative a affirmé son indépendance par rapport au pouvoir exécutif en contrôlant la légalité de ses actes », déclare-t-il, estimant que « l’arrêt contribue au rétablissement de la confiance des Libanais dans leur justice ».

Un magistrat qui a requis l’anonymat note que « la décision du Conseil d’État prouve que le pouvoir politique bloque le cours de l’enquête en empêchant que des personnes mises en cause comparaissent devant la justice », « Dans les pays développés, tout responsable politique qui commettrait un acte similaire à celui de M. Maoulaoui serait sanctionné », a-t-il ajouté.

Une toute petite brèche s'est ouverte dans l’impasse dressée par la classe politico-judiciaire devant le juge d’instruction près la Cour de justice chargé du dossier de la double explosion au port de Beyrouth (4 août 2020) Tarek Bitar. Le Conseil d’État, présidé par Fadi Élias et composé également de Hiba Braïdy et Carl Irani, a récemment annulé une décision prise le 22...
commentaires (2)

Alors si on comprend bien, l’armée ne peut pas intervenir dans La Défense de notre territoire par peur de la diviser, les FSI ne peuvent pas faire leur boulot pour ne pas je cite: «  porter préjudice à la direction des FSI et l’impliquer dans des tiraillements politiques propres à impacter son indépendance et sa neutralité ». Alors qu’on nous explique a qui on doit faire appelle pour les remplacer? Aux voyous armés qui détiennent le pouvoir? Parce qu’il ne reste que ça à faire pour satisfaire les projets de nos usurpateurs afin que justice n’ait jamais lieu. C’est quoi cette mascarade?

Sissi zayyat

12 h 11, le 18 novembre 2023

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Commentaires (2)

  • Alors si on comprend bien, l’armée ne peut pas intervenir dans La Défense de notre territoire par peur de la diviser, les FSI ne peuvent pas faire leur boulot pour ne pas je cite: «  porter préjudice à la direction des FSI et l’impliquer dans des tiraillements politiques propres à impacter son indépendance et sa neutralité ». Alors qu’on nous explique a qui on doit faire appelle pour les remplacer? Aux voyous armés qui détiennent le pouvoir? Parce qu’il ne reste que ça à faire pour satisfaire les projets de nos usurpateurs afin que justice n’ait jamais lieu. C’est quoi cette mascarade?

    Sissi zayyat

    12 h 11, le 18 novembre 2023

  • Encore un bel example de notre classe politique pourrie jusqu’a la moelle. Et le pire c’est que le peuple de mouton applaudi.

    JD

    00 h 38, le 18 novembre 2023

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