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Économie - Cherté de la vie

« Tragi-comique » : la nouvelle hausse salariale à la peine derrière l’inflation

Les employés du secteur privé se sont vu officiellement octroyer hier une hausse de 600 000 livres libanaises, portant le montant à 2,6 millions de livres, soit près de 65 dollars par mois au taux actuel du marché.

« Tragi-comique » : la nouvelle hausse salariale à la peine derrière l’inflation

Le décret n°10598, publié hier au « Journal officiel », accorde une augmentation de 600 000 livres libanaises au salaire des employés du secteur privé, portant le salaire minimum à 2,6 millions de livres. Photo João Sousa

Si le taux d’inflation avance à pas de géant depuis le début de la crise il y a trois ans (+1 270 % entre août 2019 et août 2022), les salaires, eux, ne suivent qu’à pas de tortue. En effet, après la publication hier dans le Journal officiel du décret n° 10598, les employés du secteur privé se sont vu octroyer une hausse de 600 000 livres libanaises, portant le montant à 2,6 millions de livres, soit une augmentation de 285 % en trois ans.

Contacté par L’Orient-Le Jour, le président de la Confédération générale des travailleurs libanais (CGTL), Béchara Asmar, a indiqué que « ce texte a été publié hier dans un numéro exceptionnel du Journal officiel pour qu’il soit effectif à partir de ce mois ». Il a d’ailleurs précisé que l’élaboration de ce décret par les principaux intéressés avait débuté il y a « près de trois mois », suite à laquelle il avait été validé par le Conseil d’État.

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En théorie, il s’agit donc bien d’une hausse salariale mais en réalité celle-ci est complètement sapée par la dépréciation de la monnaie nationale, qui s’échangeait hier autour de 40 300 livres sur le marché libre, soit une perte de 96 % de sa valeur depuis le début de la crise. Dans les faits, cette majoration, qui équivaut à peine donc à 15 dollars et qui porte ainsi le salaire minimum au Liban à près de 65 dollars, contribuera certainement à accélérer la spirale inflationniste dans laquelle est enfoncé le Liban, suite à la création monétaire que celle-ci impliquerait.

Un constat qu’établit Castro Abdallah, président de la Fédération nationale des syndicats et des employés du Liban (Fenasol), qualifiant cette situation de « tragi-comique », alors que le salaire minimal valait 450 dollars avant la crise (675 000 livres au taux de 1 507,5 livres le dollar).

Pas une aide, mais un salaire

Accordée à tous les employés du secteur privé, cette nouvelle majoration s’ajoute à celle de 1 325 000 livres qui avait été rendue obligatoire le 12 mai pour les employés dont le salaire était inférieur à 4 millions de livres, alors qu’elle était optionnelle pour les salaires au-dessus de ce palier. En ce qui concerne le salaire journalier, le nouveau décret instaure une majoration obligatoire de 28 000 livres. Ce salaire avait déjà été augmenté de 61 000 livres pour les rémunérations ne dépassant pas les 182 000 livres dans le décret de mai, alors qu’au-delà de ce niveau, l’augmentation était optionnelle.

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Toujours selon ce décret, ces augmentations ne sont pas considérées comme des aides mais font plutôt partie du salaire de base des employés, en fonction duquel sont calculées les contributions à la Caisse nationale de Sécurité sociale (CNSS). De plus, le texte précise que si les employés bénéficient en parallèle d’une aide sociale, ils arrêteront de la percevoir sauf si celle-ci est supérieure à cette nouvelle hausse salariale. Le cas échéant, ils continueront à percevoir la différence entre cette aide et les 600 000 livres supplémentaires, sans que ce différentiel ne soit inclus au salaire de base.

Quant à l’indemnité de transport dans le secteur privé, elle se situe toujours à 95 000 livres, après avoir été revue à la hausse deux fois depuis le début de l’année : une première fois début février, l’augmentant de 24 000 à 65 000 livres par jour, et une deuxième fois, mi-août, la portant à 95 000 livres par jour.

Les revendications de la Fenasol

En marge de cette annonce hier, le comité de l’indice des prix, un organe consultatif créé par le décret n° 4206 du 8 août 1981, qui peut soumettre ses recommandations au Conseil des ministres concernant le niveau des salaires ou le coût de la vie, a tenu hier sa huitième réunion en présence de nombreux représentants des organisations d’employeurs et de salariés.

Selon le communiqué publié à son terme, l’objectif de ces réunions est double : discuter de la mise en place d’un nouveau système de retraite qui viendra compléter celui de l’indemnité de fin service actuellement en vigueur, sans pour autant finaliser ce projet, d’une part, et établir une nouvelle grille salariale qui tiendra compte des circonstances socio-économiques du pays et de l’inflation qui y sévit à cause de l’effondrement de la livre, d’autre part.

Une grille salariale qui « devrait revaloriser tous les salaires » en tenant compte de l’inflation galopante, a ainsi précisé Béchara Asmar, également présent à cette réunion. Tout comme pour le premier objectif, aucune décision finale n’a été adoptée à ce niveau, alors que les discussions ont été ajournées au 10 novembre, en attendant davantage de données de la part du patronat.

De son côté, la Fenasol, qui a dénoncé le fait de ne pas avoir été invitée à cette réunion, a adressé dans son communiqué quatre revendications ayant pour objectif d’améliorer les conditions de vie des employés :

– l’augmentation du salaire minimum à 23 millions de livres, soit « le revenu minimum nécessaire pour une famille de 4 personnes » ;

– l’adoption d’une nouvelle grille des salaires qui protège les rémunérations face à la dépréciation de la monnaie nationale ;

l’augmentation de l’indemnité de transport à 200 000 livres par jour, avec effet rétroactif à partir du 1er janvier 2022, et des aides scolaires à 3 millions de livres pour chaque enfant, et ce jusqu’à trois enfants par famille ;

– l’inclusion de toute augmentation relative à la cherté de la vie dans le salaire de base, de sorte qu’elle soit prise en considération dans le calcul des indemnités de fin de service.

Si le taux d’inflation avance à pas de géant depuis le début de la crise il y a trois ans (+1 270 % entre août 2019 et août 2022), les salaires, eux, ne suivent qu’à pas de tortue. En effet, après la publication hier dans le Journal officiel du décret n° 10598, les employés du secteur privé se sont vu octroyer une hausse de 600 000 livres libanaises, portant le...

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