Des habitants de la bande de Gaza fuient leurs maisons pour s'éloigner de la frontière avec Israël après que des barrages de roquettes ont été tirés depuis l'enclave côtière vers Israël, le 7 octobre 2023, entraînant une réponse de l'Etat hébreu. Mahmud Hams/AFP
« Même s’il m’arrive quelque chose, je serais plus que fière d’avoir assisté à ce jour ». Depuis samedi matin, Hind vit un ascenseur émotionnel. « La peur, quand on entend les missiles. Puis l’exultation quand on regarde les vidéos de combattants », confie cette jeune habitante de Gaza. Dans l’enclave, sous siège depuis seize ans, la surprise est partout. Personne ne s’attendait à cette percée inédite de la branche armée du parti Hamas au pouvoir, les Brigades Al-Qassam, qui a infligé des coups sans précédent aux Israéliens. Jusqu’à présent, plus d’une vingtaine d’Israéliens sont décédés. La police israélienne estime que « 60 assaillants actifs se trouvent en Israël dans 14 endroits différents », selon le Haaretz, tandis qu’ils auraient pris en otage des dizaines de citoyens.
Tôt samedi matin, le mouvement islamiste a lancé des roquettes et mené une incursion terrestre, maritime et aérienne sans précédent à partir de la bande de Gaza sur le territoire israélien. Une opération qui fait écho à l’offensive surprise de 1973, au cours de laquelle les Égyptiens et les Syriens ont déclaré la guerre à Israël en plein Yom Kippour. Partout sur les réseaux sociaux, les vidéos de Palestiniens pénétrant du côté israélien de la barrière frontalière entre Israël et l’enclave sont abondamment reprises. De même que des scènes de colons israéliens fuyant dans la précipitation les environs de Gaza. « Je n'ai jamais pensé qu'en tant que Palestinienne, je connaîtrais la « liberté », témoigne encore Hind. Maintenant, je la ressens ». « Tous les Palestiniens sont fiers de ce que le Hamas a fait », renchérit Sana, 27 ans.
Sac d'urgence
Une joie omniprésente, qui ne suffit pas à calmer l’angoisse. Après les tirs de roquettes du Hamas, l’armée israélienne a commencé à bombarder Gaza, lançant l’opération « Glaives de fer » en réponse à celle du mouvement islamiste, « déluge d'Al-Aqsa ». « Je vois et j’entends les missiles dans le ciel, le climat est angoissant…», partage Sana. Pour l’heure, la jeune femme a décidé de rester chez elle, alors qu’aucune frappe n’est tombée à proximité. De son côté, Hanan* est semée par la confusion. « Depuis ce matin, j’entends des explosions massives. Je n’ai pas encore évacué ma maison mais j’ai préparé un sac d’urgence…», reconnaît-elle. La guerre est familière des habitants de l’enclave. Mais pour beaucoup, la situation est inédite. « Tous les Palestiniens à Gaza et en dehors sont choqués. Cette opération est différente de toutes les autres. Et cette fois, c’est notre résistance qui a commencé l’attaque ».
Si le mouvement islamiste est d’ordinaire contesté en coulisses par certains habitants de Gaza pour sa dérive autoritaire, tous semblent se tenir aujourd’hui derrière lui. « Beaucoup de gens font la différence entre le Hamas et Al-Qassam. Ils ne soutiennent pas politiquement le Hamas mais soutiennent les combattants palestiniens qui nous défendent contre l'occupation », explique Hind. Pour la jeune femme, l’opération « déluge d'Al-Aqsa » est une réponse directe aux évacuations, lundi dernier, par la police israélienne de fidèles musulmans priant à la mosquée Al-Aqsa de Jérusalem-Est. Plusieurs manifestants palestiniens interdits d’accès ont été arrêtés, ainsi que deux leaders religieuses, poussées au sol par la police.
Mais l’ampleur de la séquence et des pertes infligées à Israël est telle que les Palestiniens de l’enclave s’attendent à des représailles jamais vues. Dans un message vidéo, le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, a déclaré : « Nous sommes en guerre et nous gagnerons ». « Il ne s’agit pas d’une (simple) opération (…). L’ennemi paiera un prix sans précédent », a-t-il ajouté. « Je sens que la réponse d’Israël va être la plus mortelle », lâche à nouveau Hind.
*Le prénom a été modifié
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