Un groupe d'habitants célébrant, le 7 octobre 2023, quartier Mar Elias à Beyrouth l'opération du Hamas contre Israël. Photo Mohammad Yassine
Samedi matin, au lendemain du 50e anniversaire du début de la guerre du Kippour qui avait opposé Israël à ses voisins arabes, l'Etat hébreu s'est réveillé sous un déluge de roquettes palestiniennes et une infiltration inédite de combattants du Hamas en Israël. Tel-Aviv, encore sous le choc, n'a pas tardé à riposter. Cette guerre a déjà fait des dizaines de morts et des centaines de blessés dans les deux camps, faisant craindre un embrasement de plus grande envergure.
Au Liban, l'opération que le Hamas a baptisée « Déluge d'al-Aqsa », a été saluée comme « héroïque » par le Hezbollah, allié du parti islamiste palestinien, et comme un « jour historique » par un responsable d'une faction palestinienne au Liban. Des scènes de liesses populaires ont également été recensées à Beyrouth et dans les camps palestiniens disséminés dans tout le pays.
Mais face au risque de l'extension du conflit au Liban, le chef des Forces libanaises Samir Geagea, farouche opposant au Hezbollah, a plaidé pour garder les Libanais à l'écart de cette guerre entre Palestiniens et Israéliens.
Retour sur les réactions au Liban, samedi.
Le soutien verbal du Hezbollah
Alors que tous les yeux étaient rivés sur le Hezbollah pour voir s'il lancerait un appel à ouvrir un front armé contre Israël en soutien au Hamas, le parti chiite a publié un communiqué en fin de matinée dans lequel il se contente de saluer l'opération de son allié palestinien et lui exprimer son soutien.
Pour le Hezbollah, l'opération palestinienne « héroïque à grande échelle » et « victorieuse », « est une réponse décisive aux crimes de l'occupation et aux agressions continues contre le sacré et la dignité. Elle prouve encore une fois que la volonté du peuple palestinien et les armes de la Résistance sont la seule option pour faire face à l'ennemi et à l'occupation. Ils constituent un message au monde arabe et musulman, ainsi qu'à la communauté internationale, surtout ceux qui cherchent à normaliser leurs relations avec l'ennemi, pour dire que la cause palestinienne ne meurt pas ».
« Nous appelons les peuples de notre nation arabe et musulmane dans le monde à annoncer leur soutien au peuple palestinien et aux mouvements de résistance qui affirment leur union sur le terrain à travers le sang, la parole et l'action », ajoute le Hezbollah.
Il conclut son communiqué en affirmant que « la direction de la Résistance islamique au Liban suit les développements sur le terrain palestinien de près et avec grand intérêt. Elle est en contact direct avec la direction de la résistance palestinienne de l'intérieur et de l'extérieur et évalue constamment avec elle la situation et le déroulement des opérations ». « Nous appelons le gouvernement ennemi sioniste à tirer les leçons des faits que la résistance palestinienne a imposés sur le terrain », conclut le Hezbollah.
Le mouvement Amal, allié du Hezbollah, a de son côté publié un communiqué samedi dans lequel il « rend hommage avec fierté et reconnaissance aux courageux combattants de la résistance palestinienne » qui se battent pour mettre fin à « l'occupation israélienne ». « Le déluge d'al-Aqsa est une nouvelle aube pour la nation et pour la Palestine, dépassant les frontières de Gaza et marquant la naissance du rêve palestinien de libération et l'établissement d'un État palestinien indépendant avec sa capitale Jérusalem », poursuit le communiqué.
« La vraie normalisation »
Le ministre libanais sortant de la Culture, Mohammad Mortada, proche du Hezbollah, a estimé samedi sur le réseau X que « ce qui se passe aujourd'hui n'est qu'une étape majeure vers une la vraie normalisation, que nous demandons à Dieu de bénir et de couronner de succès ». « L'occupation israélienne est contraire à la nature, en contradiction avec les valeurs humaines, en violation du droit international et des droits nationaux », a-t-il estimé. Il a poursuivi : « Par conséquent, la véritable normalisation (...) consiste à ramener les choses à leur état naturel, c'est-à-dire éliminer l'occupation, libérer la terre et récupérer les droits ».
Plus prudent, le chef des Forces Libanaises Samir Geagea a estimé lui dans un message sur X que « le plus important, est de ne pas impliquer les Libanais dans ce qu'ils ne pourront pas supporter, compte tenu de toutes les difficultés auxquelles ils sont confrontés », en allusion probable a une éventuelle participation du Hezbollah à la guerre entre les Palestiniens et Israel.
Le dernier conflit entre le Liban et Israël remonte à juillet 2006, lorsque le Hezbollah et Israël s'étaient engagés dans une guerre qui a duré 34 jours. Celle-ci avait été déclenchée après l'enlèvement de deux soldats israéliens par le Hezbollah. Le conflit avait fait plus de 1 200 morts côté libanais, en majorité des civils, et 160 côté israélien, en majorité des militaires.
Par ailleurs, la section médias du Courant patriotique libre dirigé par le député Gebran Bassil, allié chrétien du Hezbollah, a estimé dans un communiqué que « la politique d'oppression de l'ennemi contre le peuple palestinien devait inévitablement mener à l'explosion de colère des oppressés ». Le parti aouniste a appelé cependant « la résistance palestinienne à respecter les conventions en temps de guerre et les droits de l'homme », et les Libanais à surmonter leurs divisons et prendre conscience de la gravité du séisme qui frappe la région ». Le CPL a conclu en plaidant pour « le maintien du Liban à l'écart des conséquences de ce conflit ».
Une « opération était préparée depuis un moment »
Dans les milieux palestiniens, Mohammad Yassine, un responsable du Front de libération de la Palestine au Liban a affirmé à L'Orient-Le Jour qu'il « est temps d'ouvrir les frontières arabes vers la Palestine ». « Cette opération était préparée depuis un moment par les factions palestiniennes en réaction aux agressions de l'ennemi israélien contre notre terre et notre peuple ». « Ouvrez les frontières afin que nous nous rendions en Palestine » a-t-il dit.
Chakib el-Aïni, un cadre du Jihad islamique, a qualifié pour sa part dans des propos à L'OLJ l'offensive du Hamas contre Israël de « jour historique ». « La résistance est passée de la défensive à l'offensive », affirme-t-il. « Cette opération est le début de la libération de la Palestine », a-t-il encore dit.
Scènes de liesse
Sur le terrain, des scènes de liesse ont été enregistrées dans plusieurs villes libanaises et dans les camps palestiniens.
A Beyrouth, des dizaines de personnes, hommes, femmes et enfants se sont rassemblés en brandissant les drapeaux de la Palestine. Comme dans le quartier de Mar Elias, où se trouve un camp de réfugiés palestiniens.
Des femmes portant des drapeaux palestiniens, le 7 octobre 2023 quartier Mar Elias à Beyrouth. Photo Mohammad Yassine
Au Liban-Sud, selon notre correspondant dans la région, Mountasser Abdallah, des Palestiniens ont célébré l'offensive du Hamas dans les camps de Rachidiyé, Bourj el-Chamali, Aïn el-Héloué et Bass, selon plusieurs sources palestiniennes dans ces camps.
Au large de Saïda, des bateaux de pêcheurs arborant les drapeaux libanais et palestiniens ont défilé pour exprimer leur joie face à l'opération menée contre Israël.
Des bateaux de pêcheurs arborant des drapeaux libanais et palestiniens naviguent au large de Saïda, au Liban-Sud, le 7 octobre 2023. Photo envoyée par notre correspondant Mountasser Abdallah
Dans la Békaa centrale, les haut-parleurs des mosquées ont récité des prières pour célébrer l'opération militaire du Hamas contre Israël, rapporte notre correspondante dans la région, Sarah Abdallah.
Au Liban-Nord, dans les camps de réfugiés palestiniens de Beddaoui et Nahr el-Bared, la liesse était également de mise selon notre correspondant dans la région Michel Hallak.
Des jeunes dans le Akkar au Liban-Nord munis de drapeaux palestiniens distribuent des pâtisseries aux automobilistes, le 7 octobre 2023. Photo envoyée par notre correspondent Michel Hallak
Dans le village de Barkayel, dans le Akkar, des jeunes sont descendus dans les rues, arborant des drapeaux palestiniens, pour distribuer des baklavas et autres pâtisseries orientales aux automobilistes, afin d'exprimer leur joie et leur soutien aux attaques palestiniennes.
commentaires (4)
Ces pauvres diables fanfaronnent alors que leurs habitations ainsi que la vie de leurs enfants sont en jeu. Ils espèrent récupérer après coup quelques pécules comme ils ont l’habitude de faire alors que cette fois-ci le sort de leur pays est en jeu. Où iront ils si le Liban serait détruit, En Palestine?
Sissi zayyat
11 h 30, le 08 octobre 2023